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DR Congo

Interview avec un nutritionniste du PAM dans l’est de la RDC

Crispin Mpigirwa est nutritionniste au PAM. Il travaille actuellement dans l’est de la République Démocratique du Congo (RDC) où les communautés doivent souvent abandonner leur maison en raison des violences récurrentes. Congolais d’origine avec plus de 15 ans d’expérience dans le secteur humanitaire, Crispin est un pilier clé des efforts du PAM pour lutter contre la malnutrition parmi les déplacés autour de Goma.

Voici 6 questions et réponses sur son travail en tant que nutritionniste à l’est de la RDC et l’impact du déplacement sur les familles qu’il rencontre au quotidien.

À quoi ressemble une journée type de travail ?

Je passe beaucoup de temps à essayer de comprendre l’état nutritionnel des déplacés dans la région. Je leur parle afin de savoir quels sont les aliments qu’ils consomment et d’identifier leur besoins nutritionnels prioritaires.

Je passe également beaucoup de temps dans les centres de nutrition et les cliniques. J’examine les déplacés qui viennent avec leurs enfants pour identifier leur état nutritionnel. Si ils sont sévèrement malnutris, je les envoie à l’hôpital afin d’être sûr qu’ils reçoivent bien les produits nutritionnels spécifiques à travers notre partenaire UNICEF. Je forme également nos ONG partenaires pour qu’elles puissent mieux aider les déplacés et qu’ensemble nous devenions plus efficace dans la lutte contre la malnutrition.

Quels sont les facteurs du déplacement ? Quand est-ce que les personnes décident de partir ?

Souvent le déplacement est une mesure préventive- les gens fuient leur maison car, ils ont entendu que le conflit se rapproche ou que les violences ont éclaté tout près de chez eux. Mais ce n’est pas toujours le cas. Si jamais ils se trouvent piégés par le conflit, ils attendent une accalmie avant de partir.

Quel est l’impact du déplacement chez les femmes, notamment les femmes enceintes et allaitantes ?

Une femme enceinte doit manger pour se nourrir mais aussi pour nourrir son enfant. Lorsqu’une femme enceinte ne reçoit pas la nutrition dont elle a besoin pour elle-même et le fœtus, elle devient malnutrie. Elle a des difficultés à allaiter. Dans les camps de déplacés, nous constatons souvent que les femmes enceintes qui ont dû fuir leur maison, il y a trois mois, sont touchées par la malnutrition.

Quel est l’impact sur l’éducation ? Les enfants déplacés peuvent-ils s’inscrire dans les écoles sur place ?

En RDC, ce sont les parents qui doivent payer les frais de scolarité. Par conséquent, la plupart des enfants déplacés abandonnent leurs études car leur famille n’a plus les moyens de payer leur scolarité.

Quelle est la réaction des populations locales à l’arrivée des déplacés ?

Il existe une volonté de soutenir et de s’entraider mais la communauté d’accueil est, elle aussi, démunie. Dans l’est de la RDC, le déplacement est un phénomène que les populations connaissent depuis plus de 15 ans. Elles ont développé leurs propres moyens d’aider les personnes vulnérables (femmes, personnes âgées, enfants, personnes handicapées) lors d’une crise.

Depuis combien d’années travaillez-vous dans le secteur humanitaire ? Qu’est-ce qui vous motive ?

Je travaille en tant qu’humanitaire en RDC depuis 15 ans et nonobstant les efforts de la communauté humanitaire, il y a toujours des personnes en besoin. Parfois, c’est frustrant car on a le sentiment que rien ne change malgré tous nos efforts. Mais je veux absolument continuer ce travail car il y a aussi des résultats encourageants. Je vois des enfants malnutris se remettre et rentrer chez eux. Je vois des femmes enceintes qui étaient sous-alimentées reprendre des forces. J’aime bien travailler avec la communauté humanitaire et aider les personnes en difficulté.