Les habitants de Port-au-Prince en sont à lutter pour leur simple survie. Assoiffés et le ventre vide, ils sont à bout de nerfs et commencent à réaliser ce qui leur arrive. Le CICR a intensifié ses efforts et s'emploie à distribuer vivres, eau et médicaments à des milliers de rescapés.
Situation générale
Pour beaucoup d'habitants de Port-au-Prince, la situation est véritablement catastrophique.
« L'accès aux abris, aux installations sanitaires, à l'eau, à la nourriture et aux soins médicaux demeure extrêmement limité », explique Riccardo Conti, chef de la délégation du CICR en Haïti. « Même si la présence des acteurs humanitaires commence à produire ses effets dans les hôpitaux et les dispensaires, beaucoup de structures médicales à Port-au-Prince manquent toujours de personnel et de médicaments. Vu l'ampleur des besoins, la tâche qui attend les organisations humanitaires s'annonce gigantesque. »
À Christ-Roi, Delmas, Carrefour et dans pratiquement tous les autres quartiers de la capitale, les rues grouillent de monde et sont remplies de tentes de fortune et de tas d'ordures en feu. De nombreux habitants semblent avoir abandonné les recherches pour retrouver des cadavres. Assis sur les gravats d'un immeuble effondré, des hommes sont occupés à casser des blocs de ciment et à extraire des morceaux de ferraille des décombres, cherchant à récupérer tout ce qui pourrait servir. De longues queues chaotiques se forment devant les rares pompes à essence encore en service. Des gardes armés et des policiers tentent vainement de mettre un peu d'ordre parmi la foule de clients.
« Les gens deviennent de plus en plus agressifs, parce qu'ils ont besoin d'eau et de nourriture », explique Sherley, une rescapée de 29 ans. « À mesure que nous réalisons que nous ne retrouverons pas nos proches, c'est comme si nous prenions enfin conscience de ce qui nous arrive. Aujourd'hui, les gens se battent pour survivre. »
Le CICR continue d'intensifier ses efforts pour faire face à la crise ; actuellement, il approvisionne en eau trois quartiers de la ville. Six camions chargés de secours du CICR, comprenant des médicaments et du matériel médical, sont arrivés à Port-au-Prince dans la nuit de dimanche et ont permis de renforcer la capacité de l'institution à aider ceux qui en ont besoin.
Risques d'épidémies
Six jours après le séisme, la situation en matière de santé et d'assainissement devient de plus en plus précaire dans les camps de fortune.
L'accès aux toilettes et à l'eau est extrêmement limité, dans la mesure où les services et les infrastructures ont pratiquement tous été réduits à néant et un nombre incalculable de personnes dort dans la rue. Une insoutenable odeur d'urine flotte un peu partout dans Port-au-Prince.
« Nous devons répondre au plus vite aux besoins en eau et assainissement si nous voulons limiter les risques d'épidémies, affirme M. Conti. C'est une question primordiale. »
Le CICR utilise actuellement des camions-citernes pour fournir de l'eau potable à quelque 7 500 personnes installées dans des camps de fortune. Dans le quartier de Delmas, il a également construit des latrines pour environ 1 000 personnes.
« L'eau ne sert pas uniquement à étancher la soif », explique Guy Mouron, coordonnateur du CICR chargé de l'approvisionnement en eau et de l'assainissement en Haïti. « Quand on a tout perdu, le fait de pouvoir se laver permet de rester propre et de retrouver la dignité. »
Tensions croissantes
Les prix des denrées alimentaires et des transports sont montés en flèche depuis mardi, et les scènes de violence et de pillage se multiplient à mesure que le désespoir grandit.
« Les gens ont tout perdu. Il n'y a pas d'argent et le marché noir fleurit », raconte Verlène, une assistante administrative de 31 ans. « À Delmas, où je vis, des pillages ont lieu. La nuit, nous nous barricadons à l'intérieur. Les propriétaires de logements portent des armes et n'hésitent pas à s'en servir. Hier, des individus se sont mis à crier qu'un tsunami arrivait pour faire fuir les gens et leur voler le peu qu'il leur reste. »
Les délégués du CICR indiquent qu'il y a des marchands de légumes et de fruits dans les rues, mais peu de clients, car personne n'a les moyens d'acheter la nourriture. Dans un quartier de Port-au-Prince, le prix du pain a doublé depuis la semaine dernière.
Beaucoup de ceux qui en ont les moyens partent. À Martissant, les autobus qui quittent la ville sont bondés, et la frontière avec la République dominicaine serait prise d'assaut par des habitants de Port-au-Prince cherchant à sortir du pays. Près de l'aéroport, des Américains d'origine haïtienne font la queue devant l'ambassade des États-Unis, espérant pouvoir quitter le pays.
Pendant ce temps, dans la ville Port-au-Prince, l'indifférence s'installe. Les habitants ont commencé à entasser les cadavres devant les portes. « La nuit dernière, le long de la Route des Frères, j'ai vu des gens qui brûlaient des corps dans une tombe improvisée sur le bas-côté de la route », raconte une femme au CICR.
Activités du CICR
Le CICR, qui était déjà présent en Haïti avant le tremblement de terre de mardi, œuvre en tant que composante du Mouvement international de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge et travaille en étroite coopération avec la Croix-Rouge haïtienne.
Le CICR a approvisionné en eau potable quelque 7 500 survivants et a fourni des secours à la Croix-Rouge haïtienne destinés aux dix postes de premiers secours que celle-ci a mis en place dans divers camps de fortune de la capitale. Ces postes sont maintenant opérationnels et pourront dispenser des soins médicaux de base à des milliers de personnes.
Le CICR a aussi fourni plus de 500 sacs mortuaires aux militaires brésiliens de la Mission des Nations Unies, chargés de l'enlèvement des corps à Port-au-Prince.
Avant l'arrivée dimanche de six camions transportant une cargaison de quelque 40 tonnes de secours médicaux du CICR, l'institution, avec le soutien de la Croix-rouge haïtienne, avait déjà fourni des kits médicaux pour soigner 2 000 patients à deux hôpitaux de référence de Port-au-Prince. Des centaines de couvertures et de bâches en plastique ont également été distribuées.
Une deuxième équipe de déploiement rapide du CICR est attendue en Haïti d'ici un ou deux jours pour apporter un soutien dans les domaines de la médecine légale, de la recherche de personnes, des soins infirmiers, des communications et de la logistique aux équipes déjà présentes sur place.
Par ailleurs, les délégués du CICR ont visité plusieurs lieux de détention à Port-au-Prince afin d'évaluer les besoins.
Vu l'ampleur de la catastrophe, le CICR n'est pas en mesure de fournir de chiffres exacts sur le nombre de morts et de blessés.
Entre-temps, la première des seize unités d'intervention d'urgence de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge mobilisées est arrivée à Port-au-Prince. Une unité chirurgicale norvégienne à déploiement rapide et une unité de soins médicaux finlandaise sont arrivées dimanche avec des secours médicaux et vont pouvoir commencer à pratiquer des opérations aujourd'hui. Une unité de secours américaine est à l'œuvre à Port-au-Prince. Une unité allemande de soins médicaux de base et une unité espagnole spécialisée dans les télécommunications arriveront aujourd'hui. Une unité de la Croix-Rouge britannique spécialisée dans la logistique est déjà en place à Saint-Domingue, et un hôpital de campagne ainsi qu'une unité spécialisée dans l'eau et l'assainissement arriveront ces prochains jours. Le CICR continue de travailler en étroite coopération avec la Fédération internationale des Sociétés de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge pour veiller à ce que toutes les unités d'intervention d'urgence attendues en Haïti puissent atterrir le plus vite possible.
Family Links
Le CICR s'apprête à mettre en place un bureau au siège de la Croix-Rouge haïtienne pour aider les personnes qui ont été séparées de leur famille ou qui sont à la recherche de proches disparus. Les gens auront également la possibilité de s'enregistrer pour faire savoir qu'ils sont sains et saufs. Ce bureau permettra aux personnes de recevoir des nouvelles de leurs proches et de leur en transmettre.
Le 18 janvier, plus de 22 000 personnes étaient enregistrées sur le site web spécial du CICR (www.icrc.org/familylinks), activé le 14 janvier pour aider les personnes recherchant des membres de leur famille.
Si la grande majorité des personnes enregistrées cherchent à obtenir des nouvelles de membres de leur famille, près de 1 500 personnes ont utilisé le site pour faire savoir qu'elles étaient en vie. Au total, 220 personnes ont demandé au CICR de retirer de la liste des personnes recherchées le nom d'un proche qu'ils ont pu localiser, par leurs propres moyens ou grâce au site web.
Informations complémentaires :
Simon Schorno, CICR Port-au-Prince, tél. satellitaire : +88 165 146 6175
Marçal Izard, CICR Genève, tél. : +41 22 730 2458 ou +41 79 217 3224
Pour des mises à jour régulières sur les opérations de secours déployées en Haïti,
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