L'ambassadeur Roberto Alvarez Gil souhaite l'intégration d'Haïti dans l'accord de libre-échange Etats-Unis-République Dominicaine-Amérique centrale
Lors de sa première intervention devant le Conseil permanent de l'Organisation des Etats américains jeudi à Washington, le nouvel ambassadeur dominicain à l'OEA, Roberto Alvarez Gil a affirmé haut et fort que "la crise que traverse Haïti actuellement représente un problème de sécurité nationale pour la République Dominicaine".
Le diplomate a reconnu que "l'avenir de son pays est étroitement lié à celui d'Haïti, beaucoup plus qu'à n'importe quel autre pays de la région" ; une singularité géographique est à la base de cette communauté de destin, l'île d'Haïti ou Quisqueya étant, en effet, la seule de l'Amérique que se partagent deux pays (Haïti et la République Dominicaine).
Plus loin, l'ambassadeur Roberto Alvarez a tenu à préciser que l'interminable crise politique haïtienne coûte énormément à la République Dominicaine, avec notamment des tensions sociales et des pressions économiques préoccupantes qui se manifestent dans les régions frontalières. Beaucoup plus dans une perspective politique intelligente que dans un élan purement émotionnel et généreux, Alvarez a posé un geste historique en appelant les Etats-Unis, au nom de son pays, "à inclure Haïti dans le traité de libre-échange conclu avec les pays d'Amérique centrale et la République Dominicaine, le CAFTA-DR afin d'arriver à une réduction de l'extrême pauvreté qui sévit dans le pays".
Cet accord commercial sans précédent, parrainé notamment par le Président George W. Bush et le Sénateur républicain John McCain, a été approuvé jeudi par le Sénat américain avant de surmonter les nombreux obstacles qui l'attendent à la Chambre des représentants où la résistance des élus démocrates s'annonce particulièrement acharnée. Le CAFTA-DR qui, en cas d'approbation, dessinera un axe d'échanges commerciaux privilégiés entre Washington, la République Dominicaine, le Salvador, le Nicaragua, le Costa Rica, le Honduras et le Guatémala, constituera un marché de 44 millions de consommateurs qui selon la Maison Blanche, assurera "la promotion de la démocratie, de la sécurité et de la prospérité dans cette région du monde marquée par l'oppression et les dictatures militaires".
Plus loin, le représentant de Santo Domingo à l'OEA a indiqué que les efforts consentis par la communauté internationale "semblent disproportionnés aux besoins et défis énormes auxquels doit faire face Haïti". Cependant, il a adressé ses remerciements aux pays d'Amérique latine et de la Caraïbe qui, avec un esprit de sacrifice, contribuent " à stabiliser et à pacifier le pays". Alvarez a salué au passage ce qu'il appelle "les énormes efforts déployés par l'ex-secrétaire général adjoint de l'OEA, l'américain Luigi Einaudi en vue de trouver une solution à la crise haïtienne" alors que sur le terrain, aux yeux de la plupart des acteurs politiques et sociaux, ce diplomate a depuis longtemps perdu ce qu'il lui restait encore de crédibilité.
Sur l'épineuse question de la drogue, l'ambassadeur dominicain a indiqué " qu'un important flux de stupéfiants passe régulièrement de la Colombie à Haïti, pour cheminer vers les Etats-Unis et l'Europe" décernant du même coup un satisfecit à l'armée dominicaine qui, à son avis, "contrôle la frontière avec Haïti de manière vigilante"
Sur un autre plan, Roberto Alvarez a relevé qu'Haïti est confrontée à des problèmes d'ordre épidémiologique extrêmement alarmants qui peuvent mettre en péril tout processus de développement durable.
Le diplomate dominicain a conclu son plaidoyer pour Haïti devant le conseil permanent de l'Organisation panaméricaine en prônant l'organisation d'élections générales dans le but de juguler définitivement la crise, soulignant que le pays a besoin d'abord d'assurer la sécurité de ses citoyens avant d'engager des réformes politiques permanentes.
C'est l'une des rares interventions dosées d'un officiel dominicain en faveur d'Haïti sur la scène internationale, même si pour l'essentiel, le tableau sombre, données à l'appui, dressé par l'ambassadeur Roberto Alvarez Gil, risque d'enfoncer davantage notre pays dans la catégorie des cendrillons de la planète.