Cet après-midi, le Conseil de sécurité tient une séance d’information sur Haïti avec l’intervention de la Représentante spéciale María Isabel Salvador, qui dirige le Bureau intégré des Nations Unies en Haïti (BINUH). Mme Fathi Waly, Directrice exécutive de l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime (ONUDC), fera également une présentation.
Le Conseil est saisi du rapport du Secrétaire général sur le Bureau intégré des Nations Unies en Haïti (S/2025/28).
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LA QUESTION CONCERNANT HAÏTI S/2025/28
Exposés
La Directrice exécutive de l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime (ONUDC), Mme GHADA FATHI WALLY, a indiqué que les différentes coalitions de gangs tentent toujours d’étendre leur contrôle sur des territoires stratégiques, tout en se livrant à des confrontations meurtrières avec la population et les forces de l’ordre. Les gangs recourent à des tactiques de plus en plus brutales, comme en témoignent les massacres horribles, dont celui de 115 personnes par le gang Gran Grif, au mois d’octobre dernier, dans le département de l’Artibonite, ou encore l’exécution de plus de 200 personnes dans le quartier de Wharf Jérémie, au mois de décembre.
L’expansion territoriale de ces gangs résulte d’une action calculée, plutôt que d’une violence arbitraire, dans le but de contrôler les ressources, en collaboration avec les élites politiques et économiques. Aujourd’hui, ces gangs se partagent environ 85% de Port-au-Prince et leur emprise sur le pays est facilitée par le trafic illicite d’armes, de drogues et autres ainsi que par la corruption et le blanchiment d’argent, comme le démontre le sixième rapport de l’ONUDC.
Parmi les développements les plus notables, la Directrice exécutive a pointé le gang Viv Ansanm qui a intensifié ses attaques et pris le contrôle de zones clefs dans et autour de Port-au-Prince. Malgré l’embargo, armes et munitions continuent d’affluer en Haïti et de tomber entre les mains des gangs. L’itinéraire de ce trafic change. Au cours de la période considérée, les saisies d’armes ont été principalement signalées à Port Everglades, et non à Miami, alors qu’en Haïti, la plupart de ces saisies ont été signalées à Cap-Haïtien, et non à Port-au-Prince.
L’ONUDC réclame donc le renforcement des capacités pour enregistrer, contrôler et tracer les armes et les munitions en Haïti, y compris les armes saisies et les stocks privés. Il réclame aussi le renforcement des contrôles maritimes et terrestres entre Haïti et la République dominicaine, grâce à des équipements, des ressources humaines et un meilleur partage des informations. Des contrôles plus stricts sont nécessaires sur les navires qui quittent la Floride pour Haïti, mais aussi aux Bahamas et aux Îles Turques et Caïques, devenus points de transit.
Au cours des dernières décennies, Haïti est devenue une plaque tournante du trafic de drogue, et les preuves suggèrent qu’un petit groupe d’individus conserve une influence considérable sur ce commerce depuis les années 80. Il s’agirait d’anciens militaires haïtiens, d’agents des forces de l’ordre, de membres du Parlement et d’hommes d’affaires, opérant en Haïti et aux États-Unis, ainsi que dans d’autres pays de la région. Pour l’ONUDC, il est impératif de démanteler ce réseau profondément enraciné et selon certains rapports, des personnalités politiques et du secteur privé utiliseraient l’industrie de l’anguille et autres espèces sauvages pour blanchir les revenus de la drogue. Les autorités haïtiennes ont besoin d’aide pour s’attaquer à ce problème, a souligné la Directrice exécutive.
L’insécurité, l’instabilité et les difficultés économiques continuent de pousser les gens à fuir Haïti. La fermeture de l’espace aérien, les politiques anti-migratoires strictes de la région et la fermeture de l’aéroport international de Port-au-Prince incitent les Haïtiens à prendre plus de risques pour s’échapper, s’appuyant sur les passeurs clandestins qui empruntent des routes dangereuses vers la République dominicaine, les Bahamas, la Jamaïque ou les Îles Turques et Caïques, pour chuter aux États-Unis et au Canada.
Haïti vit également une augmentation alarmante de la traite des êtres humains, et en particulier de la traite des enfants par les gangs. Les lois doivent être appliquées de manière plus efficace par des forces de l’ordre formées et équipées. Sur une note positive, la Directrice exécutive a signalé qu’au mois de décembre, Haïti avait franchi une étape importante dans la lutte contre la corruption, avec la création d’un groupe de travail interinstitutionnel soutenu par l’ONUDC, en partenariat avec le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) et l’Organisation des États américains (OEA).
À suivre...