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Haiti

Haïti Aperçu des Besoins Humanitaires 2022 (mars 2022)

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Contexte et impact de la crise

Régulièrement exposé aux aléas naturels et aux effets du changement climatique, Haïti fait face à des défis socio-économiques et politiques récurrents, ancrés dans des problèmes structurels profondément enracinés. En 2021, le pays a connu une détérioration profonde et inquiétante du contexte socio-économique, politique et sécuritaire. Aggravés par la pandémie de COVID-19 et un tremblement de terre de magnitude 7,2 qui a touché plus de 800 000 personnes le 14 août, les besoins humanitaires se sont accrus, en particulier dans la région Sud du pays.

Les activités des gangs armés dans la zone métropolitaine de Port-au-Prince, ont entraîné le déplacement de plus de 19 000 personnes depuis août 2020, et ont pris de l'ampleur après l'assassinat du Président Jovenel Moïse le 7 juillet 2021. Cela a compromis l'accès humanitaire, notamment sur la route nationale 2 qui donne accès aux départements de la péninsule Sud touchés par le séisme, et qui est, au niveau de Martissant, régulièrement sous le contrôle de gangs armés et souvent le lieu de luttes territoriales. En octobre, les syndicats des transporteurs ainsi que la population ont manifesté leur mécontentement du fait de l'insécurité croissante.

Des gangs armés ont bloqué l'accès aux terminaux pétroliers de Port-au-Prince et ont considérablement entravé les distributions de carburants sur l’ensemble du pays entre mi-Octobre et mi-Novembre. Cette situation a gravement affecté le fonctionnement de la vie économique, des services de santé, des télécommunications, des transports publics, des services bancaires et des opérations humanitaires et de secours d'urgence.

De plus, l’inflation, les mauvaises récoltes dues à des précipitations inférieures à la normale, les tempêtes tropicales Elsa (juillet 2021) et Grace (août 2021) ainsi que le récent tremblement de terre du 14 août 2021, ont contribué à accroître la vulnérabilité du pays. En septembre 2021, environ 4,3 millions d'Haïtiens étaient en situation d'insécurité alimentaire aiguë, dont 1,3 million en situation d'urgence (IPC4), et les projections indiquent que ce nombre atteindra 4,6 millions en mars 2022. Avec quelque 1 250 écoles endommagées ou détruites par le séisme, une majorité des écoles du Sud du pays n'ont pas pu rouvrir pour la nouvelle année scolaire, alors que 300 000 enfants devaient retourner à l'école. Cette situation entraîne un retard dans le programme scolaire, un risque d'abandon et de retrait de l'école, mais également un risque accru de violence à l'encontre des enfants.

L'accès aux structures de soins est une préoccupation majeure. Les dommages causés aux structures de santé dans les zones touchées par le séisme limitent encore plus l'accès de la population aux services de santé, notamment aux soins obstétriques et néonataux d'urgence, dans un contexte déjà critique pour la santé maternelle (le taux de mortalité maternelle en Haïti est de 529 décès pour 100 000 naissances vivantes, le plus élevé de la région, selon l’EMMUS VI, 2016).

Le faible taux de vaccination contre la rougeole, l'hépatite et la polio (moins de 80% en 2021) expose les Haïtiens, notamment les enfants de moins de 5 ans, à diverses maladies et contaminations. Les faibles niveaux d'accès à l'eau potable provoquent la transmission de maladies diarrhéiques tout en aggravant la malnutrition aiguë.

A la fin du mois d'octobre 2021, Haïti comptait 23 406 cas avérés de COVID-19 et 658 décès (selon les rapports officiels du Ministère de la Santé Publique et de la Population, le MSPP). Même si le nombre de personnes infectées reste relativement faible par rapport à d'autres pays, la pandémie représente un risque majeur pour les structures de santé déjà affaiblies. Malgré un programme de vaccination lancé officiellement à la mi-juillet, Haïti détient le taux de vaccination contre la COVID-19 le plus faible des Amériques (0,6 %).

En 2021, quelque 102 448 personnes se sont retrouvées en situation de déplacement. Parmi elles, un total de 44 450 haïtiens ont été rapatriés en ou expulsés vers Haïti et 58 000 se sont déplacées à l’intérieur du pays en raison de l’insécurité (19 000) et suite au tremblement de terre (39 000).

En 2022, la situation humanitaire en Haïti sera influencée par l'évolution de la situation socio-économique, politique et sécuritaire du pays, en particulier la poursuite de la violence des gangs armés et les décisions relatives à la tenue des élections. Les facteurs à l'origine de la vulnérabilité de la population haïtienne en 2021 persisteront en 2022, avec plus de 4,9 millions de personnes (43% de la population) qui devraient avoir besoin d'une aide humanitaire.

L'insécurité et la violence devraient persister en 2022, avec des conséquences potentielles en termes de protection (y compris les violences basées sur le genre), de déplacement, d'insécurité alimentaire, de malnutrition et d'accès aux services de base. À cela s'ajoutent les aléas climatiques et les risques liés aux menaces naturelles qui impactent Haïti.

Si l'ensemble du pays est exposé à de multiples vulnérabilités, celles-ci s'intensifieront dans les zones où les facteurs de crise se chevauchent, comme dans les départements du Sud, des Nippes et de la Grand'Anse touchés par le séisme, ainsi que dans la zone métropolitaine de Port-au-Prince et les régions où l'insécurité alimentaire est élevée.

Causes profondes

Haïti traverse une période particulièrement difficile, marquée simultanément par la résurgence de l'insécurité, des tensions socio-politiques, une situation économique dégradée et des catastrophes dévastatrices liées aux aléas naturels. La juxtaposition de ces éléments et leurs causes profondes, complexes et multiformes, freinent la croissance socioéconomique et le développement durable du pays.

En termes de gouvernance, on notera la faiblesse des institutions, des faiblesses au niveau de la planification et du suivi stratégique ainsi que du pilotage des politiques publiques, notamment celles visant les populations les plus vulnérables. La quasi-absence de ressources financières, avec un espace fiscal très contraint, et des ressources humaines non exploitées à bon escient dans les institutions publiques limitent la capacité de l'État à offrir des services de qualité et à lutter contre la paupérisation de sa population. Cette situation ne favorise pas la progression du pays vers des changements de nature à améliorer le quotidien des populations. L'impunité et la corruption, avec comme corollaire l'évasion fiscale, ne régressent pas et ont un impact négatif sur le paysage socioéconomique, en raison de l'absence de mécanismes forts et adéquats pour assurer le contrôle et établir les responsabilités afin de décourager ces pratiques et promouvoir la bonne gouvernance.

Avec un produit intérieur brut (PIB) par habitant de US$ 1 149 et un indice de développement humain de 0.510, soit 170 sur 189 pays en 2020, Haïti reste le pays le plus pauvre d'Amérique latine et des Caraïbes, et compte parmi les pays les plus inégalitaires dans le monde. L’économie haïtienne fait face à des contraintes conjoncturelles et institutionnelles. Après trois années consécutives de croissance négative, l'économie haïtienne entre en récession. L'économie est affaiblie par des pratiques protégées, monopolistiques et privilégiées au bénéfice des élites commerciales qui misent principalement sur les importations et qui peuvent, parfois, instrumentaliser la violence pour bloquer les réformes. L’activité économique est largement entre les mains de quelques conglomérats (et familles). Cette situation accentue la pauvreté, non seulement en raison des prix élevés mais aussi parce que l’entrée de nouveaux entrepreneurs ou producteurs, potentiellement créatrice de richesses et d’emplois, est entravée par lesdites pratiques monopolistiques et renforcent les inégalités socioéconomiques.

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