28.01.2025 - Communiqué de presse du Forum des ONG Internationales en République Démocratique du Congo
Les Organisations Non-Gouvernementales Internationales (ONGI) opérant en République Démocratique du Congo (RDC) expriment leur profonde préoccupation face aux conséquences des combats en cours dans la ville de Goma depuis dimanche, marqués par l’arrivée du M23/AFC soutenu par les forces de défense rwandaises, ainsi qu’à la détérioration rapide de la situation humanitaire au Nord et Sud-Kivu.
Malgré les défis et le confinement forcé de leur personnel, prêtes à apporter un soutien d’urgence, les ONGI restent déterminées à continuer à fournir une assistance au Nord et Sud-Kivu.
Les combats qui s’intensifient dans et autour de Goma ont englouti des zones densément peuplées, mettant en danger immédiat des dizaines de milliers de civils. D’importants engagements militaires en cours, notamment des tirs d’artillerie lourde et des armes légères, sont signalés aux abords de la ville. Les bombardements incessants et les tirs d'obus ont résonné dans tous les quartiers, amplifiant la peur parmi la population locale et les communautés déplacées.
De nombreuses infrastructures humanitaires, y compris des bureaux d’ONG, des centres de santé et des entrepôts, ont été directement touchées par les combats. Plusieurs organisations humanitaires ont vu leurs locaux bombardés et envahis par des combattants. Des postes militaires ont été installés à proximité de bureaux humanitaires, y compris en centre-ville.
Plusieurs installations humanitaires stockant des ressources essentielles pour soutenir la population ont été pillées. Les pillages et impacts d’obus ont encore réduit les stocks d’aide, compliquant les futures distributions. Les infrastructures civiles essentielles, telles que les établissements de santé, les écoles et les marchés, sont également attaquées ou menacées.
Toutes doivent être protégées, ainsi que les travailleurs humanitaires, conformément au droit international humanitaire.
Au cours des trois semaines précédant la bataille en cours à Goma, le conflit entre le M23/AFC, l'armée congolaise et leurs alliés avait déjà déplacé 400 000 nouvelles personnes, s'ajoutant aux 4,6 millions de déplacés victimes des violences persistantes dans l’est de la RDC. Les enjeux de protection, notamment les attaques contre les civils, les violences sexuelles et les violations des droits humains, ont atteint des niveaux alarmants.
À Goma et dans ses environs, la situation est critique. La ville, un centre névralgique pour plus de 2 millions de personnes, dont 696 650 déplacés internes (IDPs), a déjà accueilli près de 30 000 déplacés supplémentaires entre le 6 et le 22 janvier, un chiffre certainement dépassé depuis.
Bien que la situation à Goma reste extrêmement tendue et que les ONGI aient dû suspendre des opérations en raison de l'insécurité, elles se préparent à répondre aux besoins humanitaires croissants, malgré des ressources déjà largement insuffisantes.
Les hostilités contraignent de nombreuses familles à fuir les camps par manque de sécurité et à se regrouper en ville ou dans d'autres sites surpeuplés, aggravant encore leurs conditions de vie déjà précaires. Les attaques répétées contre les infrastructures critiques, notamment les réseaux électriques, paralysent de plus en plus l’approvisionnement en eau, laissant la ville sans accès à l’eau potable.
En tant que plaque tournante des opérations humanitaires dans la région, Goma joue un rôle clé dans la coordination et la fourniture de l’aide au Nord et Sud-Kivu, ainsi que dans une grande partie de l’est de la RDC. Le conflit en cours pourrait entraîner des conséquences catastrophiques, submergeant les ressources déjà limitées, perturbant la distribution de l'aide et compromettant l’ensemble de la réponse humanitaire dans la province.
"Une action diplomatique immédiate est impérative. Toutes les parties au conflit doivent respecter leurs obligations en vertu du droit international afin de protéger les civils, garantir leur liberté de mouvement et la sécurité des travailleurs humanitaires", déclare Luc Lamprière, Directeur du Forum des ONGI en RDC. "Les humanitaires sont présents et prêts. Un accès humanitaire sûr et sans entrave pour fournir une assistance vitale doit être une priorité absolue afin d’éviter une aggravation de la crise", ajoute Lamprière.
Les tirs près de l’aéroport de Goma et la situation sécuritaire globale dans d’autres zones ont entraîné la suspension de tous les vols, y compris humanitaires, limitant encore davantage le déplacement des travailleurs humanitaires et l’acheminement des secours. L’accès à Internet est extrêmement limité et sujet à des interruptions fréquentes. Au Nord et Sud-Kivu, l’accès humanitaire est désormais sévèrement restreint en raison de la violence généralisée et de l’insécurité qui ont rendu de nombreuses routes clés impraticables. Les routes vers des zones cruciales telles que Lubero sont bloquées par des affrontements et la présence de groupes armés, coupant l’accès à l’aide et laissant des milliers de personnes sans assistance.
À Minova, dans le Sud-Kivu, depuis que le M23 a pris le contrôle de la ville le 21 janvier, les stocks de médicaments essentiels s’épuisent rapidement. Bien que les partenaires de santé fassent tout leur possible pour continuer à fournir des services vitaux là où cela est possible, malgré les risques liés à l’artillerie lourde et la proximité des affrontements sur la ligne de front, l’accès humanitaire est totalement coupé. L’acheminement de biens essentiels tels que la nourriture et les médicaments est presque impossible, et les civils se retrouvent piégés sans options sûres pour évacuer.Les organisations humanitaires appellent d’urgence toutes les parties au conflit à convenir de l’établissement d’un accès sécurisé afin de permettre le réapprovisionnement en fournitures médicales et humanitaires essentielles, la circulation sécurisée des civils et la rotation du personnel humanitaire. L’accès vers et depuis Goma, ainsi qu’entre Minova et Bukavu, doit être priorisé pour assurer une assistance vitale aux populations affectées.
Les bailleurs de fonds doivent se mobiliser pour financer les actions humanitaires nécessaires afin de répondre aux besoins immédiats des populations affectées, et renforcer leur résilience à long terme. Cela inclut la fourniture de nourriture, d’abris, d’eau, de soins de santé et de services de protection. La communauté internationale doit agir rapidement pour éviter davantage de souffrances et garantir que la réponse humanitaire soit à la hauteur des besoins croissants.
Pour plus d'informations sur cette communication, veuillez contacter : representantegoma@forumongi-rdc.org
Le Forum des ONGI en RDC est un organisme indépendant regroupant plus de 124 organisations non gouvernementales internationales (ONGI). Les membres du Forum couvrent toutes les provinces du pays et travaillent dans les secteurs humanitaire, du développement et de la consolidation de la paix. La plupart des membres du Forum sont activement présents dans l'Est de la RDC, y compris dans les provinces du Nord et du Sud-Kivu.