Informing humanitarians worldwide 24/7 — a service provided by UN OCHA

oPt + 2 more

Conférence de presse conjointe du Ministre des Affaires Etrangères et Europénnes et du Secrétaire d'Etat aux Affaires Européennes

(Luxembourg, 18 juin 2007)

Le Ministre - Je ferai un résumé général de deux jours qui ont été assez denses avec, en particulier, la discussion, hier soir, sur le traité simplifié. Sur ce sujet, nous étions tous pleinement en accord sur la nécessité de dépasser cette difficulté européenne. Le "socle commun" sur lequel se sont rejoints la France, qui par referendum avait rejeté le projet de traité constitutionnel, et l'Espagne, qui l'avait au contraire approuvé, témoigne de cette volonté d'avancer.

Je vous dirai que c'était une discussion un peu rude au cours de laquelle chacun a pu exprimer son opinion et les difficultés rencontrées dans son pays. J'en suis sorti avec un sentiment positif, avec d'abord beaucoup d'admiration envers la Présidence allemande - que je remercie à nouveau pour son travail. Elle a multiplié les contacts, fait des allers-retours permanents, essayé de ramasser, sans les dénaturer, les idées des uns et des autres. Franchement, si, ce que je crois et que j'espère, nous sortons de cette difficulté, ce sera par le haut et grâce à la Présidence allemande.

Il y a eu de nombreux autres sujets et je répondrai très volontiers aux questions sur les thèmes qui vous intéresse, comme le Darfour ou le Kosovo.

Vous verrez le texte final à l'issue de ce Conseil. Il prouve qu'il faut discuter, même avec difficulté, même en s'affrontant. Il s'agissait notamment de savoir si, après ce qui s'est passé, au Moyen-Orient et à Gaza, et de la façon dont nous devions ou non aider le gouvernement créé dans l'urgence par M. Abou Mazen. Ce qu'il en est ressorti est qu'il fallait faire un geste politique - et je crois que ce geste sera fait, dans les termes que choisira la Présidence allemande - et qu'il fallait également aider directement les populations palestiniennes.

Je connais bien l'Europe, mais pas son fonctionnement à 27. Un Conseil à 27, c'est différent. C'est plus difficile, certes - et n'y voyez-là aucune condamnation -, mais aussi beaucoup plus riche. Le secrétaire d'Etat va sûrement ajouter quelque chose car il a été l'ordonnateur autour de l'OMC. Nous répondrons ensuite tous les deux à vos questions.

Le Secrétaire d'Etat - Merci Bernard. Je n'ai rien à ajouter, partageant tout ce qui a été dit, notamment sur la réunion d'hier soir, sur les efforts qui ont été faits par la Présidence allemande et sur la convergence des positions autour de la proposition du président de la République de traité simplifié. Tout le monde a envie d'avancer rapidement pour sortir de cette situation.

En ce qui concerne l'OMC, nous avons rappelé avec Bernard Kouchner, que nous ne voulions pas voir des négociations aboutir sur des résultats déséquilibrés avec nos partenaires pour ce qui est de l'agriculture et des autres parties. Nous l'avons redit clairement ce matin. Nous avons indiqué que nous souhaitions que le Conseil soit véritablement informé en temps voulu, avant tout accord qui interviendrait au sein du G4. Nous ne pensons pas qu'il faille faire peser tous les risques et toutes les responsabilités sur l'Union européenne, qui a déjà fait le maximum de concessions. Nous n'avons ni sentiment de honte, ni sentiment de culpabilité à cet égard. Nous avons fait tout ce qui était possible pour avancer dans la voie d'un accord et maintenant, c'est à nos partenaires américains, indiens et brésiliens de bouger sur ces questions, à la fois dans le domaine agricole et dans les domaines de l'industrie et des services où nous ne voyons pas venir beaucoup de choses.

Q - (A propos de l'aide pour la Palestine)

R - Le ministre - Vous entendrez exactement les mots de la Présidence allemande mais ce sera une aide directe et à faire parvenir le plus rapidement possible. Comme le rapport est à la rédaction, vous comprendrez que je ne veuille pas trahir sa pensée dans les moindres détails, mais le sens général est qu'il faut un geste politique et une aide immédiate.

Q - (A propos du geste politique concernant la population palestinienne)

R - Le ministre - Le geste politique consiste à savoir si, oui ou non, nous devons immédiatement et dans les trente jours qui sont impartis, parce qu'il y a une loi fondamentale qui le prescrit, parler directement avec le gouvernement de M. Fayyad. Encore une fois, vous en verrez les détails exposés dans quelques minutes.

Quant à protéger les personnes, nous avons beaucoup insisté sur ce point les uns et les autres. Je pense que les questions posées au ministre des Affaires étrangères israélien seront les mêmes. Comment peut-on protéger au mieux les Palestiniens qui veulent quitter la zone de Gaza pour aller en Cisjordanie ? Il semble que plusieurs centaines de personnes aient déjà été aidées, d'après ce que l'on nous rapporte, et il s'agirait de faire davantage. C'est évidemment d'abord aux Israéliens de le faire et peut être aux Egyptiens d'une certaine façon. Mme Livni nous a précisé que du côté égyptien les portes étaient fermées et, qu'en revanche, il y avait plusieurs centaines et probablement plusieurs milliers de Palestiniens qui souhaitaient sortir vers la Cisjordanie.

Q - (Sur les propos tenus par Mme Livni)

R - Le ministre - Elle me l'a dit en lors d'un entretien bilatéral et l'a affirmé devant nous tout à l'heure. Mais je ne veux pas dénaturer ce qui sera dit au nom de l'exacte déclaration de la Présidence allemande.

Q - (A propos de la France et de la Palestine)

R - Le ministre - La France, le président Sarkozy l'a dit, parlera avec tous les protagonistes, mais pour le moment la France l'a fait puisque le président Sarkozy a appelé M. Abou Mazen et lui a proposé une aide financière significative immédiatement. Ils ont besoin d'un accès à cet argent, cette aide d'urgence, ça c'est dans l'immédiat.

Puis il y a la reprise ou l'imagination suffisante pour qu'un processus politique à nouveau voie le jour. Vous savez que le gouvernement d'unité nationale n'a pas été beaucoup aidé - d'ailleurs lui-même ne s'est pas beaucoup aidé, hélas - et si maintenant une nouvelle situation se présente et c'est apparemment le cas, laissons-la se développer dans le sens de la paix. C'est une initiative que nous pouvons prendre. Nous, la France, l'Union européenne, ne pouvons qu'aider, on verrait ainsi que l'Union européenne a une véritable politique ou aurait une véritable politique et que ces 27 pays ensembles tendent la main. C'est, je crois, ce qui va être fait et ce sera une étape importante.

Pour l'évolution du gouvernement palestinien actuel, j'espère que l'aide lui parviendra afin qu'il puisse faire face aux difficultés de la population aussi bien en Cisjordanie qu'à Gaza où cela est beaucoup plus difficile encore maintenant. On a vu qu'un certain nombre de denrées pouvaient parvenir à Gaza, en particulier du pétrole, des aliments. Le ministre des Affaires étrangères israélien nous l'a affirmé à nouveau. Est-ce que c'est suffisant ? Sûrement pas. N'oublions pas que l'Union européenne a toujours aidé, on ne le sait pas assez mais l'aide a été poursuivie en permanence. Est-ce que les canaux étaient assez directs ? Ce n'est pas sûr. Est-ce que, maintenant, ils seront plus directs ? Apparemment ce sera le cas. Je parle de l'aide financière mais ça ne suffit pas, bien entendu. Au-delà de l'aide financière, il faut commencer à donner de l'espoir. L'espoir est une solution politique, et la solution politique - nous en sommes évidemment toujours au même point -, c'est deux Etats pour deux peuples.

Q - (A propos des travaux lors du dîner)

R - Le ministre - Non, le programme du dîner, c'était de répondre à cinq questions particulières. Nous y avons répondu très clairement, dans le sens exact qui nous était présenté par la Présidence allemande, après son excellent travail. Mais il y avait aussi, comme je vous l'ai dit, le document que l'Espagne et la France ont proposé pour y répondre.

Nous avons préparé le terrain sur les documents qui nous étaient proposés, mais maintenant c'est aux chefs d'Etat et de gouvernement de répondre, lors du Conseil européen qui se tiendra jeudi et vendredi. Encore une fois je peux me tromper, mais j'ai le sentiment qu'une étape décisive de l'Europe est en train d'être franchie. J'ai bon espoir sur le Conseil européen qui s'annonce.

Q - (A propos de la Pologne et le traité simplifié)

R - Le ministre - Plusieurs pays, dont la Pologne, ont demandé des explications sur la proposition du président de la République. C'est normal. Tout cela ne m'inquiète pas.

Q - (A propos de l'OMC)

R - Le secrétaire d'Etat - Nous avons dit que nous refusions tout accord qui serait déséquilibré, pour l'agriculture, ainsi qu'entre l'agriculture et les autres volets. Le Commissaire sait parfaitement quelle est notre position. Nous l'avons rappelé, nous prendrons nos responsabilités. Nous souhaitons qu'il y ait une information le plus en amont possible, que ce soit transparent et que cette transparence ne soit pas uniquement a posteriori. Nous l'avons dit très clairement ce matin.

Q - (A propos du Darfour)

R - Le ministre - Permettez-moi, puisque vous ne me posez pas la question, de dire un mot sur le Darfour. Là aussi, il faut distinguer deux voies.

La voie politique, qui consiste à chercher à imposer un processus politique, sans lequel il n'y aura jamais d'apaisement dans ce conflit et sans lequel les souffrances demeureront très vives. Il y a maintenant 19 groupes rebelles au Darfour, ça devient de plus en plus difficile, il faut que chacun fasse des efforts pour qu'ils rejoignent la table des négociations. Des médiations sont en cours en Libye, en Erythrée, etc.

Et puis il y a aussi un appui au processus politique qui est initié par l'Union africaine et par l'ONU. C'est très important et vous avez vu que le gouvernement de M. Bechir a accepté ce que l'on appelle la force hybride, c'est-à-dire la phase trois de l'opération des Nations unies qui consiste à envoyer environ 20.000 hommes avec un commandement mixte, donc plus efficace, sur le terrain.

Nous avons demandé et proposé, et cela a été accepté par tout le monde, une réunion du Groupe de contact élargi, le 25 juin, à Paris. Car voter des résolutions ne suffit pas. On a vu que le programme précédent n'a pas été complètement appliqué. En tout cas il n'a pas été suffisamment financé et s'il l'a été, il faut savoir pourquoi les 7.000 soldats qui étaient déjà en poste n'ont pas été payés depuis le mois de janvier. Si les forces de paix qui existent ne sont pas payées, ce n'est pas la peine d'en créer une nouvelle.

Le 25 juin, le Groupe de contact élargi avec, j'espère, les Chinois et le Secrétaire général de l'ONU, va remettre dans l'actualité la crise du Darfour. L'aide pratique sera évoquée, le financement nécessaire à l'opération hybride ; il y a déjà une proposition pour prendre en charge les personnes déplacées au Tchad parce que ces 100.000 à 200.000 personnes sont dans un état effroyable. C'est une conséquence directe du conflit du Darfour, les villages sont détruits, l'insécurité règne, il faut faire quelque chose. Un groupe de travail avec l'Union européenne et les Nations unies est maintenant à l'œuvre et cette proposition française a reçu un accueil unanime, voilà où nous en sommes.

A part cela, il y a aussi un pont aérien français qui commence, les Allemands et les Espagnols ont proposé de nous aider et il faut se dépêcher car la saison des pluies rendra les routes impraticables dans deux ou trois semaines.

Q - (A propos de la perte des symboles)

R - Le ministre - Il ne faut pas avoir trop recours aux symboles mais il ne faut pas non plus les abandonner.

Q - (A propos du Kosovo)

R - Le Kosovo est l'une des affaires les plus difficiles à régler qui soit. Faut-il un délai de réflexion ou non ? La proposition du président Sarkozy, là encore, a été acceptée. Nous verrons bien si elle se traduit différemment à l'ONU. C'est en effet à l'ONU d'élaborer une résolution. Nous avons proposé six mois de réflexion supplémentaires. Les Américains avaient proposé quatre mois. Ce n'est pas là l'essentiel. Ce qui compte, c'est faire comprendre à nos amis serbes que la position de soutien des Russes n'est pas la seule. C'est même peut-être un peu dommageable qu'elle soit la seule.

Même si nous nous plaçons clairement dans la perspective du Rapport Martti Ahtisaari, nous essayons, nous continuons à essayer de convaincre Belgrade. C'est une position très nette et déterminée. Il faut d'abord que l'opinion européenne soit unie. Elle l'est, il faut qu'elle le reste sur ce sujet et que l'on essaye d'assouplir pour convaincre.