Informing humanitarians worldwide 24/7 — a service provided by UN OCHA

Guinea

L'ombre persistante des violences domestiques en Guinée

Les Violences domestiques demeurent un défi majeur dans de nombreuses sociétés, y compris en Guinée. Pour mieux comprendre la réalité de cette problématique et les actions des entreprises pour y faire face, nous avons eu l'opportunité d'interviewer M. Camara B., un responsable étatique très engagé dans la lutte contre les violences en Guinée. Avec lui, nous avons exploré certaines questions d'intérêt général.

Quelle est votre évaluation de l'ampleur des violences domestiques en Guinée, en particulier en ce qui concerne les violences conjugales ?

L'évaluation de l'ampleur des violences domestiques en Guinée, en particulier les violences conjugales, est un sujet complexe. Les violences domestiques sont souvent sous-déclarées en raison de divers facteurs, tels que la stigmatisation, la peur de représailles et le manque de sensibilisation. Elles sont un problème grave et persistant en Guinée, qui touche principalement les femmes et les filles. Selon une enquête réalisée en 2019 par le Fonds des Nations Unies pour la population (UNFPA), 76% des femmes guinéennes ont subi au moins une forme de violence au cours de leur vie, et 53% ont été victimes de violences conjugales. Ces chiffres sont alarmants et témoignent d'un climat d'impunité et de discrimination qui favorise la perpétuation de ces violences. Les causes des violences domestiques sont multiples et complexes, mais elles sont souvent liées à des facteurs socio-culturels, économiques et juridiques. Parmi ces facteurs, on peut citer : Le poids des traditions et des normes sociales qui assignent aux femmes un rôle subalterne et inférieur à celui des hommes, et qui justifient la violence comme un moyen de contrôle et de discipline, la pauvreté et le manque de 'accès à l'éducation, à l'emploi, à la santé et à la justice, qui rendent les femmes plus vulnérables et dépendantes de leurs conjoints ou de leurs familles, l'absence ou l'insuffisance de lois spécifiques pour protéger les victimes de violences domestiques, ainsi que le manque de formation et de sensibilisation des acteurs judiciaires, policiers et médicaux, qui entravent la dénonciation, la prise en charge et la sanction des auteurs de ces violences.

Quelles catégories de la population sont les plus touchées par les violences domestiques selon vos observations ?

Les femmes mariées :

Parfois, les femmes mariées subissent des méchancetés de leur mari, mais on trouve souvent des excuses pour cela. Même quand des choses graves se passent, on blâme parfois des forces magiques. Parfois, une autre femme peut être méchante envers une femme mariée, surtout si elle prend le mari de cette femme. Certaines femmes disent qu'elles doivent faire tout ce que leur mari dit parce qu'il possède la clé du paradis, ce qui peut mener à des violences physiques. Dans certaines régions, les cas de violence évoqués concernent principalement des violations sur des filles.

Les filles et les personnes handicapées :

Les filles peuvent être victimes de violences sexuelles, où des gens utilisent des pièges pour les tromper. Par exemple, une fille peut être attirée dans une maison en construction et être menacée si elle dit quelque chose. Parfois, les pères peuvent abuser de leurs propres filles en prétendant que c'est pour résoudre des problèmes financiers. Les agresseurs sont souvent des membres de la famille ou des voisins, plus âgés que les victimes. Les filles cachent parfois ces violences par honte ou par peur de gâcher leur avenir. Pour faire face à cela, certaines personnes n'ient que quelque chose s'est passé, tandis que d'autres envoient les enfants vivre ailleurs. C'est difficile pour les victimes et leur famille de surmonter ces situations difficiles. Parfois, même les personnes handicapées sont victimes de viol, les agresseurs profitent de leur vulnérabilité.

Quelles initiatives de prévention sont actuellement mises en œuvre pour sensibiliser la population aux violences domestiques

Face à ce problème, il est essentiel de mettre en place des initiatives de prévention pour sensibiliser la population aux violences domestiques, et pour encourager les victimes à briser le silence et à demander de l'aide. Plusieurs actions sont actuellement menées en ce sens, par des acteurs publics, associatifs ou privés. Par exemple, le gouvernement a lancé en 2019 un Grenelle contre les violences conjugales, qui a abouti à la mise en place de plusieurs mesures, telles que la création de 1 000 lieux d'hébergement d'urgence pour les victimes, la généralisation du bracelet anti-rapprochement pour les auteurs de violences, ou encore la création d'un numéro d'écoute national. De même, des campagnes de communication sont régulièrement diffusées dans les médias, sur les réseaux sociaux ou dans l'espace public, pour sensibiliser le grand public aux violences domestiques, et pour inciter les témoins à réagir et à signaler les situations à risque. Par exemple, la campagne « Arrêtons-les » lancée en 2020 par le ministère chargé de l'égalité entre les femmes et les hommes, rencontrée en scène des situations de violences conjugales et invite les témoins à composer le 17 ou le 114. Enfin, des associations jouent un rôle majeur dans la prévention des violences domestiques, en proposant des actions de sensibilisation, d'information, d'accompagnement et de soutien aux victimes. Par exemple, l'association Femmes Solidaires organise chaque année une marche contre les violences faites aux femmes, le 25 novembre, journée internationale pour l'élimination de la violence à l'égard des femmes. Ces initiatives de prévention sont indispensables pour lutter contre les violences domestiques, qui constituent une atteinte aux droits humains et une entrave à l'égalité entre les femmes et les hommes. Il est important que chacun et chacune se sente concernée et impliquée dans cette cause, et que les victimes puissent trouver l'écoute, l'aide et la protection dont elles ont besoin.

Comment le gouvernement travaille-t-il avec des partenaires nationaux et internationaux pour aborder ce problème de manière proactive ?

Face à ce constat, il est urgent d'agir pour mettre fin aux violences domestiques en Guinée, en particulier aux violences conjugales. Pour cela, il faut : Renforcer le cadre juridique et institutionnel pour prévenir, réprimer et réparer les violences domestiques, en adoptant une loi spécifique sur cette question, en créant des structures spécialisées d'accueil et d'accompagnement des victimes, et en formant les professionnels concernés. Sensibiliser et mobiliser l'ensemble de la société guinéenne, notamment les dirigeants religieux, coutumiers et communautaires, les médias, les organisations de la société civile, les jeunes et les hommes, pour changer les mentalités et les comportements vis-à-vis des femmes et des filles, et pour promouvoir l'égalité entre les sexes et le respect des droits humains. Soutenir et autonomiser les femmes et les filles victimes de violences domestiques, en leur offrant des services adaptés de santé, d'éducation, d'insertion professionnelle et sociale, et en leur donnant la possibilité de faire valoir leurs droits et de se reconstruire. Les violences domestiques sont une atteinte à la dignité humaine et un obstacle au développement du pays. Il est temps que la Guinée se mobilise pour y mettre fin.

Comment les lois guinéennes actuelles abordent-elles les violences domestiques, en particulier les violences conjugales et quels sont les défis actuels ?

Les violences domestiques, en particulier les violences conjugales, sont des violations graves des droits humains qui touchent de nombreuses femmes et filles en Guinée. Selon un rapport de la société civile pour le 3ème cycle de l'EPU de la Guinée, publié en juillet 2019, 96% des femmes impliquées ont déclaré avoir subi des violences physiques, sexuelles ou psychologiques de la part de leur conjoint ou partenaire. En décembre 2021, Amnesty International et la Fédération internationale pour la Planification Familiale (IPPF) ont décrété des cas choquants de viol et de meurtre de filles dans l'espace de huit jours seulement, et ont appelé les autorités à renforcer les efforts pour prévenir et combattre la violence sexuelle. Quelles sont les lois guinéennes actuelles qui abordent ces problèmes ? La Guinée a ratifié plusieurs instruments internationaux et régionaux relatifs aux droits des femmes, tels que la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes (CEDAW), le Protocole à la Charte africaine des droits de l'homme. homme et des peuples relatifs aux droits des femmes en Afrique (Protocole de Maputo) et la Convention sur les droits de l'enfant (CDE). La Constitution guinéenne de 2010 reconnaît l'égalité entre les hommes et les femmes et interdit toute forme de discrimination fondée sur le sexe. Elle dispose également que les conventions internationales ratifiées par la Guinée font partie intégrante du droit interne. Toutefois, il existe un décalage entre les normes internationales et le droit positif guinéen. Le Code civil guinéen, qui date de 1983, contient des dispositions discriminatoires à l'égard des femmes, notamment en matière de mariage, de divorce, de filiation et de succession. Par exemple, il fixe l'âge minimum du mariage à 17 ans pour les filles et à 21 ans pour les garçons, il autorise la polygamie, il donne au mari le statut de chef du foyer conjugal et il limite le droit des femmes à hériter . Le Code pénal guinéen, qui date de 1998, ne définit pas clairement la violation ni les autres formes d'agression sexuelle. Il prévoit des peines allant de cinq à dix ans d'emprisonnement pour le viol, mais il permet au violeur d'échapper à toute sanction s'il épouse sa victime. Il ne criminalise pas les mutilations génitales féminines (MGF), qui sont pratiquées sur environ 97% des femmes en Guinée selon l'UNICEF. Face à ces lacunes juridiques, plusieurs organismes de la société civile ont plaidé pour l'adoption d'une loi spéciale sur la violence à l'égard des femmes. En 2012, un projet de loi a été élaboré avec l'appui technique et financier du Fonds des Nations Unies pour la population (UNFPA) et du Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l'homme (HCDH). Ce projet de loi vise à prévenir, réprimer et réparer les violences faites aux femmes et aux filles, qu'elles soient physiques, sexuelles, psychologiques ou économiques. Il définit le viol comme tout acte de pénétration sexuelle commis avec violence,contrainte ou menace sur une personne sans son consentement libre et éclairé. Il prévoit des peines allant de dix à vingt ans d'emprisonnement pour le viol, sans possibilité d'exonération par le mariage. Il interdit également les MGF, la violence conjugale, le harcèlement sexuel, le mariage forcé ou précoce, la dot abusive et toute autre forme de violence basée sur le genre. Il crée des mécanismes de protection et d'assistance aux victimes, tels que des ordonnances d'éloignement, des centres d'accueil et d'écoute, des unités spécialisées au sein des forces de sécurité et de la justice. Malheureusement, ce projet de loi n'a pas encore été adopté par le Parlement guinéen. Il a été soumis au Secrétariat général du gouvernement en 2013, puis transmis à la Commission nationale des droits humains en 2014. Il a ensuite été examiné par le Comité interministériel chargé de l'harmonisation des textes législatifs et réglementaires en 2015. est en attente de validation par le Conseil des ministres, avant d'être soumis au vote des députés. Les raisons de ce retard sont multiples : manque de volonté politique, résistance des acteurs religieux et coutumiers, faible mobilisation des organisations féminines, instabilité politique et sociale, etc. En conclusion, les lois guinéennes actuelles abordent de manière insuffisante les violences domestiques, en particulier les violences conjugales. Il est donc urgent que le Parlement guinéen adopte le projet de loi sur la violence à l'égard des femmes, qui constitue un outil juridique essentiel pour protéger les droits et la dignité des femmes et des filles en Guinée.les lois guinéennes actuelles abordent de manière insuffisante les violences domestiques, en particulier les violences conjugales. Il est donc urgent que le Parlement guinéen adopte le projet de loi sur la violence à l'égard des femmes, qui constitue un outil juridique essentiel pour protéger les droits et la dignité des femmes et des filles en Guinée.les lois guinéennes actuelles abordent de manière insuffisante les violences domestiques, en particulier les violences conjugales. Il est donc urgent que le Parlement guinéen adopte le projet de loi sur la violence à l'égard des femmes, qui constitue un outil juridique essentiel pour protéger les droits et la dignité des femmes et des filles en Guinée.

Quelles sont les structures de soutien actuellement disponibles pour les victimes de violences domestiques en Guinée ?

Face à cette situation, il existe des structures de soutien qui offrent aux victimes de violences domestiques des services d'écoute, d'orientation, d'accompagnement, de protection et de prise en charge. Ces structures sont à la fois publiques et privées, et travaillent en réseau pour renforcer leur efficacité et leur coordination. Parmi les structures publiques, on peut citer :

Le Ministère de l'Action Sociale, de la Promotion Féminine et de l'Enfance, qui est chargé de la mise en œuvre de la politique nationale de lutte contre les violences basées sur le genre (VBG), et qui dispose d'un service d'écoute et d'orientation des victimes au sein de ses directions préfectorales et communales, le Ministère de la Justice, qui assure la protection juridique des victimes et la répression des auteurs de violences domestiques, à travers les tribunaux, les parquets, les commissariats et les brigades de gendarmerie. Le Ministère a également mis en place des cellules d'assistance judiciaire gratuite pour les femmes victimes de violences dans certaines localités, le Ministère de la Santé, qui offre des soins médicaux et psychologiques aux victimes de violences domestiques, notamment dans les centres hospitaliers universitaires ( CHU), les centres hospitaliers régionaux (CHR), les centres médicaux communaux (CMC) et les centres de santé. Parmi les structures privées, on peut citer :

– Les organisations non gouvernementales (ONG) nationales et internationales, qui mènent des actions de sensibilisation, de prévention, d'appui et de plaidoyer contre les violences domestiques. Certaines ONG disposent également de centres d'accueil et d'hébergement pour les femmes victimes de violences. Par exemple, l'ONG F2DHG a lancé en mars 2021 un projet de lutte contre les violences faites aux femmes en période de Covid-19, qui vise à renforcer les capacités des acteurs locaux et à offrir un soutien psychosocial aux victimes.

– Les associations féminines, qui regroupent des femmes engagées dans la défense des droits des femmes et la promotion du genre. Certaines associations sont spécialisées dans l'accompagnement des femmes victimes de violences domestiques. Par exemple, l'Association des Femmes Victimes de Violences Conjugales, créée en août 2023 par Banouna Diallo, une femme divorcée et victime de violences conjugales, qui vise à contribuer à la diminution des violences conjugales dans la communauté.

– Les médias, qui jouent un rôle important dans la sensibilisation du public et la dénonciation des cas de violences domestiques. Certains médias ont mis en place des émissions spéciales ou des rubriques dédiées aux questions liées à VBG. Par exemple, Guineematin.com est un site d'information en ligne qui traite régulièrement des sujets relatifs aux violences faites aux femmes. Ces structures de soutien sont essentielles pour aider les femmes victimes de violences domestiques à sortir du cycle de la violence et à retrouver leur dignité et leur autonomie. Toutefois, elles font face à plusieurs défis, tels que le manque de moyens financiers et matériels, le faible accès à l'information et aux services, la stigmatisation sociale et culturelle, l'impunité des auteurs ou encore le manque de coordination entre les différents. acteurs. Il est donc nécessaire de renforcer ces structures, de les rendre plus accessibles et plus visibles, et de les appuyer dans la mise en œuvre de la stratégie nationale de lutte contre les VBG, adoptée en 2017 par le gouvernement guinéen.