Contexte
Les hostilités qui sévissent dans la région du Lac Tchad ont affecté quelque 26 millions de personnes, dont 2,6 millions ont été chassées de chez elles. Dans le sillage du conflit, la crise humanitaire s’est trouvée aggravée par la pénurie alimentaire et la malnutrition, qui ont atteint des niveaux critiques. En 2017, 14 millions de Nigérians, répartis dans les six États les plus touchés du pays (1) , ont besoin d’une assistance. (2) Le conflit et ses retombées dans les pays limitrophes, Cameroun, Tchad et Niger, ont débouché sur une crise caractérisée par des déplacements de population sur tout le pourtour du Lac Tchad, avec 1,8 millions de PDI au Nigéria, originaires à 87 % de l’État de Borno, et près de 200 000 réfugiés au Cameroun, au Tchad et au Niger, venus s’ajouter au nombre déjà non négligeable des déplacés internes présents dans ces trois pays d’accueil principaux (Cameroun : 183 000 ; Tchad : 89 000 ; Niger : 121 000).
Dans les zones de déplacement et de potentiel retour, la protection des populations concernées pose de nombreux problèmes qui contribuent directement à une situation de violence permanente, faisant obstacle à des solutions durables. Parmi ces problèmes figurent les restrictions à la liberté de circuler et la question de l’accès aux points d’intervention humanitaires dans un contexte d’insécurité, les violations du droit humanitaire international, les violences sexuelles et sexistes, les enrôlements forcés (y compris d’enfants), les disparitions de personnes, la séparation des familles, les violations des droits de propriété du logement, de la terre et des biens (notamment en l’absence d’état civil). Répondre aux besoins complexes en termes de protection qui sont ceux des réfugiés, des déplacés internes et des rapatriés, et rétablir les droits humains qui leur reviennent : de ces objectifs déterminants dépendent la stabilité des zones affectées et les solutions à apporter aux personnes en détresse au Nigéria et dans la région du Lac Tchad.
L’ampleur de la crise humanitaire survenue au cœur d’un conflit caractérisé par des violations systématiques des droits de l’homme et du droit humanitaire international exige une réaction, qui, pour être efficace, devra s’appuyer sur une stratégie, des priorités et des cibles préétablies. Dans l’immédiat, l’accent doit être mis sur un certain nombre d’axes urgents en matière de protection :
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Améliorer la sécurité physique, la liberté de circulation et l’accès aux points d’intervention humanitaire ;
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Renforcer la protection des civils, en veillant spécialement à la prévention de la violence sexuelle et sexiste (VSS), et à la sécurité des enfants vis-à-vis des violences, de l’exploitation et des abus sexuels ;
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Fournir une assistance d’urgence en matière éducative, en donnant la priorité aux enfants déscolarisés ;
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Fournir un soutien psycho-social ciblé aux personnes présentant des besoins spécifiques à cet égard ;
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Mettre à disposition des moyens de subsistance et d’autonomisation ;
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Résoudre les litiges en matière de propriété des logements, des terres et des biens.
La situation telle qu’elle se présente au Nigéria exige des acteurs humanitaires et de l’aide au développement une réponse globale, qui ne se limite pas à la seule protection, mais réponde aux problèmes d’exclusion, de marginalisation et de pauvreté extrême, qui, entre autres facteurs, alimentent le conflit et la violence, créant des risques en termes de sécurité des opérations et entravant la réalisation de solutions durables. Dans ce contexte, l’égalité entre les sexes, l’intégration des exclus, l’autonomisation des individus, la réconciliation des communautés et la cohésion sociale sont des volets essentiel d’une action visant à restaurer les droits, réduire le nombre des violations commises et soutenir des solutions, en particulier en ce qui concerne la durabilité des retours volontaires et la mise en œuvre d’alternatives viables.
(1) Adamawa, Bauchi, Borno, Gombe, Taraba et Yobe
(2) 17 millions d’habitants de la région du Lac Tchad sont concernés par le conflit, et 8,5 millions de Nigérians des États Borno, Adamawa et Yobe States auront besoin d’une assistance en 2017, selon le Plan d’action humanitaire pour la région du Lac Tchad.