Mali - Mise à jour des messages clés : Poursuite de l’insécurité alimentaire de Crise (Phase 3 de l’IPC) à Urgence (Phase 4 de l’IPC) au pic de la soudure à cause des impacts de l’insécurité, août 2024
En août, la multiplication des attaques dans les régions de Kidal, Gao, Ségou, Mopti, et le nord de Kayes, entre les forces armées Maliennes (FAMa) et les groupes armés continue de perturber significativement la quiétude, l’approvisionnement des marchés et occasionner la poursuite inhabituelle des déplacements des populations. Avec la prétention du JNIM d’étendre son influence sur des zones historiquement pacifiques, qui abritent des routes de contrebande transfrontalières lucratives, notamment dans les régions de Sikasso et de Koulikoro, des incidents continueront à être enregistrés. Des déplacements énormes de populations à la recherche de points sécurisés, des repressions sur les populations civiles et aussi des dégradations de biens sont observés dans la zone du Liptako Gourma et qui s’étendent au nord des régions de Kayes (Yélimané, Kayes), Nara (Nara), Ségou (Niono, Macina) et San (San, Tominian). Les perturbations énormes des activités économiques, notamment l’accès aux champs en cette période d’installation des cultures et de sarclage, les difficultés d’approvisionnement des marchés et les difficultés d’accès aux services sociaux, exposent davantage les ménages à l’insécurité alimentaire de Crise (Phase 3 de l’IPC) à pire dans ces zones.
L’évolution de la campagne agricole est globalement moyenne dans le pays et se poursuit à travers les entretiens des cultures et les semis pour le riz de submersion au niveau de la vallée du fleuve Niger et du Sénégal. A la date du 10 août 2024, les réalisations pour toutes les cultures confondues estimées à 5 946 161 ha sont légèrement supérieures à celles de la campagne dernière à la même période qui étaient de 5 633 310 ha. Toutefois, l’insuffisance des pluies et leur mauvaise répartition dans le temps et dans l’espace du début de la campagne jusqu’à la fin de juin dans la majeure partie des zones agricoles malgré une installation précoce des pluies ont affecté le niveau des semis. Les difficultés d’accès physique aux champs en raison des attaques des groupes armés, d’accès aux intrants agricoles à cause de la faible disponibilité et des prix élevés, les pertes de superficies cultivées liées aux fortes pluies qui ont submergé des superficies emblavées et rendu difficile les travaux d’entretien, l’excès d’eau au niveau des champs ou précédant des semis surtout au niveau du riz de submersion, réduiront le niveau des productions agricoles dans les zones concernées ainsi que les opportunités de main d’œuvre agricole. Les opérations de semis, d’entretien des cultures en cours offrent des opportunités moyennes de nourritures et de revenus aux ménages pauvres dans les zones agricoles.
De nombreux cas d’inondation à la suite de fortes pluies ont été enregistrés dans presque toutes les régions particulièrement celles de Bougouni, Ségou, Koutiala, Koulikoro, Bandiagara, Gao, Tombouctou et dans le district de Bamako. Selon le Conseil des Ministres extraordinaire en date du 23 août 2024, 7 077 ménages, soit 47 374 personnes sont sinistrés à travers le pays. En plus des dégâts importants sur les habitats et infrastructures publiques, des submersions des superficies de cultures au niveau des bas-fonds et des destructions des stocks alimentaires, des biens/équipements et des pertes de bétail ont été enregistrées. Les ménages sinistrés ont à ce jour bénéficié des premiers secours en vivres et en non-vivres de la part du Gouvernement et de certains partenaires humanitaires à travers le pays. Cependant, les prévisions de fortes pluies au cours d’août et septembre maintiennent un risque élevé d’inondation à travers tout le pays. Le risque d’inondation dans la vallée des fleuves Niger et Sénégal voire d’autres cours d’eau à travers le pays demeure modéré à élevé au regard du rythme rapide de la montée des eaux.
L’accès des ménages aux aliments en cette période de soudure est réduit dans les zones d’insécurité à cause de la poursuite de la hausse des prix des denrées de base à des niveaux élevés dans ce contexte de baisse du niveau des revenus des ménages, particulièrement dans les régions de Gao, Tombouctou, Kidal, Ménaka et le nord de celles de Koulikoro et de Ségou où des difficultés d’approvisionnement des marchés sont observées. En juillet, le prix de la céréale de base (mil, sorgho, maïs) reste nettement supérieur à la moyenne quinquennale de 107 pour cent à Ménaka, 68 pour cent à Gao, 55 pour cent à Ségou, 53 pour cent à Mopti, 47 pour cent à Sikasso, 44 pour cent à Tombouctou, 38 pour cent à Koulikoro et 21 pour cent à Kayes. Le niveau élevé des prix des céréales est lié surtout à la baisse des flux dans les zones à accès difficile, à l’épuisement/l’amenuisement des stocks au niveau des ménages, à la rétention des stocks en lien avec la physionomie de l’évolution de la campagne agricole, au retard dans la mise en place des assistances alimentaires en cette période de soudure, à la hausse des coûts d’approche en lien avec la conjoncture locale difficile et à l’état défectueux des routes en cette période d’hivernage qui réduisent les disponibilités sur les marchés.
L’insécurité alimentaire d’Urgence (Phase 4 de l’IPC) en cours à Ménaka se poursuivra jusqu’en septembre 2024 à cause des difficultés énormes d’accès aux aliments et au recours atypique des ménages à la mendicité, à la décapitalisation du bétail, à la vente de biens productifs et à la dépendance à l’aide humanitaire. Les difficultés d’approvisionnement liées aux derniers incidents dans les régions de Kidal et de Ménaka avec une hausse significative des prix des denrées alimentaires ont exacerbé les difficultés d’accès des ménages aux denrées alimentaires dans une zone où l’accès humanitaire reste un grand défi notamment dans la bande frontalière avec le Niger. Dans les zones à accès limité une proportion faible de ménages se trouve en situation de Catastrophe (Phase 5 de l’IPC). Cependant, à partir d’octobre, la disponibilité des productions agricoles et des produits de cueillette bien que faible, celle des productions animales et la baisse saisonnière des prix des denrées alimentaires contribueront à améliorer l’accès des ménages aux aliments et donc de la consommation alimentaire réduisant ainsi l’utilisation des stratégies d’adaptation négatives par les ménages. Ainsi, l’insécurité alimentaire d’Urgence (Phase 4 de l’IPC) s’améliorera en situation de Crise (Phase 3 de l’IPC).
Dans les autres zones d’insécurité, principalement dans les régions de Gao et Mopti, l’insécurité alimentaire de Crise (Phase 3 de l'IPC) en cours se poursuivra jusqu’en septembre 2024 à cause des difficultés d’accès des ménages pauvres aux aliments. La hausse continue des prix des denrées alimentaires de base réduit significativement les capacités d’accès des ménages pauvres aux aliments dans un environnement où les moyens d’existence sont fortement dégradés. La main d’œuvre agricole qui constitue une principale source de revenus et de nourritures en cette période connait une baisse importante des opportunités en raison des difficultés d’accès aux champs. Les ménages ont alors recours à la réduction importante des dépenses alimentaire et non alimentaire, à la vente de biens de production et aux déplacements forcés vers des zones plus sécures et propices. A partir d’octobre, la consommation alimentaire connaitra son amélioration saisonnière habituelle grâce à la disponibilité moyenne de la propre production agricole, au paiement en nature lié aux activités agricoles, aux dons/zakats et à la baisse saisonnière des prix des denrées alimentaires. Ainsi, l’insécurité alimentaire de Crise (Phase 3 de l’IPC) s’améliorera en insécurité alimentaire de Stress (Phase 2 de l’IPC).