MONROVIA, le 8 juillet (IRIN) - Le gouvernement de transition libérien a demandé une révision de l'accord qui régit l'exil de l'ancien président libérien Charles Taylor, l'accusant d'avoir enfreint de manière répétée les termes de cet accord en communiquant quotidiennement avec le Liberia depuis le Nigeria, son lieu d'exil, et en dictant à ses sympathisants des ordres susceptibles de troubler la paix au Liberia et dans la région.
Vêtu de son sempiternel costume blanc, Taylor s'est exilé au Nigeria conformément aux accords de paix d'août 2003, qui marquaient la fin de la guerre civile au Liberia, une guerre qui avait duré 14 ans. Le chef de guerre, accusé d'avoir fomenté des conflits dans toute l'Afrique de l'Ouest, se terre aujourd'hui dans une résidence luxueuse située à Calabar, une ville reculée du delta du Niger.
" Nous disposons de nombreuses preuves de l'ingérence de M. Taylor dans la vie politique libérienne et de ses efforts pour déstabiliser la sous-région. Au vu de cela, il est nécessaire, du point de vue de la loi, de revoir les conditions de son exil dont les modalités ont été définies par la communauté internationale ", selon une déclaration publiée mercredi soir par le ministère libérien de la Justice.
" [Nous savons entre autres que] l'ex-chef de l'Etat téléphone quotidiennement à ses acolytes au Liberia et dans d'autres régions du monde. Cela lui permet de dicter ses ordres et ses instructions, menaçant la paix et la sécurité au Liberia et dans la sous-région ", selon la déclaration.
" Au vu des preuves accablantes et toujours plus nombreuses dont nous disposons, nous ne pouvons laisser l'ex-président bénéficier plus longtemps des conditions cet accord ", toujours d'après la déclaration.
L'accord qui régit l'exil de Taylor lui permet actuellement d'échapper aux 17 chefs d'accusation auxquels il aurait à faire face devant les tribunaux de Freetown, soutenus par les Nations unies, pour des crimes contre l'humanité dont il se serait rendu coupable en Sierra Leone, durant la guerre civile.
L'ancien président est accusé d'avoir soutenu la rébellion sanglante menée par le Front révolutionnaire uni (RUF) pendant la guerre civile en Sierra Leone, qui a duré dix ans et a officiellement pris fin en 2002. Il aurait, en effet, fourni des armes et des munitions aux chefs rebelles en échange de diamants importés illégalement.
Les gouvernements occidentaux et les organisations internationales de défense des droits de l'homme ont demandé à maintes reprises que Taylor soit extradé afin qu'il puisse être jugé. Toutefois, Olusegun Obasanjo, le président nigérian, a déclaré qu'il n'expulserait pas l'ancien leader libérien avant d'avoir eu la preuve concrète que les termes de l'accord avaient bien été enfreints.
A New York, les diplomates du Conseil de sécurité de l'ONU se sont abstenus de voter une résolution exigeant officiellement l'extradition de Taylor. Ils ont néanmoins laissé entendre que des négociations étaient en cours en Afrique.
L'appel lancé mercredi par le gouvernement de transition libérien et exigeant une révision des conditions de l'accord régissant l'exil de Taylor pourrait bien être la première mesure dans ce sens.
En effet, avec cet appel, la pression exercée sur le président Obasanjo s'intensifie. Ce dernier s'est du reste publiquement engagé à envoyer Taylor devant les tribunaux de Monrovia si le futur gouvernement libérien élu décidait de porter plainte et exigeait son extradition.
Gyude Bryant, le président libérien par intérim, avait précédemment déclaré que la présence de Taylor au Nigeria s'inscrivait dans le cadre du processus de paix. Il avait toutefois averti que si les actes de Taylor venaient à présenter une menace à la paix, la situation changerait.
Les autorités nigérianes à Abuja n'ont pas commenté jeudi la déclaration du gouvernement libérien.
Le ministère de la Justice n'a pas précisé les noms des interlocuteurs de Taylor, ni les ordres que celui-ci leur avait dictés. Les porte-paroles du ministère et du gouvernement, contactés par IRIN, ont refusé de s'exprimer davantage sur le sujet.
Mais tandis que le Liberia se prépare pour les élections du 11 octobre prochain, dernière étape dans la transition de ce pays vers la démocratie, les allégations d'ingérence s'accumulent contre Taylor.
Les rapports publiés par Global Witness et Coalition for International Justice, deux centres de recherche, indiquent que Taylor contrôle ou contribue au financement d'au moins neuf partis politiques sur les 30 qui présenteront leur candidat à la présidentielle d'octobre.
Les procureurs du tribunal spécial du Sierra Leone ont accusé Taylor d'avoir envoyé 160 000 dollars américains à ses sympathisants, à Monrovia, la capitale libérienne, en octobre dernier pour l'organisation des émeutes qui avaient fait 16 morts et des centaines de blessés. Ils l'accuse également d'être impliqué dans la tentative d'assassinat, en janvier 2005, sur la personne de Lansana Conte, le président guinéen souffrant.
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