NIAMEY, 11 décembre 2007 (IRIN)
- D'après les organisations de défense de droits humains et les travailleurs humanitaires présents à Niamey, la capitale nigérienne, les informations qui leur parviennent du nord du pays laissent penser que cette région pourrait faire face à une urgence humanitaire.
Le nord du pays est au cour du conflit qui a commencé en février 2007 après l'annonce par le Mouvement nigérien pour la justice (MNJ) du déclenchement d'une rébellion armée contre le gouvernement pour obtenir une plus grande autonomie économique et politique des habitants de la région, riche en uranium et en pétrole, vis-à-vis du gouvernement central de Niamey, la capitale, située à quelque 1 200 kilomètres plus au sud.
Au mois d'août et septembre, les graves inondations, qui ont fait des ravages en Afrique de l'Ouest, n'ont pas épargné le nord du Niger.
« Il n'y pas beaucoup d'informations fiables qui nous parviennent [du nord], mais pour ce que nous savons avec certitude, c'est que la situation y est très préoccupante », a indiqué Ilguilas Weïla, président de Timidria, une importante organisation nigérienne de défense des droits humains.
Selon les estimations de plusieurs sources humanitaires basées à Niamey, le nombre de personnes déplacées est d'environ 20 000, dont près de 9 000 ont perdu leurs habitations pendant les inondations du début de l'année, et 11 000 autres sont victimes du conflit actuel entre le mouvement rebelle hostile au gouvernement et l'armée nigérienne.
Entre 2 500 et 4 000 personnes déplacées seraient originaires de la ville d'Iférouane. Apparemment, toute la population de cette localité aurait fui au début des affrontements entre l'armée et le MNJ pour le contrôle de cette ville stratégique.
« Les gens ont peur d'être pris au piège dans les combats », a expliqué M. Weïla. « De même, l'armée les rançonnait et il n'était pas viable pour elles de rester dans leur localité sans pouvoir accéder à leurs champs ou à leurs bêtes ».
Selon Nord Niger Santé, une organisation non-gouvernementale (ONG) créée pour venir en aide aux populations du nord, près de 500 000 personnes dans la région pourraient être « menacées par la guerre et par la famine », bien que certaines associations trouvent ces estimations exagérées puisque la région ne compterait pas plus de 320 000 habitants.
D'après des ONG locales, qui disposent de contacts dans le nord, des centaines de personnes déplacées seraient arrivées dans la ville minière d'Arlit, o=F9 elles auraient été hébergées par de la famille ou par la population locale ; de même, elles auraient reçu une assistance de la part de compagnies minières étrangères opérant dans la localité.
« Elles ont perdu tout le bétail ; A Arlit, le prix des denrées alimentaires a grimpé et les personnes qui les hébergent n'ont pas grand-chose à leur offrir », a expliqué M. Weïla. « Si elles ont de la famille là-bas, elles sont hébergées chez ces parents, sinon il n'y a pas de centre d'accueil pour les réfugiés, aucune aide ».
« L'hôpital d'Arlit est pratiquement plein de soldats blessés bien qu'il n'ait pas été réquisitionné », a-t-il ajouté. En outre, plusieurs centaines de personnes se cachent dans le massif de l'Aïr, ont indiqué des représentants d'ONG locales.
Selon plusieurs sources nigériennes et internationales, l'armée oblige les personnes déplacées à poursuivre leur exode et à ne pas se concentrer dans des camps ou sur des sites improvisés.
Des travailleurs humanitaires ont affirmé que des personnes déplacées arrivaient aussi chaque jour à Agadez, la capitale régionale du nord, épargnée actuellement par le conflit ; ces personnes ne reçoivent pour l'instant aucune aide, bien que le Fonds des Nations Unies pour l'enfance (UNICEF), l'ONG Action contre la faim et la Croix-Rouge disposent de bureaux dans la ville.
« Le gouverneur d'Agadez a clairement fait savoir que les agences humanitaires n'étaient pas autorisées à porter assistance aux déplacés », a indiqué un représentant d'organisation humanitaire. Malam Boukar Abba, le gouverneur d'Agadez, était injoignable et n'a donc pu faire aucun commentaire sur la situation.
Quant à Moussa Changari, secrétaire général de l'ONG 'Alternative Espace Citoyen', il a prévenu que toute la population de la région était l'« otage » du conflit.
« Il est vrai que la région n'est pas densément peuplée, mais les routes d'accès ayant été coupées, il n'est plus possible d'y acheminer les produits venant du sud ; de même, les habitants de la région ne peuvent plus vendre leurs produits sur le marché national ».
« C'est très sérieux », a fait remarquer M. Changari, expliquant qu'une bonne partie de la production de fruits et légumes de la région était généralement acheminée vers le nord, en direction de la Libye et de l'Algérie, mais que les routes étaient probablement impraticables actuellement en raison des combats et de l'impunité grandissante dont jouissent les criminels qui opèrent dans la région.
« Les distances sont énormes, les routes sont en mauvais état et il y a actuellement des mines et une importante présence militaire », a-t-il ajouté.
Le nord du Niger est une vaste région isolée qui se caractérise géographiquement par de vastes étendues désertiques et par le massif montagneux de l'Aïr.
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