Mettre en place un corridor humanitaire au Darfour n'est ni réaliste, ni raisonnable, ni suffisant. Le gouvernement soudanais, pour ne pas parler de celui du Tchad, veut garder les mains libres pour agir sur ses frontières. Il ne souhaite pas de déploiement international qui risquerait de le gêner. Dès lors, une telle initiative rencontrera inévitablement une réaction violente sur le terrain : celle des janjawids, voire de l'armée soudanaise, qui y verront un élément d'agression sur son territoire.
Par ailleurs, outre le défi logistique, pour rendre un tel projet possible, il faudrait clairement accepter de s'affronter militairement à l'armée soudanaise et à ses supplétifs et donc prendre le risque d'entrer dans un engrenage qui dépasse de loin l'objet de l'entreprise et présente un danger accru pour les populations concernées. Enfin, les organisations humanitaires risqueraient fort d'être prises pour cible avec un résultat inverse à celui escompté.
Au-delà des problèmes immédiats de mise en place d'une telle démarche, les problèmes de fond qui ont conduit à cette guerre au Darfour ne sont pas pris en compte. C'est pourquoi la France doit avant tout se mobiliser pour que s'organise dès que possible une conférence internationale de paix unique, qui rassemble, sous l'égide des Nations Unies et de l'Union Africaine, tous les acteurs concernés par le conflit avec un objectif précis : un accord de paix sérieux, solide, viable, auquel toutes les parties prenantes adhèrent sans arrière pensée.
La France doit exiger le respect du cessez le feu et la protection réelle des populations déplacées ou non, grâce à la mise en place, sans tarder, de la fameuse force hybride (ONU/UA) prévue par la communauté internationale.
Elle a aussi un rôle à jouer, en direct avec les autorités soudanaises, mais surtout au sein de la communauté internationale. Elle ne doit plus empêcher le Conseil des Ministres de l'UE de prendre des sanctions lors de sa prochaine rencontre du 18 juin. Elle doit développer une action diplomatique intense dans le monde arabe et auprès de la Chine.
Enfin, une politique de sanctions graduées doit se développer sans atermoiements et sans attendre pour que tous les intéressés aient conscience de l'importance de trouver enfin une voie raisonnable hors de la violence, pour la résolution durable de ce conflit.