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Iran

Conseil de sécurité: pour l’ONU, la diplomatie reste la meilleure option pour garantir le caractère exclusivement pacifique du programme nucléaire iranien

9944e séance – après-midi
CS/16100
24 juin 2025

Le Conseil de sécurité a examiné, cet après-midi, la mise en œuvre de la résolution 2231 (2015) qui consacrait le Plan d’action global commun (PAGC) dont l’objectif était de garantir la nature exclusivement pacifique du programme nucléaire iranien.

Cette séance s’est déroulée alors que le Moyen-Orient connaît un contexte particulièrement tendu, marqué par le lancement, le 13 juin par Israël, d’une offensive militaire visant à démanteler les programmes nucléaire et balistique iraniens, suivie des ripostes de l’Iran contre Israël et des frappes aériennes des États-Unis contre trois sites nucléaires iraniens.

Intervenant au nom de la Coordonnatrice de la Commission conjointe du Plan d’action global commun (PAGC), le Chef de la délégation de l’Union européenne (UE) a jugé urgent de revenir à une solution diplomatique, notant que dans quatre mois, le Conseil de sécurité ne sera plus saisi de la question du nucléaire iranien en vertu de la résolution 2231 (2015) qui expire le 18 octobre. « Une solution durable au problème du nucléaire iranien ne peut passer que par un accord négocié, et non par une action militaire », a-t-il insisté.

Une perspective partagée par la Secrétaire générale adjointe aux affaires politiques et à la consolidation de la paix pour qui la diplomatie, le dialogue et la vérification restent la meilleure option pour garantir le caractère exclusivement pacifique du programme nucléaire iranien et apporter des avantages économiques concrets au peuple iranien.

Mme Rosemary DiCarlo a rappelé que depuis 2015, le PAGC s’est heurté à de nombreuses difficultés, y compris le retrait des États-Unis de l’accord en 2018 et le retour de l’Iran sur certains de ses engagements énoncés dans le Plan. Au cours des derniers mois, a-t-elle ajouté, l’Iran et les États-Unis ont pourtant tenu cinq cycles de négociations bilatérales, facilitées par Oman, mais aucune de ces initiatives n’a permis de trouver un moyen de garantir la nature exclusivement pacifique du programme nucléaire iranien.

« Légitime défense collective »

Les États-Unis ont d’ailleurs justifié leur « opération de précision » du 21 juin par la volonté de diminuer de manière drastique la capacité de l’Iran à produire une arme nucléaire. Conformément au droit inhérent à la légitime défense collective, les frappes ciblées américaines sur des installations nucléaires iraniennes avaient pour but de réduire la menace que représente l’Iran pour Israël, pour la région et de manière plus générale, pour la paix et la sécurité internationales, a expliqué la délégation américaine.

Si l’escalade militaire observée entre Israël et l’Iran depuis le 13 juin et les frappes américaines ont compliqué les chances de voir pleinement appliquée la résolution 2231 (2015), l’annonce hier par le Président Trump d’un cessez-le-feu entre Israël et l’Iran a toutefois suscité un certain espoir.

Il est dans l’intérêt de toutes les parties de parvenir d’urgence à un accord qui établisse une confiance internationale à long terme quant au caractère exclusivement pacifique du programme nucléaire iranien, a fait valoir le Royaume-Uni, ajoutant que ce cessez-le-feu est un premier pas dans cette direction, un point de vue partagé par la plupart des membres du Conseil de sécurité dont l’Algérie. Cet accord de cessez-le-feu offre une occasion d’éviter une escalade catastrophique et de parvenir à un règlement pacifique de la question nucléaire iranienne, a souligné Mme DiCarlo.

Diplomatie ou vigilance

Pour sa part, l’Iran s’est dit convaincu que malgré les frappes « non provoquées et irresponsables » qui ont visé ses installations nucléaires depuis le 13 juin, nous sommes « plus proches d’une solution diplomatique que jamais ».

Il a rappelé que les États-Unis se sont retirés unilatéralement du PAGC en 2018 et que son pays s’est vu imposer des sanctions illégales en violation de la résolution 2231 (2015) alors qu’il honorait ses engagements. Les causes profondes de la situation actuelle sont donc limpides, a-t-il estimé, expliquant que son pays avait pris des « mesures de remédiation » dans l’objectif de rétablir « un certain équilibre ». En outre, Israël refuse de soumettre ses installations nucléaires aux inspections de l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) tandis que l’Iran a placé son programme nucléaire sous une surveillance très stricte, a fait observer le représentant, qui a appelé le Conseil de sécurité à condamner explicitement les frappes israéliennes et américaines.

« S’il existait un prix Nobel de la tromperie, l’Iran en serait chaque année le lauréat », a rétorqué le représentant d’Israël. Relevant que l’AIEA a confirmé qu’elle ne peut plus vérifier la nature du programme iranien, il a affirmé qu’Israël a agi pour éliminer une menace d’extermination.

Pendant que des pays négociaient, l’Iran enrichissait et mentait, a tranché le délégué. Il a indiqué que certains pays avaient misé sur la diplomatie alors que c’était une illusion. Toutes les chances ont été données à la diplomatie et celle-ci n’a jamais fonctionné, car le régime iranien est expert en tromperie, a-t-il accusé, exhortant la communauté internationale à la vigilance.

La position des E3

De son côté, la France, aux côtés du Royaume-Uni et de l’Allemagne, les trois pays européens partenaires (E3) au PAGC aux côtés de la Fédération de Russie, de la Chine et de l’Iran, a assuré que les Européens n’ont jamais cessé de mettre en œuvre leurs engagements au titre de cet accord, y compris après le retrait des États-Unis en 2018.

Les E3 ont déploré le fait que l’Iran se soit engagé dans une escalade de son programme nucléaire et ait enfreint la quasi-totalité des limites qu’imposait l’accord à ses activités. En effet, fin mai 2025, l’Iran avait accumulé un stock d’uranium 40 fois supérieur aux limites fixées par l’accord, dont plus de 400 kilogrammes d’uranium hautement enrichi à 60%, ont-ils signalé. Ils ont donc appelé l’Iran à reprendre une pleine coopération avec l’AIEA et à lui permettre d’accéder dès que possible à ces installations nucléaires.

À ce propos, la représentante de l’Allemagne a dit être alarmée par l’initiative du Parlement iranien visant à suspendre la coopération avec l’AIEA, ainsi que par les visées de l’Iran en vue de se retirer du Traité sur la non-prolifération.

Compte tenu du non-respect par l’Iran de ses obligations juridiquement contraignantes en matière de garanties, comme l’a confirmé la résolution adoptée le mois dernier par le Conseil des gouverneurs de l’AIEA, les activités nucléaires de l’Iran continuent de constituer une menace pour la sécurité régionale et mondiale, a-t-elle souligné.

Absence de dialogue

Son homologue de la Chine a estimé en revanche qu’une interprétation biaisée des rapports de l’AIEA aurait conduit certains États Membres à pousser le Conseil des gouverneurs de l’AIEA à adopter cette résolution qui affirme que l’Iran ne respecte pas ses obligations. Tout cela s’est fait sans dialogue digne de ce nom, sapant la confiance, a-t-il déploré, tout en insistant sur l’impératif pour l’Iran de s’engager à ne pas fabriquer une arme nucléaire.

Le règlement des questions liées au programme nucléaire iranien ne peut se faire que par la diplomatie, a insisté à son tour la Fédération de Russie. Tel est précisément l’objectif du projet de résolution proposé par la Russie avec ses partenaires chinois et pakistanais, dont nous allons proposer aujourd’hui une version actualisée, et qui vise à garantir la pérennité du cessez-le-feu et le suivi de son respect par le Conseil, a indiqué le délégué russe.

Il s’est par ailleurs dit surpris par la demande d’Israël de participer à cette réunion, organisée sous le point « non-prolifération ». « J’aimerais croire que cela augure l’adhésion de ce pays au Traité sur la non-prolifération, qui serait du plus grand intérêt pour le monde entier. » Tout cela s’est produit avec l’approbation du Royaume-Uni, de la France et de l’Allemagne. Si leur engagement à trouver une solution diplomatique au programme nucléaire iranien n’inspirait auparavant aucune confiance, il est désormais tout simplement impossible de les prendre au sérieux, a tranché le délégué.

Un avenir incertain

Le PAGC a été la meilleure option permettant de garantir la nature pacifique du programme nucléaire iranien, a souligné le facilitateur pour la mise en œuvre de la résolution 2231 (2015) et Représentant permanent de la Slovénie, M. Samuel Žbogar. En sa capacité nationale, il a jouté que c’était sans conteste l’une des plus grandes réussites du multilatéralisme de la dernière décennie qui a permis l’instauration d’un régime solide, capable de répondre de manière globale à un enjeu urgent de sécurité internationale. Malheureusement, il a connu son lot d’épreuves et de revers ces dernières années.

« Une époque semble toucher à sa fin, et l’avenir qui s’ensuivra est incertain. Mais une chose est sûre, cependant: à l’approche du mois d’octobre, il est important de rappeler que les objectifs du PAGC restent valables », a-t-il souligné. « Nous avons besoin de diplomatie, et ce, maintenant. »

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