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Haiti

Bureau intégré des Nations Unies en Haïti - Rapport du Secrétaire général (S/2024/508)

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I. Introduction

1. Le présent rapport est soumis en application de la résolution 2692 (2023) du Conseil de sécurité, par laquelle celui-ci a décidé de proroger jusqu’au 15 juillet 2024 le mandat du Bureau intégré des Nations Unies en Haïti (BINUH), défini dans sa résolution 2476 (2019) portant création du Bureau. On y trouvera les principaux faits nouveaux survenus depuis le précédent rapport, daté du 16 avril 2024 (S/2024/310).

II. Politique et bonne gouvernance

Questions politiques

2. Alors que les groupes criminels continuent de s’en prendre aux institutions de l’État, la violence a un impact profond sur la gouvernance, sur tous les aspects de la vie quotidienne des Haïtiens et sur les opérations des Nations Unies. Malgré les graves problèmes de sécurité, les parties prenantes nationales ont beaucoup progressé dans la mise en œuvre de la déclaration adoptée à l’issue de la réunion tenue le 11 mars par la Communauté des Caraïbes, des partenaires internationaux et les parties prenantes haïtiennes, tout en préparant des dispositions transitoires en matière de gouvernance, notamment la nomination d’un Premier Ministre, la création et l’entrée en fonction officielle d’un Conseil des ministres et l’approbation des méthodes de travail du Conseil présidentiel de transition. Ce dernier a défini comme tâches prioritaires la lutte contre l’insécurité, l’appui aux opérations antigangs de la Police nationale d’Haïti et le renforcement des forces de sécurité nationales. Le Conseil et le nouveau gouvernement se sont réunis pour la première fois le 19 juin.

3. Le 16 avril, les membres du Conseil présidentiel de transition, qui avait été officiellement créé quatre jours plus tôt, ont été nommés par arrêté du Conseil des ministres. Les membres votants sont un ancien gouverneur de la Banque centrale d’Haïti, Fritz Alphonse Jean (représentant le Groupe de Montana), un ancien diplomate, Smith Augustin (représentant Engagés pour le développement/Résistance démocratique/Compromis historique), un avocat, Emmanuel Vertilaire (représentant Pitit Desalin), un ancien Président du Sénat, Edgard Leblanc fils (représentant le Collectif des partis politiques du 30 janvier 2023), un ancien sénateur, Louis Gérald Gilles (représentant les signataires de l’accord du 21 décembre 2022), l’homme d’affaires Laurent Saint-Cyr, et un ancien ministre, Leslie Voltaire (représentant le parti Fanmi Lavalas). Les membres sans droit de vote sont le pasteur Frinel Joseph (représentant les organisations de la société civile) et une cadre de l’administration publique, Régine Abraham (représentant la communauté interconfessionnelle), seule femme membre du Conseil présidentiel. Dans cet arrêté, le Conseil des ministre a également indiqué que le Conseil présidentiel de transition, qui serait présidé par un de ses membres choisi par consensus ou à la majorité, devrait remettre le pouvoir au président démocratiquement élu, au plus tard le 7 février 2026.

4. Conformément à la déclaration du 11 mars, le Premier Ministre, Ariel Henry, a démissionné officiellement dans une lettre adressée au Conseil des ministres le 24 avril. Le même jour, un arrêté a nommé le Ministre des affaires économiques et des finances, Michel Patrick Boisvert, Premier ministre par intérim jusqu’à ce qu’un nouveau premier ministre soit sélectionné.

5. Le 25 avril, le Conseil présidentiel de transition a été inauguré à Port-au-Prince. Le 30 avril, quatre groupes de parties prenantes (Engagés pour le développement/Résistance démocratique/Compromis historique, les signataires de l’accord du 21 décembre 2022, Pitit Desalin et le Collectif des partis politiques du 30 janvier 2023) ont annoncé la formation du Bloc majoritaire indissoluble, un groupe majoritaire au sein du Conseil présidentiel de transition. Le groupe a choisi M. Leblanc comme coordonnateur et désigné Fritz Bélizaire, ancien Ministre de la jeunesse et des sports (2006-2011), comme candidat au poste de premier ministre.

6. Dans une réaction contrastée, le 3 mai, le groupe de parties prenantes représentant la société civile au Conseil présidentiel de transition a pris acte de la décision de nommer M. Leblanc comme coordonnateur et de désigner M. Bélizaire comme candidat au poste de premier ministre, tout en appelant à l’unité entre les membres du Conseil. Le Groupe de Montana et le parti Fanmi Lavalas ont décrit la formation officielle d’un bloc majoritaire au sein du Conseil comme un acte de division visant à saper la recherche de consensus inscrite dans l’Accord politique pour une transition pacifique et ordonnée signé le 3 avril, et prôné la transparence dans la sélection du Premier Ministre. Plusieurs groupes de la société civile et plateformes politiques non représentés au Conseil ont réitéré leur proposition alternative consistant à désigner un juge de la Cour de cassation qui serait chargé de diriger la transition jusqu’à la tenue d’élections.

7. Le 7 mai, le Conseil présidentiel de transition a adopté une résolution exigeant une majorité qualifiée de cinq membres votants sur sept pour adopter les décisions importantes du Conseil, au lieu d’un consensus. Cette disposition a régi la sélection du Premier Ministre et des membres du Cabinet ministériel et sera utilisée pour nommer les membres du conseil électoral provisoire, les directeurs généraux et d’autres hauts fonctionnaires. Le Conseil présidentiel de transition s’est mis d’accord sur le principe d’une rotation de la présidence tous les cinq mois entre quatre de ses membres, du 7 mai 2024 au 7 février 2026, date à laquelle un président élu devrait être investi.

8. Le Conseil présidentiel de transition a entrepris de rechercher des candidats au poste de premier ministre et reçu plus de 100 candidatures entre le 13 et le 17 mai. Tous les candidats devaient fournir un certificat de bonne vie et mœurs, une déclaration fiscale et une déclaration de patrimoine dans un délai de 30 jours, ainsi qu’une déclaration de soutien de partis politiques ou d’organisations de la société civile adhérant à l’Accord politique du 3 avril. Le 28 mai, après avoir entendu les cinq candidats retenus, tous des hommes, le Conseil a choisi Garry Conille comme Premier Ministre, à l’unanimité des six membres votants présents. Alors que certains groupes politiques ont exprimé leur inquiétude face à ce qu’ils ont qualifié de manque de transparence dans le processus de sélection, d’autres parties prenantes de tous horizons ont salué la nomination de M. Conille et reconnu en lui une personnalité impartiale et compétente, qualifiée pour conduire le pays aux élections. Un certain nombre d’organisations de femmes, dont l’Alliance des organisations de la société civile pour la paix et l’autonomisation des femmes haïtiennes (AOSCPAFH), la Fédération des organisations des femmes pour l’égalité des droits humains (FEDOFEDH) et le Comité de suivi du dialogue inter-femmes, ont déploré que les femmes continuent d’être exclues de la vie politique et demandé que le quota minimum de 30 % de femmes dans la fonction publique, prévu dans la Constitution, soit appliqué, notamment au nouveau Cabinet, au niveau des directions générales de l’administration publique et dans le service diplomatique.

9. Dans un message vidéo diffusé le 30 mai, M. Conille s’est engagé à travailler avec le Conseil présidentiel de transition pour former rapidement un nouveau gouvernement et achever la mise en place des dispositions transitoires prévues dans l’Accord politique du 3 avril, dont la nomination d’un nouveau conseil électoral provisoire. Il a appelé à la cohésion et à l’unité nationales et encouragé les femmes et les jeunes professionnels expérimentés à participer au processus politique et à soutenir le travail des autorités de transition. Le 11 juin, l’arrêté nommant les 14 membres du Cabinet ministériel, dont quatre femmes, a été publié au journal officiel.

10. Le 16 mai, la Représentante spéciale du Secrétaire général pour Haïti et Chef du BINUH a examiné la résolution 2699 (2023) du Conseil de sécurité avec le Conseil présidentiel de transition. Dans cette résolution, le Conseil de sécurité a autorisé le déploiement de la Mission multinationale d’appui à la sécurité et demandé d’accroître la participation des femmes et des jeunes au processus politique. En coopération avec le Volontariat pour le développement d’Haïti, le BINUH a facilité une série de consultations entre les organisations de la société civile haïtienne sur les moyens de renforcer les travaux des membres sans droit de vote du Conseil présidentiel de transition sur les questions liées à l’inclusion politique, au dialogue national et aux élections.

11. Le 14 juin, M. Conille et la Représentante spéciale ont eu une conversation sur la situation du pays et la continuité du soutien apporté par l’ONU aux autorités de transition. M. Conille a souligné que cet appui devait être adapté aux priorités définies par le gouvernement, afin de garantir l’appropriation nationale.