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Mission de l’Organisation des Nations Unies pour la stabilisation en République démocratique du Congo - Rapport du Secrétaire général (S/2022/892)

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I. Introduction

1. Le présent rapport, soumis en application du paragraphe 55 de la résolution 2612 (2021) du Conseil de sécurité, porte sur les faits nouveaux qui se sont produits en République démocratique du Congo du 17 septembre au 30 novembre 2022. Il rend compte des progrès accomplis et des difficultés rencontrées dans l’exécution du mandat de la Mission de l’Organisation des Nations Unies pour la stabilisation en République démocratique du Congo (MONUSCO).

II. Évolution de la situation politique

2. La période considérée a été marquée par la session parlementaire consacrée aux questions budgétaires, aux préparatifs des élections et à la lutte contre l’insécurité dans l’est de la République démocratique du Congo dans un contexte de regain de tensions entre Kinshasa et Kigali.

3. Le 1er novembre, l’Assemblée nationale a déclaré recevable le projet de loi de finances pour 2023, dont le texte a été envoyé à la commission permanente Économie et finances de la chambre basse afin que les derniers ajustements y soient apportés. Dans le budget 2023, qui se chiffre à 14,5 milliards de dollars, soit une augmentation de 32,6 % par rapport au budget de 2022, un montant de 405 millions de dollars est prévu au titre des opérations électorales et du fonctionnement de la Commission électorale nationale indépendante, un montant de 1,5 million de dollars au titre du Programme de désarmement, démobilisation, relèvement communautaire et stabilisation (P-DDRCS) et un montant de 441 millions de dollars au titre du programme de développement des 145 territoires. Le Parlement a également examiné la loi de programmation militaire pour 2022-2025. Le 10 et le 14 novembre, respectivement, l’Assemblée nationale et le Sénat ont prorogé l’état de siège dans le Nord-Kivu et en Ituri pour une période de 15 jours, pour la trente-sixième fois.

4. Le 21 octobre, la Commission électorale nationale indépendante a lancé une campagne d’information et de sensibilisation à Kinshasa avant que le processus d’inscription sur les listes électorales ne débute, en décembre 2022, et une phase pilote vise à faire participer la diaspora congolaise en Afrique du Sud, en Belgique, au Canada, aux États-Unis d’Amérique et en France. Les Églises catholique et protestante ont conjointement demandé l’accréditation de 600 observateurs. Le 24 septembre, la Commission avait organisé son deuxième cadre de concertation avec les partis politiques, axé sur l’application de la nouvelle loi électorale et la révision du fichier électoral. Le 31 octobre, elle a reçu environ 1,7 million de cartes d’électeurs ainsi que du matériel logistique en vue de former son personnel.

5. Du fait de la reprise des attaques du M23 contre les Forces armées de la République démocratique du Congo (FARDC), le 20 octobre, et de la prise de contrôle de Kiwanja et de Rutshuru, le 29 octobre, les tensions se sont accentuées entre la République démocratique du Congo et le Rwanda, les autorités congolaises ayant accusé le Rwanda de fournir un appui au groupe armé. Le 29 octobre, la République démocratique du Congo a expulsé l’Ambassadeur du Rwanda et décidé de restreindre l’entrée des Rwandais dans le pays et de renforcer les FARDC tout en réaffirmant l’attachement de Kinshasa aux processus de Nairobi et de Luanda. La majorité des membres d’Ensemble pour le changement et de l’Union sacrée de la nation ont salué cette décision et ont demandé que l’Ambassadeur d’Ouganda soit expulsé en raison de son soutien supposé au M23. Le 30 octobre, le Gouvernement rwandais a fait savoir que les forces de sécurité rwandaises à la frontière congolaise avaient été placées en état de haute alerte. Le 8 novembre, l’Assemblée nationale de la République démocratique du Congo a déclaré que le M23 était un groupe terroriste et a adopté une recommandation visant à interdire les négociations avec les groupes armés et l’intégration des membres de ces groupes dans les forces de défense et de sécurité nationales.

6. Le 3 novembre, s’adressant à la nation, le Président de la République démocratique du Congo, Félix Tshisekedi, a demandé aux jeunes de s’enrôler dans l’armée et encouragé la création de groupes de vigilance en vue de renforcer l’action que l’armée mène contre le M23. Il a en outre prévenu que serait sévèrement puni tout acte de stigmatisation, de xénophobie et discours de haine dirigé contre les populations parlant le kinyarwanda. Il a rencontré des délégations des communautés tutsie et hutue congolaises, le 4 et le 10 novembre, respectivement, et affirmé qu’il était déterminé à faire en sorte que les Congolais vivent de manière pacifique dans la cohésion et sans discrimination.

7. Le 7 novembre, le Gouvernement rwandais a condamné une violation de l’espace aérien du Rwanda par un avion de chasse congolais. Les autorités congolaises ont déclaré que le survol n’était pas intentionnel. Le 19 novembre, une personne en tenue militaire aurait franchi la frontière congolaise à Goma. Elle a été tuée par balle par la Force de défense rwandaise, qui a demandé au Mécanisme conjoint de vérification élargi d’enquêter sur ces faits.

8. Les efforts diplomatiques visant à désamorcer les tensions se sont poursuivis. Le 20 septembre, à New York, en marge de la soixante-dix-septième session de l’Assemblée générale, le Président de la République française, Emmanuel Macron, a facilité une rencontre à l’appui du processus de Luanda entre le Président Tshisekedi et le Président de la République du Rwanda, Paul Kagame, qui se sont engagés à coopérer en vue de mettre fin aux activités du M23. Le 13 octobre, le Ministre angolais des relations extérieures, Tete António, a rencontré le Président Tshisekedi à Kinshasa et a annoncé que le général de corps d’armée angolais João Nassone dirigerait le mécanisme de vérification ad hoc établi dans le cadre de la feuille de route de Luanda. Les 29 et 30 octobre, le Secrétaire général s’est entretenu individuellement avec les Présidents de l’Angola, du Kenya, de la République démocratique du Congo et du Rwanda, ainsi qu’avec le Président du Sénégal, qui assure la présidence de l’Union africaine. Il a appelé à une désescalade immédiate et a réaffirmé que l’Organisation des Nations Unies soutenait les processus de Luanda et de Nairobi.

9. Le 5 novembre, à Luanda, les Ministres angolais, congolais et rwandais des affaires étrangères ont décidé d’accélérer la mise en œuvre de la feuille de route de Luanda. Le 9 novembre, les membres du mécanisme de vérification ad hoc ont été affectés à Goma. Le Président de la République d’Angola, João Lourenço, a rencontré le Président Kagame à Kigali, le 11 novembre, et le Président Tshisekedi à Kinshasa, le 12 novembre.

10. Le 7 novembre, en marge de la vingt-septième session de la Conférence des Parties à la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques, à Charm el-Cheikh (Égypte), les Présidents du Burundi, du Kenya, de la RépubliqueUnie de Tanzanie et du Rwanda, le Premier Ministre de la République démocratique du Congo, Jean-Michel Sama Lukonde, et le Secrétaire général de la Communauté d’Afrique de l’Est (CAE), Peter Mathuki, sont convenus de nommer un conseiller ou une conseillère technique représentant chacun des États partenaires en vue d’apporter un soutien au facilitateur du processus de Nairobi. Ils ont souhaité que ce processus soit mis en œuvre en harmonie avec la feuille de route de Luanda et ont réaffirmé qu’une coordination et des synergies entre la MONUSCO et la force régionale de la CAE étaient nécessaires. Le 8 novembre, les chefs d’état-major des forces armées de la CAE ont abordé la question du déploiement de la force régionale. Le commandant de la force de la MONUSCO a assisté à cette réunion pour discuter d’éventuels mécanismes de coordination.

11. Du 13 au 15 novembre, l’ancien Président de la République du Kenya, Uhuru Kenyatta, en sa qualité de facilitateur du processus de Nairobi dirigé par la CAE, s’est rendu à Kinshasa et à Goma, a rencontré le Président Tshisekedi et a tenu des consultations avec des parties prenantes au processus de Nairobi. Au cours de la visite de M. Kenyatta, la MONUSCO a aidé aux préparatifs de la troisième phase des consultations relatives au processus de Nairobi, qui devait démarrer le 27 novembre. Après sa visite, dans une déclaration publiée par le consulat du Kenya à Goma, M. Kenyatta a déploré la terrible situation humanitaire et la poursuite des combats, fait observer que le M23 n’avait pas respecté le mandat défini par les conclaves de Nairobi et a demandé que les parties respectent les engagements pris et que la communauté internationale et l’ensemble des partenaires prennent d’urgence des mesures en vue de faire face à la situation humanitaire. Le 18 novembre, il s’est entretenu par téléphone, individuellement, avec les Présidents du Burundi, de la République démocratique du Congo et du Rwanda.

12. Le 23 novembre, le Président Lourenço a organisé à Luanda un mini-sommet auquel ont participé le Président Tshisekedi, le Président du Burundi, Évariste Ndayishimiye, qui assure la présidence de la CAE, ainsi que M. Kenyatta. Le Rwanda était représenté par son ministre des affaires étrangères. La Représentante spéciale du Président de la Commission de l’Union africaine et Chef du Bureau de liaison de l’Union africaine en République démocratique du Congo ainsi que le Secrétaire exécutif de la Conférence internationale sur la région des Grands Lacs y ont également pris part. Les participants au mini-sommet sont convenus que des mesures seraient prises pour faire face à la situation dans l’est de la République démocratique du Congo et que serait notamment établi un calendrier pour la mise en œuvre des actions prioritaires visant la cessation des hostilités et le retrait immédiat du M23 des localités occupées et que les efforts déployés dans le cadre des processus de Luanda et de Nairobi seraient coordonnés.

13. La mise en place de la force régionale de la CAE s’est poursuivie : le quartier général de la force régionale a été installé le 5 novembre et le déploiement d’un bataillon kényan à Goma a commencé le 18 novembre. Le personnel de la Force de défense nationale du Burundi a continué d’opérer dans la province du Sud-Kivu dans le cadre de la force régionale et les Forces de défense populaires de l’Ouganda (UPDF) dans les provinces du Nord-Kivu et de l’Ituri au titre d’accords bilatéraux reconduits le 20 septembre. Le 18 novembre, les UPDF ont annoncé qu’un bataillon serait déployé dans le cadre de la force régionale de la CAE.

14. Le 5 octobre, le Président Tshisekedi s’est entretenu à Kinshasa avec les gouverneurs des provinces du Maï-Ndombe, du Kwilu et du Kwango au sujet d’un conflit intercommunautaire entre les Teke et d’autres communautés, principalement la communauté yaka, dans le territoire de Kwamouth (province du Maï-Ndombe). Le Gouvernement a par la suite créé trois sous-commissions composées de députés nationaux et provinciaux, de spécialistes de ministères provinciaux et de chefs religieux. Le 20 octobre, le Cardinal Fridolin Ambongo a présenté au Premier Ministre Sama Lukonde les résultats d’une mission d’établissement des faits qu’il avait menée dans la province du Maï-Ndombe et a prévenu que le conflit allait s’étendre à d’autres zones, notamment à Kinshasa.