Contexte
Depuis le début de l'année 2025, la situation sécuritaire et humanitaire dans l’est de la République démocratique du Congo, en particulier dans les provinces du Nord-Kivu, Sud-Kivu, Ituri et Tanganyika, suscite une vive préoccupation. L’actualisation de l’analyse du Cadre intégré de classification de la sécurité alimentaire (IPC) de mars 2025 révèle une aggravation alarmante de l’insécurité alimentaire, avec plus de 10,3 millions de personnes en situation d’insécurité alimentaire aiguë (Phases 3 et 4). Parmi elles, 7,9 millions se trouvent en situation de crise (Phase 3) et 2,3 millions en situation d’urgence (Phase 4) (IPC, 2025).
Dans le Nord-Kivu et le Sud-Kivu, les groupes armés tels que l’Alliance Fleuve Congo et le Mouvement du 23 mars (M23), soutenus par les forces de défense rwandaises, ont étendu leur domination sur de vastes territoires, établissant des administrations parallèles, notamment à Goma et à Bukavu. Les populations, contraintes de retourner dans des zones où leur sécurité n’est pas assurée ou confrontées à une seconde vague de déplacements, se retrouvent dans une situation critique (OMS, 2025). La fermeture de l’aéroport de Goma, après sa prise de contrôle par le M23 fin janvier 2025, complique l’acheminement de l’aide humanitaire (OIM, 2025). De plus, la raréfaction des stocks de produits sanitaires, la destruction de nombreux camps de déplacés et le pillage des entrepôts humanitaires aggravent la crise. La situation s’est également détériorée dans le territoire de Kalehe et la zone de santé de Minova où plus de 200 000 personnes déplacées ont cherché refuge (OCHA, 2025).
En Ituri, la tension demeure élevée en raison d’affrontements fréquents entre les forces gouvernementales et divers groupes armés. Bien que les efforts de désarmement aient conduit à la reddition de certains combattants, la violence persiste. En Ituri, 33 pour cent de la population est en Phase 3 ou plus de l’IPC en mars 2025. Moins médiatisée, la province du Tanganyika ne fait pas exception et connaît également des violences intercommunautaires et des attaques de groupes armés, qui contribuent à l’aggravation de la crise humanitaire. En raison de la recrudescence des conflits, la dynamique des déplacements a fondamentalement changé dans l’est de la République démocratique du Congo.
À la mi-mars 2025, l’offensive du M23 avait contraint au déplacement environ 1 150 000 personnes, tandis qu’environ 1 790 000 autres personnes déplacées avaient dû retourner vers leur lieu d’origine suite à la fermeture forcée des camps de déplacés dans le Nord-Kivu et le Sud-Kivu (OIM, 2025). Dans le seul Nord-Kivu, plus de 750 000 personnes déplacées ont quitté Goma, Nyiragongo, Masisi et Rutshuru pour retourner dans leur lieu d’origine ou être, de nouveau, déplacées. Les personnes de retour sont confrontées à de nombreux défis supplémentaires, dont l’accès à la terre, au logement, à la nourriture, à l’eau et aux soins de santé, ainsi qu’au coût élevé du rétablissement de leurs moyens d’existence dans une situation sécuritaire hautement imprévisible.
Les conditions de vie dans les camps de déplacés restent précaires, avec un accès limité à la nourriture, à l’eau potable et aux soins de santé. La perturbation des activités agricoles et commerciales a eu de sévères conséquences sur la sécurité alimentaire et les moyens d’existence des ménages, augmentant ainsi la vulnérabilité des populations locales.