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Lettre d'information du Rapporteur spécial sur les droits des femmes en Afrique à l'occasion du 30ème anniversaire de la Commission africaine des droits de l’homme et des peuples (CADHP)

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Bienvenue à cette première lettre d’information du mécanisme de la Rapporteure spéciale sur les droits de la femme en Afrique. En publiant cette lettre d’information, le mécanisme a pour but de commémorer les 30 ans de l’entrée en fonction de la Commission africaine des droits de l’homme et des peuples (la Commission) à travers le prisme des droits de la femme sur le continent.

Créée en vertu de l’ article 30 de la Charte africaine des droits de l’ homme et des peuples (la Charte africaine), la Commission a pour mandat, entre autres, de promouvoir et de protéger les droits de l’ homme sur le continent, assurant ainsi que les êtres humains, indépendamment de leur sexe, race, groupe ethnique, couleur, langue, religion, opinion politique ou autre, origine nationale et sociale, fortune, naissance ou autre statut jouissaient des droits reconnus et garantis par la charte.
En dehors de cet article qui interdit toutes les formes de discrimination à l’ égard des femmes, cet instrument africain des droits humains contient très peu dans son contenu normatif sur la protection des droits des femmes. En fait, la seule référence faite aux femmes se trouve à l’article 18 qui stipule que: “L’Etat a le devoir de veiller à l’élimination de toute discrimination contre la femme et d’assurer la protection des droits de la femme et de l’enfant tels que stipulés dans les déclarations et conventions internationales.” En outre, l’Acte constitutif de l’Union Africaine (UA) est clair dans ses principes sur l’importance de l’égalité des genres. En 2001, une décision sur les femmes et le genre a exhorté les États parties à assurer la participation des femmes à la prise de décision.

Cela a été développé de façon plus approfondie en 2002 lorsqu’une résolution sur l’intégration du genre a été adoptée. Elle a promis que les femmes devraient représenter 50% de toutes les institutions de l’UA. Les droits des femmes ont été mis en évidence dans les articles de la Déclaration de Kigali sur les droits de l’homme, qui note «avec une grande préoccupation que les droits des femmes et des enfants, malgré les progrès réalisés, restent insuffisamment protégés dans de nombreux pays africains».
Tous ces cadres et politiques ne semblaient pas assurer une protection efficace des droits humains fondamentaux des femmes, car ce groupe vulnérable continuait à faire face à toutes les formes d’abus. Afin de combler cette lacune importante, le Protocole à la Charte africaine des droits de l’Homme et des peuples relatif aux droits des femmes en Afrique (Protocole de Maputo) a été adopté le 11 Juillet 2003. Il est entré en vigueur en 2005.

Les principaux articles du Protocole de Maputo abordent l’élimination de la discrimination à l’ égard des femmes; le Droit à la dignité Droit à la vie, à l’intégrité et à la sécurité de la personne, l’Élimination des pratiques néfastes ( en particulier les MGF) et autres pratiques traditionnelles préjudiciables aux femmes); le Mariage, la séparation, le divorce et l’annulation de mariage; L’accès à la justice et l’égale protection devant la loi; le Droit à la participation au processus politique et de prise de décision; le Droit des femmes à la protection et à la paix dans les situations de conflits armés; le Droit à l’éducation et à la formation; les Droits économiques et sociaux; droits à la Santé reproductive; le Droit à la sécurité alimentaire; Droit à un logement convenable, Droit au contexte culturel positif, Droit à un environnement sain et durable, Droit au développement durable, Droits des Veuves, Droit à l’héritage; Protection spéciale des femmes âgées, Protection spéciale des femmes handicapées, Protection spéciale des femmes en détresse; et droit aux réparations. “L’adoption du Protocole de Maputo a été un moment spécial, historique pour la réalisation des droits des femmes en Afrique. Aujourd’hui, cet instrument constitue un modèle et une source inépuisable d’inspiration pour les femmes en Afrique...”, comme l’a déclaré mon prédécesseur, la commissaire Soyata Maiga (ancienne rapporteur spécial sur les droits des femmes en Afrique). Ses dispositions concernant les droits civils et politiques, la santé reproductive, la non-discrimination et l’émancipation économique, entre autres, symbolisent l’engagement des États africains à mettre fin aux stéréotypes sexistes à l’égard des femmes. Suite à son adoption, les États membres de l’UA dans la Déclaration solennelle sur l’égalité des genres en Afrique adoptée en juillet 2004, s’engagent à signer et ratifier le Protocole de Maputo avant la fin 2004, à soutenir le lancement de la campagne publique visant à assurer son entrée en vigueur en 2005, et à ouvrir la voie à une ère de domestication et de mise en œuvre du Protocole, ainsi que d’autres instruments nationaux, régionaux et internationaux sur l’égalité des genres par tous les États parties. Dans la politique de l’UA en matière de genre, les États membres se sont engagés à parvenir à la ratification et à l’application intégrale du Protocole de Maputo d’ici à 2015 et à sa domestication d’ici 2020.
Au mois de Juin 2017, 39 sur 54 États membres de l’UA ont ratifié le Protocole, l’Ile Maurice étant le dernier Etat à l’avoir ratifié. Certains Etats ont émis des réserves au moment de la ratification.
Comme la Commission fête ses 30 ans cette année, il est important de marquer une pause et de faire le point du fossé éventuel, qui existe entre la ratification et la mise en œuvre des dispositions du Protocole par les États parties.

Plusieurs États parties ont adopté un code du statut personnel et de la famille reflétant l’égalité des genres, des lois sur la santé reproductive, des lois sur la protection des femmes contre le VIH/SIDA, des lois sur la violence domestique et/ou sexuelle, des lois fixant l’âge minimum du mariage à 18 ans, des lois sur les quotas et des lois visant à promouvoir l’éducation des filles et l’alphabétisation des femmes. Plusieurs gouvernements aussi ont maintenant des ministères à part entière pour l’autonomisation des femmes, des enfants et de la famille. La plupart des pays ont adopté et mis en œuvre des politiques nationales de genre, des plans d’action nationaux pour la promotion des droits de la femme et de la famille, des plans d’action nationaux pour l’application de la résolution 1325 et des politiques sectorielles pertinentes dans le domaine de la protection maternelle et infantile. En ce qui concerne les réalisations socioéconomiques, plusieurs pays ont adopté des plans d’action ambitieux pour atténuer la pauvreté des femmes en créant des fonds pour l’autonomisation des femmes et en initiant des réformes agraires visant à promouvoir l’accès des femmes au logement social, aux terres et aux prêts agricoles.

En dépit de ces réalisations louables, les femmes africaines continuent à faire face à de graves violations de leurs droits humains tels qu’ils sont énoncés dans la Charte africaine, le Protocole de Maputo et d’autres instruments régionaux et internationaux.
L’objectif principal de cette édition spéciale est de mettre en évidence certains domaines dans lesquels les femmes sont toujours confrontées à des défis majeurs dans la jouissance de leurs droits. À cette fin, les articles de la présente lettre d’information mettront en évidence le Protocole de Maputo et sa Procédure de rapports d’État; aborderont la violence sexuelle et ses conséquences, la violence fait aux femmes en période de conflit; les droits de santé sexuelle et reproductive des femmes; et l’avortement en Afrique. Le bulletin comprend également une analyse des observations générales n° 2 de la Commission. Cependant, auparavant, Mme Irene Desiree Mbengue donne un aperçu du mandat et des réalisations du Mécanisme du Rapporteur spécial sur les droits de la femme en Afrique.
Consciente du fossé qui existe entre les normes fixées par le Protocole de Maputo et leur mise en œuvre comme l’a souligné dans les divers articles, je continue d’encourager les états qui ne l’ont pas encore fait à ratifier le Protocole de Maputo et ceux qui l’ont déjà fait à prendre les mesures nécessaires pour domestiquer ses dispositions.

Je remercie tous nos Partenaires qui ont au fil des ans soutenu le Mécanisme du Rapporteur spécial sur les Droits de la femme en Afrique dans l’accomplissement de sa mission aussi bien exaltante que louable.
Je vous souhaite une joyeuse célébration et une agréable lecture!