Fort du succès de la réhabilitation du centre de soins Johan Pahlawan, à Meulaboh, la Croix-Rouge Française cherche à étendre son programme à l'ensemble de la région.
Le travail d'évaluation
Ce matin, comme presque tous les matins depuis un mois, François part au district de Blang Pidie, au sud de Meulaboh, pour auditer des centres de soins (Puskesmas).
Même si la réhabilitation comprend une importante partie bâtiment, ce médecin hygiéniste est tout à sa place : « C'est pertinent de confier ce travail d'évaluation par un médecin, surtout quand on travaille sur des systèmes de santé que nous ne connaissons pas. Quelqu'un d'autre passerait à coté de plein de choses. » A chaque inspection, François examine si les médications sont adaptées aux pathologies - ce qui souvent n'est pas le cas -, quels sont les médicaments les plus utilisés et pourquoi. En quatre semaines, il a visité plus d'une trentaine de centres. Bâtiments en mauvais état, voire insalubres, règles sanitaires médiocres ; les problèmes sont nombreux et touchent essentiellement à l'hygiène. Par expérience, il sait qu'il ne faut pas se contenter des témoignages du corps médical local : « Il faut aller à la pèche aux informations. Concernant la chaîne du froid et des méthodes de conservation des vaccins, ils disent toujours qu'il n'y a pas de problème. Mais quand nous inspectons les frigos, nous voyons que cela ne va pas du tout. »
Visite au centre d'Alun Mangotta
Au bout de trois heures, nous sommes rentrés dans le district de Blang Pidie, traversant des villages qui ont pavoisé avec le drapeau national. Ce qui rappelle qu'il y a quelques mois encore, Blang Pidie était une zone de conflit entre rebelles indépendantistes et l'armée indonésienne.
Nous arrivons enfin au centre de soins d'Alun Mangotta, à trois kilomètres de Blang Pidie ville. Ce dispensaire est de tout évidence très pauvre. Les infirmières qui y travaillent sont des volontaires et reçoivent une rémunération modeste quand le centre en a les moyens.
François remarque des pratiques thérapeutiques bizarres : seringues rincées à l'eau, mauvaises pratiques médicamenteuses, etc. « Ils doivent contaminer pas mal de personnes avec l'hépatite A », lance-t-il. D'après ses observations depuis un mois, beaucoup de personnes n'ont pas les moyens d'aller dans un centre de santé et meurent du paludisme. Pourtant les soins sont gratuits ! Mais les gens très pauvres n'ont ici que deux, trois jours d'autonomie financière et alimentaire et ne peuvent pas s'arrêter de travailler.
De l'aide d'urgence au développement
La Croix-Rouge Française d'Aceh cherche à étendre ses actions de réhabilitation et de formation hygiène aux régions voisines. « Au centre de soins Johan Pahlawan, à Meulaboh, le projet hygiène a permis de mettre le personnel médical indonésien un cran au-dessus de ce qu'il était », affirme François. Les gens viennent de loin pour s'y faire soigner.
Mais certains reprochent à la Croix-Rouge de s'écarter des victimes du Tsunami. Nicolas Pazéry, chef de mission en Indonésie, argumente : « On ne peut pas se limiter aux victimes du Tsunami et fermer les yeux sur le reste de la population. Nous avons des programmes en place, autant essayer dans faire profiter la population qui souvent a des besoins similaires aux personnes victimes du raz-de-marée. »
L'initiative de la Croix-Rouge à Blang Pidie se place dans un vaste programme sous la coordination de la Fédération de la Croix-Rouge. Les Croix-Rouge française, japonaise, espagnol, singapourienne, indonésienne, etc. se sont repartis sur trois districts pour la reconstruction des maisons et des bâtiments publics.