Résumé
Le présent rapport est soumis en application de la résolution 73/195 de l’Assemblée générale en date du 19 décembre 2018, dans laquelle l’Assemblée a prié le Secrétaire général, comptant sur l’appui du Réseau des Nations Unies sur les migrations, de lui rendre compte tous les deux ans de la mise en œuvre du Pacte mondial pour des migrations sûres, ordonnées et régulières, des activités du système des Nations Unies à cet égard, ainsi que du fonctionnement des arrangements institutionnels. Il fait également suite à la demande formulée par l’Assemblée dans sa résolution 73/326 du 19 juillet 2019, par laquelle elle a prié le Secrétaire général de donner dans le rapport biennal qui précéderait chaque forum, en s’appuyant sur le Réseau, des indications qui guideraient les délibérations, y compris les tables rondes et le débat d’orientation, et de faire paraître ce rapport 12 semaines au moins avant chaque forum. Il s’appuie sur les contributions et les résultats des examens régionaux du Pacte mondial, ainsi que sur les consultations tenues avec les États Membres et les parties prenantes et les discussions menées avec les organismes des Nations Unies. L’établissement du rapport a été supervisé par le Comité exécutif du Réseau, composé de l’Organisation internationale du Travail, de l’Organisation internationale pour les migrations, du Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme, du Fonds des Nations Unies pour l’enfance, du Département des affaires économiques et sociales, de l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime, du HautCommissariat des Nations Unies pour les réfugiés, du Programme des Nations Unies pour le développement et de l’Organisation mondiale de la Santé.
I. Introduction
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La nécessité d’un cadre de coopération en matière de migration n’a jamais été aussi manifeste, et la perspicacité des États Membres et des parties prenantes dans l’élaboration du Pacte mondial pour des migrations sûres, ordonnées et régulières n ’a jamais été aussi évidente. Le premier Forum d’examen des migrations internationales, qui se tiendra en mai 2022, offre à la communauté internationale une occasion unique de renforcer la pertinence et l’actualité du Pacte, d’évaluer son incidence à ce jour et de veiller à ce qu’il serve à équiper les sociétés pour relever les défis de l’avenir.
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Depuis l’adoption du Pacte, le 10 décembre 2018, les migrations internationales sont restées omniprésentes et constituent une question d’une importance capitale. Cela a été particulièrement perceptible dans la riposte à la pandémie de maladie à coronavirus (COVID-19), pour le meilleur et pour le pire. Les migrantes et migrants ont fait partie des groupes les plus touchés, que ce soit par un risque accru d’infection au coronavirus, un accès limité ou inexistant aux services de santé et à la protection sociale, la perte d’emploi, la discrimination, les séparations familiales prolongées, l’impossibilité d’accéder à l’apprentissage en ligne et aux services à l’enfance ou des conditions de retour dangereuses et indignes.
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Les rôles essentiels que jouent tant de migrantes et migrants en tant que prestataires de services de première ligne, acteurs centraux de nos chaînes d’approvisionnement et sources cruciales de soutien pour leurs familles et leurs communautés ont été reconnus et célébrés à juste titre dans de nombreux pays. Face à la pandémie et à ses répercussions, de nombreux États ont fait preuve de prévoyance en écartant les obstacles par des politiques ou des pratiques, afin de garantir que l’accès aux soins de santé et aux vaccins soit non discriminatoire et de veiller à ce que les travailleuses et travailleurs migrants conservent leur emploi, par exemple en adaptant les voies de migration régulière. D’autres ont interrompu les expulsions et accéléré le recours à des solutions de substitution à la détention d’immigrants. De plus, les transferts de fonds sont restés résilients et ont apporté un soutien essentiel aux familles et aux communautés.
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Ces exemples seront d’importantes sources d’inspiration pour le Forum d’examen des migrations internationales et ses résultats. Il importera également de reconnaître et de traiter les nombreux déficits qui subsistent, notamment la manière dont la gouvernance des migrations, qu’elle réponde à la pandémie de COVID-19 ou non, laisse trop de migrantes et migrants dans des situations désespérées de vulnérabilité ou leur refuse tout moyen d’action. Le fait de ne pas inclure explicitement les migrantes et migrants dans les plans de vaccination sape tout engagement envers des objectifs de santé publique plus larges et la lutte contre les inégalités, ce qui dévalorise l’engagement solennel de ne laisser personne de côté que les États Membres ont pris dans le Programme de développement durable à l’horizon 2030.
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Il convient en outre de reconnaître que la pandémie de COVID-19 a remodelé les migrations internationales à bien des égards. L’évolution des restrictions de voyage et des conditions d’entrée a profondément modifié les mécanismes d’admission, de séjour, de travail et de retour, et partant les possibilités de déplacement. Il est clair, cependant, que de nombreux problèmes sont antérieurs à la pandémie. La discrimination, la xénophobie, la désinformation et la stigmatisation des migrantes et migrants ou des minorités associées à la migration restent virulentes. Dans cet environnement, les migrantes et migrants sont vilipendés et même considérés comme des menaces. Il est inacceptable que, dans le monde d’aujourd’hui, des milliers de migrantes et migrants endurent d’innommables souffrances et disparaissent ou meurent au cours de leurs périples migratoires.
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Les principes directeurs, les objectifs et les mesures proposés dans le Pacte constituent la feuille de route pour surmonter ces problèmes. En effet, comme le montre le présent rapport, la valeur du Pacte en tant que pierre de touche et guide pour les États a été manifeste tout au long de la pandémie, alors qu’ils s’efforçaient de permettre à tous de tirer le meilleur parti des migrations.
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Dans le contexte de nouvelles transitions, il convient de promouvoir la vision formulée dans le Pacte pour faciliter des migrations sûres, ordonnées et régulières pour tous et en faire connaître les avantages et renforcer le potentiel que recèle le Pacte s’agissant de favoriser la réalisation des objectifs de développement durable. Des efforts ciblés seront requis pour la prochaine phase de réalisation des ambitions du Pacte, notamment des engagements concrets aux fins de son application. Le prochain Forum d’examen des migrations internationales offre en particulier l’occasion d’exploiter le pouvoir du multilatéralisme pour fournir des orientations concrètes dans trois domaines d’importance primordiale et commune.
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Le premier domaine concerne la manière de mieux promouvoir des sociétés inclusives et de faire en sorte que les migrantes et migrants soient plus efficacement intégrés dans les communautés et les économies, qu’elles soient de destination, de transit ou d’origine, et ne soient pas uniquement définis par leur statut migratoire.
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Le deuxième domaine concerne la manière dont les migrations régulières peuvent être encouragées par des voies diversifiées et des possibilités de régularisation et de réintégration durable, tout en faisant face aux répercussions de la pandémie et en se préparant aux effets croissants des changements climatiques et à l’évolution des sociétés et des économies.
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Le troisième domaine concerne la manière de réduire les vulnérabilités qui portent atteinte aux droits ou au bien-être des migrantes et migrants, de leurs familles et des sociétés, notamment les tragédies provoquées par les migrations irrégulières et précaires et les interventions y afférentes.
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Les enseignements tirés de la pandémie offrent une occasion opportune de recalibrer la gouvernance des migrations soucieuse des questions de genre et du bienêtre des enfants aux niveaux local, national, régional et mondial, afin que les engagements pris au titre du Pacte, du Programme 2030 et de la déclaration faite lors de la célébration du soixante-quinzième anniversaire de l’Organisation des Nations Unies soient respectés pour tous les migrantes et migrants, et pour toute l’humanité. À l’approche du premier Forum d’examen des migrations internationales, le présent rapport adresse aux États un appel pour qu’ils prennent des mesures concertées afin de progresser vers un monde qui favorise véritablement les droits, la dignité et le bien-être des migrantes et migrants et qui soit fondé sur la coopération et le droit international.
Aperçu des migrations et de la situation des migrantes et migrants : données et tendances mondiales
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Le nombre de personnes vivant en dehors de leur pays de naissance ou de citoyenneté a connu une forte augmentation au cours des dernières décennies, atteignant 281 millions en 2020.
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En conséquence, la part du nombre de migrantes et migrants internationaux dans la population mondiale est passée de 2,8 % en 2000 à 3,6 % en 2020.
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À la fin de 2020, 35,5 millions d’enfants de moins de 18 ans (soit 1 enfant sur 66 dans le monde) vivaient en dehors de leur pays de naissance.
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En 2019, il y avait plus de 169 millions de travailleuses et travailleurs migrants dans le monde.
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Le flux net de migrantes et migrants s’étant déplacés de régions moins développées vers des régions plus développées a été estimé à 2,8 millions par an sur la période 2015-2020.
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La pandémie pourrait avoir réduit le nombre de migrantes et migrants internationaux d’environ 2 millions à la mi-2020.
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Entre le 1er janvier 2019 et le 24 novembre 2021, plus de 8 436 décès de migrantes et migrants ont été enregistrés dans le monde et 5 534 autres migrantes et migrants ont été portés disparus et sont présumés morts.
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En 2020, les envois de fonds officiellement enregistrés vers les pays à revenu faible ou intermédiaire se sont élevés à 549 milliards de dollars, soit seulement 1,7 % de moins que le total des fonds envoyés en 2019.
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À leur apogée, à la mi-décembre 2020, les mesures imposées pour les voyages, les restrictions de mobilité et les fermetures de frontières décidées par les gouvernements dans le contexte de la pandémie de COVID-19 dépassaient 111 000 et, en novembre 2021, plus de 25 000 restrictions d’entrée liées à la pandémie étaient encore en place.