VUE D’ENSEMBLE
Quel niveau de sévérité ? Combien ?
L’analyse porte sur une région, 43 cercles, les 6 communes du district de Bamako et 4 sites de Personnes Déplacées Internes (Gao, Bourem, Ménaka et Mopti), soit au total 54 unités. Au total, il est estimé que presque 1,6 millions d’enfants âgés de 6 à 59 mois souffriront de la malnutrition aigüe au niveau national entre juin 2024 et mai 2025 ; cela représente une augmentation d’environ 11% d’enfants malnutris par rapport à l’année dernière (2023-2024). Le nombre de cas de malnutrition aigüe sévère (MAS) attendu s’élève à 424 532, soit une augmentation de 26% par rapport aux estimations de l’année dernière (2023-2024). Ceci est principalement dû à la détérioration dans certaines régions comme Sikasso, Kayes, Kidal, ainsi que dans certains cercles de Mopti et Tombouctou et dans les sites de déplacés. Au niveau national, la prévalence de Malnutrition Aigüe Sévère (MAS) est restée presque inaltérée, passant de 2,1% (Intervalle de Confiance de 1,1 à 4,5%) à 2,2% (IC de 0,6 à 6,4%) comparée à l’année dernière. Par ailleurs, l’estimation de la Malnutrition Aigüe Modérée (MAM) enregistre une nette augmentation. En plus, on remarque une faible baisse de la malnutrition aigüe auprès des femmes enceintes et allaitantes, qui s’élève à 85 170 femmes pour l’ensemble du pays contre 87 865 FEFA malnutries l’année passée.
Il est à noter que une unité d’analyse (Personnes Déplacées Internes de Gao) est classifiée en IPC AMN Phase 5 (Extrêmement critique).
Où et quand ?
En situation projetée (novembre 2024 à mai 2025), malgré une période correspondante avec une saisonnalité favorable, typiquement associée à une baisse des cas de malnutrition, six unités présenteront une dégradation de phase : avec la région de Kayes et deux cercles de Mopti (Bankass, Douentza) qui basculeront vers une situation Critique (Phase 4 de l’IPC MNA). Toujours en dégradation, deux communes de Bamako (Communes 4 et 6) ainsi que le cercle Niafunke (Tombouctou) qui basculeront vers une situation Sérieuse (Phase 3 de l’IPC MNA). De plus, neuf unités se maintiendront en situation Critique (Phase 4 de l’IPC MNA) : les 3 sites de PDIs (Mopti, Menaka et Bourem) ; les 3 cercles de GAO (Gao, Ansongo et Bourem) ; le cercle de Kidal ; le cercle de Menaka et le cercle de Koro (Mopti). De même, trois cercles de Ségou (San, Segou et Tominian) se maintiendront en situation Sérieuse (Phase 3 de l’IPC MNA) et finalement 26 unités se maintiendront dans une situation d’Alerte (Phase 2 de l’IPC MNA). Cependant, on observera uniquement dix unités en amélioration de phase : le Site des PDIs de Gao s’améliorant vers une phase 4. Les deux cercles de Tombouctou (Goundam et Gourma-Rharous) s’améliorant vers une phase 3. Finalement, sept cercles repartis entre les provinces de Koulikouro (Dioila, Kangaba et Kati) et Ségou (Baroueli, Bla, Macina, Niono) s’améliorant vers une phase 2.
En situation courante (Juin - Octobre 2024), Une unité d’analyse est en situation « Extrêmement Critique » avec 30,1% de MAG (Phase 5 de l’IPC MNA), il s’agit du Site PDIs de Gao. De plus, onze (11) unités d’analyse sont classés en situation « Critique » (Phase 4 de l’IPC AMN) avec notamment tous les cercles de la région de Gao (Gao, Ansongo, Bourem) ; deux (2) cercles de Tombouctou (Goundam, Gourma-Rharous) ; le cercle de Koro dans la région de Mopti, le cercle de Ménaka ; le cercle de Kidal ainsi que trois (3) sites PDIs (Site PDIs de Bourem, site PDIs de Ménaka, site PDIs de Mopti). Il y a 13 unités d’analyse qui sont en situation « Sérieuse » (Phase 3 de l’IPC MNA), notamment la région de Kayes ; sept (7) cercles de Ségou (Ségou, Bla, Macina, Niono, San, Tominian et Baraoueli) ; trois (3) cercles de Koulikoro (Dioila, Kangaba, Kati) et deux (2) cercles de Mopti (Bankass et Douentza). Finalement, 29 unités d’analyse sont en situation « Alerte » (Phase 2 de l’IPC MNA) sur cette période.
Pourquoi ?
Le poids des facteurs contributifs à la malnutrition aigüe varie d’une unité d’analyse à une autre ; cependant nous pouvons retenir, les déterminants ci-après : les causes immédiates de la malnutrition aigüe à savoir un apport alimentaire inadéquat des enfants autant d’un point de vue qualitatif (très faible diversité alimentaire minimale de 2.83% à 28.05% ; régime alimentaire minimal acceptable de 1.2% à 21.3%) que quantitatif (fréquence des repas 30% à 80%) dans la plupart des unités en Phase 3 et plus. La dimension de la sécurité alimentaire contribue de façon « élevée » à la malnutrition aigüe dans la majorité des unités analysés. Cependant, la sécurité alimentaire ne semble pas influencer la malnutrition aiguë dans certains cercles de Tombouctou et de Sikasso ainsi que la région de Bamako. Les maladies infantiles telles que la diarrhée (entre 4% et 20%) et les Infections Respiratoires Aigües (IRA : entre 6% à 50%) ainsi que le paludisme (entre 9% et 38%) sont des déterminants majeurs qui présentent des prévalences élevées dans les régions de Kayes, Gao, Ménaka, Koulikoro, Taoudenit et Kidal avec un impact négatif fort sur l’état nutritionnel des enfants. Par ailleurs, la rougeole est un déterminant classé « élevé » pour la région de Mopti, Koulikoro, Gao, Tombouctou et le district de Bamako et « très élevé » pour les cercles de Nianfunké à Tombouctou et de Kati à Koulikoro. Les pratiques d’allaitement et de soins non-adaptées notamment chez les plus jeunes (ANJE) jouent également un rôle majeur comme déterminant de la Malnutrition Aiguë, notamment dans les régions de Sikasso, Kayes, Mopti et Bamako. Cependant, certaines pratiques semblent s’être améliorées bien qu’elles restent des déterminants classés « faibles » dans des régions telles que Mopti, Ségou et Tombouctou. Par contre, les conditions d’hygiène et environnement sanitaire semblent être des déterminants élevés à très élevés à travers notamment la non-disponibilité des dispositifs de lavage des mains au niveau des ménages dans les régions de Kayes, Mopti, Sikasso, Tombouctou, Kidal et Bamako. En plus des facteurs énumérés ci-dessus s’ajoute la faible couverture du programme PCIMA dans les régions de Kayes, Koulikoro, Ségou, Kidal et dans le district de Bamako qui concourt à détériorer la situation nutritionnelle dans lesdites localités. La situation sécuritaire volatile contribue aussi à cette dégradation de la situation nutritionnelle avec l’activisme des groupes armés qui limite davantage la bonne couverture des activités des secteurs spécifiques et sensibles à la nutrition dans les régions concernées.