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DR Congo

RD Congo : songer à l'après-Monuc

La Monuc ne va pas s'éterniser en République démocratique du Congo. Prorogé tous les six mois, son mandat cessera de l'être au plus tard le 31 décembre 2009. Les autorités congolaises le savent. C'est dans cette perspective que des organisations humanitaires chargées de la prévention des conflits vont se réunir la semaine prochaine à Kinshasa, en vue d'examiner la situation sécuritaire prévalant dans l'Est du pays. De leurs échanges, dépendra une nouvelle prorogation de la présence des forces onusiennes en RDC.

Le gouvernement doit déjà songer à l'après-Monuc et s'intéresser au niveau d'application de la cinquantaine de résolutions que le Conseil de sécurité a, de 1997 à 2008, adoptées pour la RDC. En créant la Monuc le 30 novembre 1999 par sa résolution 1291, le Conseil de sécurité a suscité au sein des populations congolaises des espoirs qui, au fil des mois et des années, se sont malheureusement effrités. Tant et si bien que le peuple, désappointé par l'attitude jugée « attentiste » des soldats onusiens face aux exactions des milices locales et étrangères, en est arrivé à les soupçonner de « complicité avec l'ennemi ». Dans cette confusion, les déclarations des autorités congolaises n'ont rien arrangé. Bien au contraire. Elles ont créé le doute dans l'entendement des Congolais sur la « volonté » et la « détermination » affichées de la Monuc de mettre un terme à la situation d'insécurité récurrente dans la province Orientale, au Nord et au Sud-Kivu.

Ainsi, d'abord contenue, l'ire populaire a explosé en « colère » lors des manifestations organisées dans la plupart des villes du pays. « No Nkunda no job » (Sans Nkunda, pas de travail) figure parmi les intentions prêtées aux soldats de la Monuc au Nord-Kivu, o=F9 Nkunda et ses hommes sont aux prises avec l'armée régulière.

CONTROVERSE AUTOUR DU MANDAT DE LA MONUC

A l'heure o=F9, fuyant les combats, les populations civiles se jettent sur les routes en direction des camps de déplacés internes vivant dans des conditions infrahumaines, des voix s'élèvent sur l'opportunité du maintien des forces onusiennes en RDC. La Monuc, qui doit son existence à l'Accord de paix signé à Lusaka (Zambie) en juillet 1999 par les parties congolaises belligérantes, doit-elle plier bagages ? Au-delà de toute spéculation, il y a une évidence : avec 17.000 hommes de troupe, la Monuc est onéreuse, elle coûte excessivement cher, son budget annuel étant évalué à un milliard de dollars américains. A sa création, la Monuc avait reçu missions respectives d'appliquer l'Accord de Lusaka, d'observer toute violation dans le chef des parties en présence, de veiller au processus du DDRRR (désarmement, démobilisation, rapatriement, réinstallation et réinsertion) et de faciliter la transition politique conduisant à l'organisation des élections voulues pacifiques, crédibles et transparents. Ensuite, sa mission a été renforcée pour protéger seulement les populations civiles et non faire l'usage de la force contre les parties belligérantes, sauf en cas de légitime défense. Ces étapes ayant été franchies, la Monuc n'a toujours pas quitté le sol congolais, donnant à penser qu'elle entend s'y incruster. Et comme les opérations de désarmement et de brassage des troupes autrefois belligérantes n'ont pas été exécutées dans les délais convenus, elle se trouve présentement prise dans les feux croisés des FARDC et des groupes armés. D'o=F9, l'interprétation controversée du chapitre VII de la Charte de l'ONU autorisant la Monuc à « utiliser tous les moyens nécessaires, dans la limite de ses capacités et dans les zones de déploiement de ses unités, pour dissuader toute tentative de recours à la force qui menacerait le processus politique, de la part de tout groupe armé, étranger ou congolais notamment les ex-FAR et Interahamwe, et pour assurer la protection des civils sous la menace imminente de violences physiques ». C'est parce qu'elle n'en a pas fait usage que la Monuc est en voie d'être disqualifiée. Aujourd'hui, la réflexion attendue devra porter sur la crédibilité de la mission de paix de l'ONU face aux réactions observées ces derniers mois contre la Monuc. Cela, du fait que lors de son dernier séjour à New York, Alan Doss, représentant spécial du Secrétaire général de l'ONU et responsable de la Monuc a plaidé pour un renforcement du dispositif militaire de la Monuc en vue de faire face à la dégradation de la situation sur le terrain. Notamment la reprise des combats et l'aggravation des conditions humanitaires. Aujourd'hui, plus de 1 million de personnes sont déracinées, sans assistance et vivant dans l'errance.

DE ZONE DE GUERRES EN ESPACE DE PAIX

De par son rôle historique dans la sous-région, la RDC a le devoir de se doter d'une diplomatie capable de faire passer les Grands Lacs de zone de guerres en espace de paix. L'Accord de Dar es-Salaam (Tanzanie), qu'elle a signé avec ses voisins de l'Est en 2004, lui en donne l'opportunité. Le Pacte de sécurité, de stabilité et de développement portant sur les Grands Lacs lui offre d'autres opportunités de règlement de conflit. Pour cela, la diplomatie congolaise ne manque ni de cadres compétents, ni d'éminents négociateurs. Il suffit de les inventorier et de mettre chacun à sa place. La réflexion initiée par le département de mission de paix du Conseil de sécurité des Nations Unies vise à placer le gouvernement congolais devant ses responsabilités. De se doter d'une « diplomatie courageuse » qui doit privilégier le dialogue dans la perspective de cette politique de bon voisinage sans pour autant aliéner les attributs de l'indépendance et de la souveraineté nationale.

Par ailleurs, le départ de la Monuc relancera naturellement la question de la structuration de l'armée et de son personnel. C'est ici aussi que le gouvernement devra s'atteler à accélérer l'exécution des projets y afférents, grâce à la contribution, jamais démentie, des partenaires extérieurs.

Au demeurant, cette réflexion portera à la fois sur la requalification du mandant de la Monuc, si prorogation y aura, mais à prévenir également les autorités congolaises que l'après-Monuc a débuté. Question de s'abstenir de tout subterfuge pour justifier certaines insuffisances. Les institutions nationales doivent assumer leurs responsabilités politiques. Quel qu'en soit le prix. Il est vrai, et il ne faut plus se le cacher, le Conseil de sécurité a peur que la Monuc donne une « fausse illusion de sa mission de paix au Congo ». Les différentes réactions enregistrées à New York visent à faire l'état des lieux de cette mission de paix et si tout se passe conformément aux attentes des Congolais. D'autre part, les principaux bailleurs de fonds de la Monuc ont estimé que le moment est venu de mettre fin à cette mission. Ils n'ont plus le coeur à l'ouvrage de mettre la main à la poche devant les turpitudes congolaises qui s'enchaînent. Quand bien même la thèse d'un complot international ne serait pas à écarter. Mais, c'est aux Congolais en premier lieu de contrer ce complot et non de se résigner en victimes expiatoires.

Ce travail de réflexion constitue également une sonnette d'alarme pour que les autorités congolaises se dépouillent de cette attitude narcissique en se tournant toujours vers les partenaires extérieurs. L'heure a effectivement sonné pour qu'elles assument avec succès leurs obligations politiques et constitutionnelles. La Communauté internationale suivra. Alors, plus d'illusions.