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Haiti

Dépister la malnutrition à domicile en période de Covid-19

Des mères apprennent l’usage du périmètre brachial pour dépister la malnutrition à domicile

Jean Panel Fanfan

11 septembre 2020

Au lieu de se rendre au centre de santé et risquer de s’exposer à la propagation de la COVID-19, des mères apprennent l’usage du périmètre brachial pour dépister la malnutrition à domicile. Ce projet de l’UNICEF exécuté par l’ONG Action contre la faim (ACF) est financé par la Direction générale pour la protection civile et les opérations d'aide humanitaire européennes de la Commission européenne (ECHO) et en appui au Ministère de la santé publique et de la population (MSPP).

Le visage de Saint-Louis Cédeline, 23 ans, devient triste et sombre quant elle parle de la condition de son enfant, atteinte de malnutrition aigüe. Tous les symptômes de la maladie sont là, l’enfant accuse une très faible croissance pour son âge. Elle lui donne son bain de manière délicate, car l’enfant est très fragile.

« Quand j'ai de l'argent, je lui donne à manger trois fois par jour et je la lave délicatement car elle a aussi de graves problèmes de peau. J’applique des lotions sur tout son corps. Elle dort sur des draps propres. Je prends soin d’elle pour qu'elle soit en bonne santé », explique Cédeline. Cependant les choses ne sont pas toujours faciles. Parfois, elle passe de longues nuits sans sommeil à prendre soin de l’enfant qui n’arrive pas à dormir. « Je dois la consoler toute la nuit », murmure-t-elle.

Cédeline habite à Palant, une localité située au Nord-Ouest d’Haiti. La mère de deux enfants a vu le nouveau coronavirus affecté sa famille, considérablement. Son mari, un pêcheur, n’arrive plus à vendre son poisson comme auparavant. « Avant, les touristes arrivaient ici et les hôtels achetaient beaucoup de poisson », lâche-t-elle dans un souffle. « Aujourd’hui, les gens n’achètent plus et trop peu d’argent arrive à la maison ».

En période de Covid-19, elle a appris comment prendre le périmètre brachial de son enfant, ce qui lui évite de se rendre trop souvent au centre de santé et de s’exposer ou d’exposer son enfant au virus. Les infirmières du centre de santé lui ont donné les conseils pour prendre soin de son bébé. Elle a aussi reçu du plumpy nut, un aliment thérapeutique prêt à l’emploi fait à base de pate d’arachide, pour nourrir régulièrement sa petite fille. « Pour le moment, l’indicateur est entre le rouge et le jaune », dit-elle. Tant que le périmètre brachial affiche jaune ou rouge, l’enfant souffre de malnutrition aigüe sévère et a besoin de soins. « J’ai bon espoir qu’un jour, il va tomber dans le vert et que mon enfant sera guéri », espère-t-elle.

Au service de la communauté

Louise Béthanie, les yeux vifs et la voix assurée, est la mère-leader qui a appris a Cédeline à dépister la malnutrition chez sa fille. Chaque jour, elle va de maison à maison pour montrer aux mères comment prendre le périmètre brachial, à l’aide d’un ruban tricolore pour dépister la malnutrition chez les enfants. « J’apprends aux mères à prendre le périmètre brachial de leurs enfants. Si l’indicateur s’arrête sur la zone rouge ou jaune, la situation est grave et l’enfant est référé au centre de santé immédiatement. S’il est sur le vert, je félicite les parents et je les encourage à ne pas laisser l’enfant tomber dans la malnutrition », explique-t-elle.

A l’apparition des premiers cas de COVID-19 dans le pays, il y a eu une forte baisse des activités institutionnelles et communautaires. Car les parents avaient peur de fréquenter les institutions sanitaires et contracter le virus, alors que les agents de santé et les prestataires n’avaient pas le matériel de protection requis. Grace a un financement d’ECHO, l’UNICEF et l’ONG Action contre la faim (ACF) ont formé des mères-leaders pouvant former d’autres mères à dépister la malnutrition de leurs enfants.

Certes, Béthanie a une volonté innée d’aider son prochain, son dévouement est renforcé par la disponibilité des soins. « J’ai choisi sensibiliser sur la malnutrition parce que j’ai trouvé une institution qui prend les enfants en charge. Sinon, même si j’avais sensibilisé les parents sur comment nourrir les enfants, ils n’auraient pas les moyens de leur donner la nourriture adéquate », souligne-t-elle.

Réduire les visites au centre de santé pour protéger les mères

« L’UNICEF appuie plusieurs partenaires dans l’accompagnement des activités communautaires, notamment dans la formation de mères-leaders qui apprennent à d’autres femmes comment prendre le périmètre brachial », explique Erline Mesadieu, spécialiste en nutrition à l’UNICEF. « Ainsi les mères peuvent faire le suivi nutritionnel de leurs enfants et leur donner le plumpy nut, si nécessaire ».

Même si la pandémie à coronavirus prévaut encore, les enfants malnutris doivent continuer de bénéficier de soins leur permettant de jouir d’une bonne santé. Cette innovation, simple mais efficace, a permis de réduire les visites aux institutions sanitaires et protéger les mères et les enfants contre la COVID-19.