Alors qu'une semaine s'est écoulée depuis l'attaque et l'occupation de l'aéroport de Mbandaka, chef-lieu de la province nord-occidentale de l'Équateur, et de plusieurs édifices publics, il semblerait que les quelque 60 insurgés Enyeles impliqués dans les faits appartiennent à un groupe appelé Armée Nzobo ya Lombo, sous commandement d'un certain Ibrahim Mangbama. Le ministre congolais de la Communication Lambert Mende soutient que les assaillants Enyeles auraient été soutenus par d'anciens militaires de la garde de feu le président Mobutu, des soldats réguliers démobilisés, des membres de la garde de l'ancien vice-président Jean-Pierre Bemba - actuellement détenu par la Cour pénale internationale (Cpi) - et des députés des assemblées tant provinciale que nationale qui auraient déjà été identifiés et arrêtés. Le quotidien belge Le Soir fait état de son côté d'infiltrations étrangères : "Au vu des méthodes utilisées par les assaillants, disciplinés et organisés, au vu surtout des équipements dont ils disposaient (armes lourdes, matériel de communication dont téléphones satellites thurayas adaptés aux combats en forêt) la thèse d'une révolte de simples pêcheurs a rapidement été abandonnée : en réalité, la capitale de l'Equateur a été attaquée par des militaires formés, professionnels et bien équipés, qui disposaient sans doute de complicités locales et d'appuis extérieurs", indique-t-il. La prise de l'aéroport et d'édifices gouvernementaux semble en effet confirmer la thèse d'ingérences externes : "À Kinshasa la situation dans la province de l'Équateur est prise très au sérieux et nul ne se hasarde plus à évoquer une révolte purement locale : il est question d'appuis extérieurs dont le mouvement bénéficierait dans les pays voisins, mais aussi en Europe (en Grande Bretagne, au Luxembourg, en Belgique) et l'on craint, d'ici le 30 juin prochain, d'autres tentatives de déstabilisation soigneusement planifiées", ajoute le quotidien belge. Cette théorie souligne le passage en l'espace de quelques mois de combats sporadiques entre les groupes Enyele et Monzaya pour le contrôle des réserves d'eau de la zone de Dongo entre octobre et novembre 2009 à une attaque soigneusement planifiée à des fins plus politiques. En ville, 90 détenus se sont échappés de prison, profitant de la confusion générée par l'assaut, tandis que des milliers d'habitants ont préféré s'enfuir pour se réfugier dans des villages voisins. En revanche, ceux qui ont décidé de rester à Mbandaka ont vu grimper le prix des aliments et des médicaments depuis que le trafic fluvial a été suspendu par crainte de nouvelles attaques des Enyeles par l'Oubangui, empêchant de fait le ravitaillement de la ville. Dénonçant les méthodes "terroristes" employées par les rebelles, le Conseil supérieur de la défense qui s'est tenu à Mbandaka en présence du président Joseph Kabila a adopté des mesures visant à renforcer la sécurité dans la région et salué le courage de la population et des soldats congolais. En attendant, le procès des militaires et policiers accusés de pillages et violences continue. Une condamnation au renvoi des forces armées et à la peine capitale a déjà été émise contre Rocha Nkonemboyo. Enfin le ministre Mende a accusé la mission locale de l'Onu (Monuc) de non-assistance en personne en danger : "On nous dit qu'ils sont ici pour protéger les civils. Ils avaient une mitrailleuse déployée, les faits se passaient à 25 mètres de la guérite où se trouve déployée la mitrailleuse, ils ont assisté à la mort d'une personne comme à un match de football", s'est-il insurgé, alors que le gouvernement a récemment sollicité les Nations Unies de considérer le départ du Congo des casques bleus. (Véronique Viriglio)