Des milliers de ménages ont perdu tous leurs biens lors du tremblement de terre de l'année dernière. Ils ont bénéficié du transfert d'argent pour faire face.
Ndiaga Seck
Quand le tremblement de terre a frappé l’année dernière, Jacquelin Favot a perdu tous ses moyens, littéralement. Il a passé de longues nuits dehors, avec sa mère, son épouse et ses cinq enfants.
« Ma maison s'est effondrée pendant le tremblement de terre. Nous avons vécu dans la rue, sous un arbre. Il n'y avait nulle part ailleurs où loger. Notre maison n'était plus habitable », relate-t-il
Favot est habitant de Fonds d’Icaque, un petit hameau paisible niché dans les hauteurs de la Grande Anse. L’homme est assis sous un grand arbre au milieu de la concession, avec à la main, quelques ananas qu’il vient fraichement de couper dans son champ.
Passionnée par l’école
Dolcat, sa fille va à l’école à quelques kilomètres de là, empruntant une sente sinueuse comme raccourci que seuls les habitants du village connaissent. La fille de 14 ans lit une histoire dans un livre déjà vieux, mais très bien entretenu. Elle reprenait à voix haute la chanson de l’histoire qui semblait vraiment lui plaire :
«Petit oranger grandit, grandit, grandit, petit oranger.
Aucune belle-mère ne peut remplacer une mère.
Petit oranger grandit, grandit.»
En réalité, Dolcat aime l’école. Elle y trouve son bien-être. Elle continue de lire dans son livre :
C'est l'histoire d'une petite fille qui a perdu sa mère à la naissance, je dois vous dire que cette enfant n'avait ni frère ni sœur. Malgré son jeune âge, elle devait faire toutes les tâches de la maison. Elle a vu un oranger et en même temps elle a commencé à chanter.
Elle fredonne de nouveau la chanson de l’histoire. Peut-être celle-ci lui rappelle sa propre histoire quand elle était là, incapable, devant l’étendue des dégâts que le séisme a causés.
« Petit oranger grandit, grandit, grandit, petit oranger.
Aucune belle-mère ne peut remplacer une mère.
Petit oranger grandit, grandit.»
Bien que le tremblement de terre ait frappé alors que les enfants haïtiens étaient en vacances scolaires, Dolcat a failli perdre ses études parce qu’affectée par les affres du désastre. « Après le séisme, nous avons dû faire face à de nombreuses difficultés. Nous avons dû dormir à la belle étoile et nos parents n'avaient pas les moyens de nous aider », raconte-t-elle, le cœur serré.
Le séisme a appauvri des ménages déjà vulnérables
Le séisme qui a perturbé la vie de la famille Favot est de magnitude 7,2 qui a frappé la région du sud-ouest d'Haïti le 14 août 2021, laissant des milliers de personnes dans le besoin de nourriture, d'eau, d'assainissement, d'hygiène et d'abris. Selon les données officielles, le séisme a touché 800 000 personnes, dont 340 000 enfants, fait plus de 2 200 morts et 12 700 blessés. Il a aussi endommagé ou détruit 115 000 habitations, 97 institutions sanitaires et 1 250 écoles dans les départements du Sud, des Nippes et de la Grand'Anse.
Beaucoup de familles déjà vulnérables se sont appauvri davantage, et certaines d’entre elles ont été ciblées par un programme de transfert monétaire mis en œuvre par l’UNICEF et son partenaire l’ONG Care International. Dans ses souvenirs, Favot entend encore son téléphone sonner que le transfert est arrivé.
« J'ai reçu la notification alors que je travaillais dans mon jardin. Quand j'ai entendu le téléphone sonner « bling !», j'ai vérifié le solde de mon compte, je venais de recevoir de l'argent sur mon téléphone ! J'étais tellement heureux ! », raconte-t-il.
Grâce aux fonds Partenariat mondial pour l'éducation (GPE) et le Fonds fiduciaire multipartenaires (MPTF) des Nations unies pour la lutte contre la COVID-19, l'UNICEF a fourni des revenus supplémentaires à 1.000 familles vulnérables durement touchés par le tremblement de terre dans le sud-ouest d’Haiti, par le biais de transferts monétaires à usages multiples, afin de les aider à accéder aux services de base.
Un père responsable
Dès qu’il a reçu le cash, Favot s’est empressé de payer les frais scolaires et médicaux de ses enfants. « Je devais de l'argent pour les frais de scolarité de mes enfants. J'ai pu en payer une partie pour qu'ils puissent continuer à aller à l'école. Mais ils étaient aussi touchés par une fièvre typhoïde et le paludisme. Alors, j'ai utilisé ce qui restait pour les emmener à la clinique ».
Favot est un père responsable qui a su utiliser l’assistance financière qu’il a reçue à bon escient, en priorisant l’accès aux droits de ses enfants, et s’employer à rétablir le bien-être familial. Il a des ambitions encore plus grandes de se mettre en coopérative avec ses voisins agriculteurs et produire plus, pour gagner plus. Dolcat quant à elle, caresse le rêve de faire au moins trois métiers après ses études.
« J'aimerais devenir agronome, puis étudier pour être infirmière. J'aimerais aussi être enseignante », dit-elle.