A l’occasion du deuxième anniversaire du séisme du 12 janvier 2012, je tiens à exprimer ma sympathie et mon soutien envers tous les Haïtiens, au Président de la République Monsieur Michel Martelly, ainsi qu’à son gouvernement.
Deux ans après, le séisme et ses conséquences continuent d’interpeler l’ensemble de la communauté internationale. Des progrès importants ont été réalisés, et beaucoup reste encore à faire. Je souhaite en ce jour rappeler que la détermination de l’UNESCO à accompagner Haïti est intacte. Elle n’a pas faibli et ne faiblira pas, malgré les difficultés que connait aujourd’hui l’Organisation.
L’UNESCO est intervenue immédiatement après le séisme, et nous travaillons depuis sans relâche avec l’envoyée spéciale de l’UNESCO pour Haïti, Madame Michaëlle Jean, et l’ensemble de nos partenaires, pour qu’Haïti renaisse encore plus forte et plus belle.
Dès le mois de janvier 2010, l’UNESCO a mis ses locaux de Port au Prince à la disposition du Ministère de l’éducation, dévasté par le tremblement de terre. L’éducation est la clé de voûte d’une nouvelle Haïti, et je souhaite saluer l’engagement du Président Michel Martelly à faire de l’éducation une priorité nationale. Nous nous sommes mobilisés pour accélérer la campagne d’alphabétisation, pour assurer la continuité des enseignements et des examens et former les professeurs – plus de 2000 à ce jour – à l’appui psychosocial. En deux ans, plusieurs programmes de moyen et long terme ont été mis en place. Avec l’appui du Canada, nous accompagnons le Ministère de l’Education et de la Formation Professionnelle dans la conception d’une stratégie plus énergique en matière de formation des enseignants, du préscolaire jusqu’au secondaire. Nous appuyons également le Ministère dans la mise en place d’un système de statistiques scolaires – le premier depuis des décennies – qui permettra d’améliorer le pilotage du système éducatif, et dont les premiers résultats ont été publiés début janvier.
Convaincue de l’importance du partage de l’information dans cette période cruciale, l’UNESCO a lancé un programme d’aide pour les journalistes au chômage, en partenariat avec l’Association des journalistes haïtiens (AJH), pour assurer la distribution d’équipements. Les journalistes ont pu produire des reportages sur des thèmes culturels, historiques, éducatifs et humanitaires et diffuser leurs contenus. Entre le 15 octobre 2010 et le 15 janvier 2011, environ 25 émissions culturelles et historiques ont été retransmises chaque semaine sur les ondes de la Radio nationale d’Haïti (RNH).
Un nouveau code de déontologie de la profession vient également d’être adopté.
L’UNESCO a organisé en 2011 une simulation d’alerte au Tsunami à travers toute les Caraïbes, avec la participation d’Haïti. Nous renforçons les capacités scientifiques du pays, avec l’appui de l’Union Européenne. La Commission Océanographique Intergouvernementale de l’UNESCO a notamment contribué au renforcement des équipements de surveillance de la région et à la formation des professionnels sur place. La ville du Cap-Haitien possède désormais un marégraphe, un appareil qui permet de déterminer les mouvements de la mer, les modifications causées par les changements climatiques et d’anticiper les risques de tsunami. C’est grâce à ce type d’appareil qu’Haïti peut aujourd’hui envoyer des données aux pays voisins, les informer de dangers potentiels et partager avec eux des informations scientifiques.- en un mot, jouer son rôle dans la coopération scientifique régionale.
Les tsunamis, longtemps négligés dans les programmes de réduction des risques, sont aujourd’hui mieux pris en compte parmi les dangers potentiels. Cette prise de conscience est notamment née des ateliers de formation organisés par l’UNESCO en mars 2011, à Port-au-Prince, en partenariat avec la direction de la protection civile, les forces de police et les équipes météo, sur les procédures d’alertes aux tsunamis et les interventions d’urgence. Les plus grandes villes d´Haïti sont situées sur la côte et sont vulnérables, car l’île se trouve entre deux zones de subduction qui représentent des sources potentielles de tsunamis. C’est donc en diffusant une meilleure connaissance des risques, et en formant les populations à réagir, que l’on construit aussi des sociétés plus robustes.
Alors que nous célébrons ce douloureux anniversaire, et tandis beaucoup d’haïtiens n’ont toujours pas retrouvé leurs foyers, je sais qu’il est difficile, voire déplacé, de rappeler que les projets de cette nature prennent du temps.
Le rythme de la reconstruction doit s’accélérer et les promesses de dons doivent être tenues, en regard de l’urgence des besoins et de l’impatience de la population. L’UNESCO est, par définition, une agence de long terme, et nous avons développé une série de projets ambitieux qui dessinent le nouveau paysage culturel du pays à l’horizon de 10 / 15 ans avec des structures plus fortes, des musées, des archives, des bibliothèques, un artisanat, de nouvelles lois du patrimoine au service du développement. Le Centre du Patrimoine Mondial a reçu la contribution de l’Espagne pour accélérer la mise en place d’un plan de gestion du Parc national historique Citadelle, Sans Soucis, Ramiers, et former des conservateurs. L’UNESCO a lancé le Comité international de coordination pour la sauvegarde du patrimoine culturel haïtien (CIC). Tous ces projets de longue haleine ont des répercutions directes à court terme, car en sécurisant les sites contre le pillage, en montant des spectacles dans les camps de personnes déplacées, nous voulons montrer que la culture est un socle solide dont les haïtiens peuvent être fiers, un moteur de reconstruction.
La conférence des donateurs pour la culture en Haïti, en avril 2011, a marqué une étape importante dans ce plaidoyer en faveur de la culture comme levier de développement. L’action de l’UNESCO auprès des artisans du Carnaval de Jacmel, pour relancer la confection des masques, des costumes, des produits d’artisanat, a d’ailleurs été remarquée et est soutenue par l’Initiative mondiale de Bill Clinton.
Quiconque est allé marcher dans les rues de Port au Prince, de Léogane ou de Jacmel a vu l’énergie et l’engagement des enfants, des hommes et des femmes qui s’activent pour reconstruire leurs maisons, leurs routes et leur pays garde l’image d’un pays tourné vers l’avenir, conscient de son potentiel. Donnons-lui les moyens d’y croire encore davantage. En ce jour du souvenir et de la commémoration, nous gardons comme au premier jour notre conviction que l’éducation, la culture et les sciences sont les socles de la renaissance. L’UNESCO reste totalement mobilisée et continuera d’appeler à élargir le cercle de ceux qui veulent soutenir Haïti sur ce chemin de la reconstruction.
Irina Bokova