Un mois après le début d’une nouvelle offensive russe dans la région de Kharkiv, les bombardements répétés font payer un lourd tribut à la population.
Le 10 mai dernier, la Russie a lancé une nouvelle offensive dans la région de Kharkiv, à l’Est du pays. Selon Matteo Cavalieri, responsable régional de Handicap International dans l’est de l’Ukraine, la situation humanitaire sur place est désastreuse. Les frappes aériennes touchent des infrastructures militaires, stratégiques et civiles dans tout l’oblast, mais en particulier au nord et au nord-est de Kharkiv :
« Les communautés les plus touchées sont celles qui vivent dans les régions frontalières sous contrôle russe et celles qui sont proches de la ligne de front. Une autre catégorie de personnes touchées est celle des personnes qui n'ont pas été évacuées mais qui se trouvent dans des villages où l'accès à l'aide humanitaire est fortement limité en raison du récent déplacement de la ligne de front. Ces personnes ont de plus en plus de mal à obtenir l'aide humanitaire qui leur était auparavant facilement accessible. »
Matteo Cavalieri, responsable régional de HI dans l’est de l’Ukraine
Selon le dernier rapport des Nations Unies, au moins 18 000 personnes ont fui les combats entre le 10 mai et le 17 juin 2024 pour venir se réfugier dans la deuxième plus grande ville d’Ukraine.
Médicaments et produits d’hygiène
À leur arrivée sur place, les déplacés sont pris en charge dans des centres de coordination où ils reçoivent des premiers soins si nécessaire. Les équipes Santé de Handicap International proposent aux personnes déplacées ainsi qu’aux communautés d’accueil du soutien psychosocial. Les équipes Protection de l'association sont aussi actuellement dans ces centres afin d’évaluer les besoins des personnes les plus vulnérables et les référer vers les structures adéquates.
Roman Shinkarenko est le responsable du projet Protection de Handicap International dans l’est de l’Ukraine :
« Les personnes qui ont fuit les combats et arrivent à Kharkiv sont effrayées. La plupart viennent de territoires sous contrôle russe depuis longtemps, mais les combats et les bombardements se sont intensifiés brusquement le mois dernier, et c’est ce danger croissant qui les a poussés à fuir. Il s'agit principalement d’adultes, beaucoup de personnes âgées et également des personnes handicapées. La plupart d'entre elles sont célibataires. Il y a un grand nombre de patients alités qui ont besoin de soins spécifiques, de couches et de médicaments. Ils ont surtout besoin d'un soutien médical, car certains recevaient des traitements quotidiens et ne peuvent plus en bénéficier. »
Roman Shinkarenko constate également qu’un nombre important de déplacés sont hébergés dans des centres prévus à cet effet, mais que le nombre de places disponibles reste limité. De nombreux déplacés sont obligés de se reloger par leurs propres moyens.
« Nos équipes font de leur mieux pour suivre les bénéficiaires après qu’ils ont quitté ces centres de coordination, car nous ne sommes jamais sûrs de l’endroit où ils iront une fois partis. »
Acheminer l’aide humanitaire le plus vite possible
Parallèlement, Handicap International a acheminé 412 tonnes d'aide humanitaire, dont 18 tonnes de fret médical réfrigéré, par l'intermédiaire de son unité opérationnelle Atlas Logistique. 66 camions remplis de médicaments, de tentes, de bâches et de tout ce qui est nécessaire à la construction d'abris temporaires ont également livré leur cargaison dans les zones difficiles d'accès de l'oblast.
« Les personnes déplacées ont besoin de tout. Elles n'ont rien emporté de chez elles, ni vêtements, ni médicaments. En ce moment, nous transportons principalement des kits d'hygiène et des médicaments pour le compte d'autres organisations humanitaires ukrainiennes et internationales. Pour les transporteurs, la situation actuelle est très stressante et difficile. Les chauffeurs sont souvent sous la pression d'une éventuelle attaque aérienne. Lorsque nous envoyons des camions, nous ne savons jamais à l'avance si nous devrons demander au chauffeur de s'arrêter en chemin et de se mettre à l'abri le plus rapidement possible. Lorsque cela se produit, nous devons être très réactifs, parfois en l'espace de quelques minutes seulement, pour essayer de les protéger autant que possible. Garantir leur sécurité est l'un des plus grands défis auxquels nous sommes confrontés. »
Vitalii Rabcheniuk, chef de projet Atlas Logistique
Nos équipes doivent se mettre à l’abri plusieurs fois par jour
Handicap International met également à la disposition des ONG un espace de stockage dans la ville de Kharkiv :
« Le centre de stockage d'Atlas Logistique est pratiquement le seul centre logistique humanitaire partagé à grande échelle. On a observé une nette intensification de notre travail quotidien depuis le 10 mai dernier. La première moitié de la journée est consacrée aux expéditions et aux arrivées, la seconde moitié à la préparation des expéditions du lendemain. Les demandes de livraison de produits d'hygiène et de nourriture sont nombreuses. Nous devons aussi nous adapter au contexte sécuritaire dégradé. Très souvent et parfois plusieurs fois par jour, nos équipes sont obligées de se mettre à l’abri dans les abris anti-bombardements. »
Volodymyr Golovashchenko, chef de projet Stockage pour Atlas Logistique
Car la ville de Kharkiv elle-même est le théâtre de bombardements quasi quotidiens, comme en témoigne Vitalii Rabcheniuk :
« Il y a de nombreuses coupures d’électricité, les gens doivent utiliser des générateurs. Il n’y a pas non plus d’approvisionnement constant en eau. Les habitants sont constamment stressés, ils craignent pour leur vie, précisément à cause des bombardements. Personne ne se sent en sécurité. »