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Niger

Communiqué de presse du Coordonateur humanitaire Niamey, Niger

Chers Partenaires,

Les Nations Unies ont convoqué cette conférence de presse afin d'apporter des précisions sur la crise alimentaire au Niger suite au reportage choquant diffusé par la chaîne britannique, BBC, le jeudi 15 septembre 2005. Ce reportage a été diffusé d'un studio en face du Palais de Nations Unies, le jour même où le Sommet Mondial du Millénaire débattait l'agenda du développement. Le reportage de la BBC a suggéré qu'au moment où des enfants au Niger meurent, les Nations Unies ont décidé de diminuer leur assistance. Je peux vous assurer que, au contraire, les Nations Unies poursuivent leur aide humanitaire -- en effet un deuxième tour de distribution gratuite d'aide alimentaire, destiné à 1.7 million de personnes, a déjà démarré. Nous continuerons d'aider le Niger aussi longtemps que nous aurons les ressources pour le faire -- les distributions d'aides aux plus vulnérables continueront après la récolte. Les reportages des media qui suggèrent le contraire, pourraient entraver la mobilisation des aides. Par conséquent les premières à être pénalisés seraient ces mêmes populations vulnérables que nous essayons d'assister. La communauté humanitaire au Niger, sous la direction du Gouvernement et s'appuyant sur ses structures sous régionales, a pu sauver de la malnutrition 95% des enfants admis dans les centres de récupération nutritionnelle. Beaucoup plus d'enfants pourraient être sauvés si la communauté humanitaire au Niger reçoit les financements nécessaires. En effet, l'aide alimentaire a été mis en place au Niger avant même que les contributions financières extérieures ne soient reçues. Près de 90.000 enfants ont déjà été pris en charge dans 398 centres qui sont installés à travers le pays. Neuf agences de l'ONU, 20 organisations non-gouvernementales et les services de l'Etat Nigérien répondent à la crise dans les zones les plus vulnérables. Mais nous avons besoin d'aide financière. A ce jour, la communauté humanitaire a reçu 50% dont elle a besoin. Ces aides peuvent encore être octroyés à travers les canaux de son choix. Concernant les reportages des media, je souhaite également que les media jouent leur rôle d'aider le monde à une meilleure compréhension de la complexité de la crise, ses origines structurelles et conjoncturelles.

Q : Comment réconcilier l'intervention récente du Premier Ministre qui dit que la crise est terminée au Niger et le message que vous venez de nous livrer en disant que les Nations Unies vont continuer leur aide au Niger ? Comment doit-on analyser ces messages ?

En effet nous avons eu des échanges avec la BBC [British Broadcasting Corporation] au niveau de plusieurs responsables onusiens et nous avons fourni toutes les informations disponibles. Nous regrettons que parmi les différentes sources d'information, la BBC a choisi une seule source d'information, qui n'est qu'un petit morceau de la problématique de la crise nutritionnelle et alimentaire au Niger. L'information que la BBC a rapportée au monde entier [que les Nations Unies allaient diminuer leur assistance] est fortement biaisée. Les Nations Unies sont présentes au Niger depuis 40 ans. Nous avons augmenté notre programme d'assistance de façon impressionnante. A ce jour, et malgré les difficultés logistiques que nous rencontrons, nous sommes en mesure de distribuer 2.500 tonnes de vivres par jour dans toutes les localités du pays. Nous pouvons affirmer qu'une opération conjointe du PAM, UNICEF et du Gouvernement se déroule présentement dans une des zones indexées par Médecins Sans Frontières. Nous sommes en mesure de dire que une enquête sur les causes de la malnutrition a été faite par CARE International et a démontré qu'il n'ya pas de lien direct entre la disponibilité des vivres et l'accès aux vivres et l'état nutritionnel des enfants. Une enquête a également été lancée aujourd'hui par le Centre des Contrôles des Maladies (CCD Atlanta) et couvrira toute l'étendue du territoire nationale afin d'examiner les causes profondes de la malnutrition. Si, grâce à la pluviométrie favorable que nous avons eue en 2005 nous pouvons espérer avoir une bonne récolte et donc moins d'aide alimentaire en 2006, la crise nutritionnelle persiste. C'est une crise chronique. Le fait que MSF intervienne dans le pays depuis 2001 et que cette opération soit une de leurs plus grandes dans le monde démontre que la chronicité de la malnutrition n'est pas liée à la pluviométrie ou au volume de la récolte, mais plutôt à d'autres causes. Pour être plus spécifique, ces causes sont le sevrage précoce des enfants, le paludisme, les diarrhées, les infections pulmonaires, voici ce qui tue nos enfants.

Q : Quelle est la situation des financements car les chiffres avancés par l'ONU diffèrent de celles des autorités nigériennes ?

L'ONU a reçu 50% des 80 millions de dollars qui est la somme totale de l'appel humanitaire lancé le 3 août 2005. Les chiffres diffèrent car l'appel humanitaire a été formulé par les agences des Nations Unies et la communauté des organisations non-gouvernementales. Le gouvernement a aussi lancé de sa part un appel angoissé -- répété en novembre 2004 et encore en juin 2005 dans le discours de politique générale du Premier Ministre- pour une aide humanitaire. La plupart des bailleurs de fonds ont choisi la voie onusienne et des ONG et pas celle du gouvernement. Je peux cependant dire que la France a fourni son assistance humanitaire par le canal du gouvernement.

Q : Comment les Nations Unies comptent-elles résoudre la problématique de la loi du marché, des paysans endettés et la continuation de la distribution alimentaire et des produits vont bientôt arriver sur les marchés ?

Il y a des mécanismes de suivi des prix des marchés, ainsi il y a des régions comme Gaya où les prix sont revenus plus ou moins à la normale, et des zones dans lesquelles le prix reste très élevé, dont les villes de Maradi et Diffa. Diffa est une zone critique où l'aide alimentaire a été très vaste. Donc nous allons évaluer l'impact de l'aide alimentaire sur les prix des céréales afin de ne pas influer sur les prix des marchés. Nous avons aussi effectué une évaluation qui nous permet de dire que ceux qui sont, à ce stade, considérées comme les groupes les plus vulnérables sont : ceux qui n'ont pas eu une bonne récolte a cause de la pluviometrie ou autres causes naturelles, les éleveurs qui ont perdu leurs bétails, et ceux qui ont eu une bonne récolte mais qui doivent tout donner pour payer les dettes accumulées pendant la crise.

Q : Quelles sont les dispositions prises par les Nations Unies pour préparer l'après-crise ?

Au début de la crise, nous avions 20.000 tonnes de céréales physiquement disponibles dans les stock national de sécurité et la capacité d'acheter environ 50.000 tonnes supplémentaires. Il s'est avéré qu'au moment où le stock physique s'est épuisé, et qu'on a essayé d'acheter auprès des pays voisins, il n'y avait pas des céréales à acheter. La spéculation qui s'opérait nous a pris de cours. Nous n'avons pas pu obtenir des quantités suffisantes avec l'argent dont on disposait et les prix ont continué à grimper de façon vertigineuse. Donc ma recommandation, telle que déjà établie dans le cadre du dispositif de prévention et gestion des crises, est qu'un stock physique de 110.000 tonnes soit établi au Niger pour faire face à d'éventuelles crises alimentaires. Nous ne pouvons pas compter sur la solidarité de nos pays voisins car eux-mêmes peuvent rencontrer ces problèmes et ne pas être à mesure de vendre. Concernant la crise nutritionnelle chronique qui touche en particulier les enfants de moins de cinq ans. Nous savons que les enfants sont nourris au lait maternel jusqu'à l'âge de six mois, au maximum neuf mois. Les femmes se marient très jeunes, particulièrement dans les zones les plus peuplées du pays, et ont des grossesses fréquentes et rapprochées. La coutume veut que dès que la femme est enceinte elle n'allaite plus l'enfant donc l'enfant passe directement du lait maternel à la « boule ». La boule (mélange de farine de mil et d'eau) ne fournit pas suffisamment de capacité nutritionnelle pour pouvoir protéger les nourrissons contre les bactéries qui sont fort présents dans l'alimentation, dans l'eau et autres aliments, ni du paludisme ou des maladies pulmonaires. Il faut que nous soyons innovatifs, lancer une campagne d'information et de communication et être présent au niveau des villages pour qu'un système soit mis en place pour assurer un sevrage correcte des enfants, c'est à ce niveau qui se joue toute l'enjeu de la malnutrition. Si nous pouvons assurer un sevrage correct, la malnutrition chronique disparaîtra au Niger.

Q : Comment expliquez vous la lutte contre la pauvreté n'a pas dominé les discussions lors du Sommet du Millénaire ?

Il y a un communiqué qui a été publié aujourd'hui par les Nations Unies et qui est disponible. Il faut s'attendre à un communiqué un peu plus explicite dans la journée de demain qui paraitra dans les media nationaux. De mon point de vue, les thèmes de l'agenda du Sommet des Chefs d'Etats et de Gouvernement à New York étaient très vastes, beaucoup de discussions sur la définition du terrorisme, l'élargissement du conseil de sécurité, la révision de la Commission des droits de l'Homme. Je crois que l'agenda politique a pris de l'avant sur l'agenda du développement. Mais il est très clair dans les mots du Secrétaire Général, dans son discours final, que la racine de tous les maux est la pauvreté, l'écart qui existe entre pays pauvres et pays riches, et si nous n'arrivons pas à réduire cet écart, tout le monde en paiera les frais

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