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DR Congo

L’Est du Congo : la rébellion perdue des ADF-Nalu

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Nairobi/Bruxelles | 19 déc. 2012

L’approche militaire qui guide la lutte contre les groupes armés enracinés dans l’est de la République démocratique du Congo (RDC) tels que les ADF-Nalu doit être remplacée par une stratégie fondée sur le renseignement.

L’est du Congo : la rébellion perdue des ADF-Nalu, le dernier briefing de l’International Crisis Group, analyse comment les Forces démocratiques alliées-Armée nationale pour la libération de l’Ouganda (ADF-Nalu), un groupe armé congolo-ougandais, font preuve d’une remarquable résistance, grâce à leur position géostratégique, leur intégration dans l’économie transfrontalière et la corruption des forces de sécurité.

« Les ADF-Nalu sont l’un des groupes armés les plus vieux et les moins connus de l’est de la RDC et le seul qui soit considéré comme une organisation terroriste islamiste », selon Marc-André Lagrange, analyste principal de Crisis Group pour l’Afrique centrale. « Bien qu’il ne constitue pas une menace aussi déstabilisatrice que le Mouvement du 23 mars (M23), il est accusé d’avoir commis des actes terroristes en Ouganda et est parvenu à tenir tête à l’armée congolaise depuis 2010 ».

Issues de la fusion de plusieurs groupes armés en 1995 en RDC, les ADF-Nalu ont combattu le gouvernement ougandais de Yoweri Museveni mais n’ont jamais réussi à s’implanter dans ce pays. Ce mouvement d’origine ougandaise, composé de combattants chrétiens et musulmans, s’est implanté dans l’est du Congo, plus particulièrement dans la zone montagneuse et isolée du Rwenzori. Il s’est progressivement intégré au sein des communautés locales, a participé au commerce transfrontalier et a noué des relations avec différents groupes armés de la zone ainsi qu’avec les autorités civiles et militaires congolaises et ougandaises. Les ADF-Nalu se sont installées dans cette zone grise où l’autorité de l’Etat est traditionnellement faible et où les activités économiques illicites sont prospères.

Le secret de la résilience des ADF-Nalu n’est pas leur récente radicalisation islamiste mais leur intégration locale dans une zone frontalière stratégique qui leur a permis de survivre sans gagner de bataille pendant plus de quinze ans et de résister jusqu’à présent à toutes les tentatives de neutralisation.

Depuis que la composante Nalu a cessé le combat, le groupe est réduit aux rebelles des ADF. Neutraliser ce petit groupe bien intégré dans son environnement ne nécessite pas une solution militaire mais une stratégie fondée sur le renseignement. Les réseaux économiques et logistiques des ADF – en RDC et ailleurs dans le monde – devraient être identifiés, les chefs de ces réseaux devraient faire l’objet de sanctions des Nations unies et les militaires ougandais et congolais complices devraient être sanctionnés par leurs autorités respectives. Simultanément, une offre de réinsertion devrait être faite aux combattants des ADF qui n’ont pas commis de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité.

« Au lieu de lancer une énième offensive militaire, il serait plus efficace d’affaiblir la base socioéconomique de ce groupe armé et, en même temps, d’offrir une perspective de démobilisation et de réintégration à ses combattants », selon Thierry Vircoulon, le directeur du projet Afrique centrale de Crisis Group. « Dans l’est de la RDC, les groupes armés ne durent pas parce qu’ils sont particulièrement combatifs et rusés mais parce que la pauvreté est immense et l’Etat déficient ».