APERÇU DU CONTEXTE HUMANITAIRE
La résurgence des hostilités dans le Pool depuis avril 2016, dix-sept ans après la fin du premier conflit dans ce département, a occasionné une situation humanitaire grave en termes de sécurité alimentaire, de nutrition, de santé, d’éducation, de protection en général et celle des femmes et des enfants en particulier, d’abris et d’articles non alimentaires.
En fin d’année 2017, le nombre de personnes dans le besoin était estimé à 160 000 personnes parmi lesquelles les déplacés, les populations qui sont restées dans leurs villages d’origine ainsi que les familles d’accueil. L’assistance humanitaire en 2017 n’a pu atteindre ni certaines personnes vivant dans les districts jusque-là inaccessibles de Goma Tsé-tsé, Kindamba, Vindza et Kimba, ni les personnes résidant dans plusieurs localités situées le long de la ligne de chemin de fer. Il sera crucial de mener des évaluations complémentaires dans ces circonscriptions administratives, afin d’avoir une meilleure vue de la situation d’ensemble en 2018
CONTEXTE
La population du département du Pool est estimée à environ 300 000 habitants dont 51,2% de femmes (projection 2014 sur base du recensement de 2007 de l’Institut national de la statistique). La population des zones touchées par la situation humanitaire est estimée à 160 000 personnes. Dans ce département, 62% des ménages dépendent de l’agriculture comme principal moyen de subsistance. Selon une opération d’enregistrement conduite fin 2017, il sied de rappeler que les personnes déplacées se retrouvent principalement à Brazzaville, Pointe-Noire ainsi que dans les départements du Kouilou, du Pool, de la Bouenza, du Niari et de la Lékoumou.
La République du Congo est secouée par une crise humanitaire depuis la reprise des hostilités dans le département méridional du Pool en avril 2016 jusqu’au cessez-le feu signé le 23 décembre 2017. En 2017, le taux de malnutrition avait dépassé le seuil d’urgence de 15% établi par le Système des Nations Unies pour atteindre 17% en moyenne et plus de 20% dans certaines localités.
Le plan humanitaire lancé le 18 juillet 2017 pour un montant de 23 700 000 USD a permis au Gouvernement et au Système des Nations Unies et ses partenaires d’apporter une assistance humanitaire à l’endroit de 138 000 personnes en détresse dans le département du Pool.
Les mécanismes de coordination stratégique, technique et opérationnelle ont été mis en place avec l’appui du Système des Nations Unies.
L’action humanitaire est conduite au travers des groupes sectoriels de la nutrition, la sécurité alimentaire, l’eau, l’hygiène et assainissement, la santé, la protection, les abris et les articles non alimentaires, l’éducation, le relèvement précoce, la coordination et les services d’appui.
Au 31 décembre 2017, le plan de réponse humanitaire a reçu un financement total de 13 524 093 USD représentant 57,06 % du montant total requis.
Cependant, les besoins restent immenses comme l’atteste la dernière mission conjointe des partenaires humanitaires d’octobre 2017 qui indique un nombre total de 158 717 personnes dans le besoin localisées à Brazzaville, dans le Pool, la Bouenza, la Lékoumou, le Niari et le Kouilou et Pointe-Noire.
L’accord de cessation des hostilités de décembre 2017 a permis un cessez-le feu effectif dans le département du Pool, qui pourrait permettre un déploiement renforcé des acteurs humanitaires avec pour objectif d’affiner les évaluations et apporter l’assistance humanitaire requise. Cependant, si ce cessez-le feu garantit un certain calme dans le département, certaines zones et villages restent toujours inaccessibles et non-autorisés par le Gouvernement (particulièrement le village de Kibossi dans le district de Goma Tsé-tsé).
Toutefois, les contraintes logistiques constituent également un défi dans des zones où les routes ne sont plus utilisées depuis le début de l’année 2016.
Il est à noter que le processus de DDR garanti par l’accord de cessez-le feu devrait également permettre la mise en place d’actions humanitaires et de relèvement couvrant les besoins des populations retournées.
Sur le plan économique, la chute brutale des prix du pétrole depuis 2014, a continué d’affecter la République du Congo en 2017 avec une aggravation de la situation économique nationale. La crise économique s’est traduite par le ralentissement de la croissance économique et du PIB hors pétrole de 7,9% en 2014 à 5,3% en 2015, puis par sa contraction sévère en 2016 (- 3,1%) et 2017 (- 5%).
Cette crise affecte les secteurs sociaux et diminue la capacité du pays à financer l’action humanitaire dans le département du Pool. L’assistance humanitaire reste majoritairement tributaire de l’aide extérieure de ses partenaires.
UN IMPACT MULTISECTORIEL
Certaines familles se sont vues séparées parce que l’un de leurs membres s’est vu menacé alors que d’autres ont préféré gagner la capitale Brazzaville, le Niari, la Bouenza, la Lékoumou, Pointe-Noire ou le Kouilou où se trouvent des proches. Certains villages ont été entièrement détruits et les perspectives de retour des populations déplacées sont faibles à court terme. En effet, malgré l’accalmie constatée suite à la conclusion de l’accord de cessation des hostilités, il est nécessaire de réhabiliter les routes, de reconstruire les maisons, de défricher les champs. L’assurance de securité pour ces familles est cependant la grande priorité.
Les populations restées dans leur village ou localité d’origine sont particulièrement exposées et ont vu leurs conditions de vie se dégrader depuis 20 mois.
Les déplacements en provenance ou à destination de ces zones sont devenus très difficiles en raison de la présence des hommes en armes et des contrôles.
Même si les combats se sont arrêtés, le banditisme et les risques d’embuscades représentent une menace plausible, surtout dans les zones éloignées.
D’une manière générale, l’accès aux services de santé reste très problématique aussi bien pour les populations déplacées que pour les populations hôtes ou les populations restées dans les zones affectées. La plupart des services de santé visités par la mission d’octobre 2017 sont soit fermés, soit non fonctionnels en raison de la dégradation du plateau technique, ou peu fonctionnels par manque de personnel et de médicaments. Il est également fort probable que la situation sanitaire dans les zones non visitées pour cause d’inaccessibilité, soit pire que celle qui prévaut dans les zones qui ont déjà fait l’objet d’une évaluation. Les soins de santé, lorsqu’ils existent, sont payants aussi bien pour les populations hôtes que pour les déplacés (500 à 1000 FCFA à la consultation). La couverture vaccinale reste faible dans les départements du Pool et de la Bouenza.
La situation alimentaire et nutritionnelle demeure précaire. Les ménages déplacés font face à de grandes difficultés d’accès à la nourriture et aux marchés.
On observe une forte volatilité des prix des denrées alimentaires de base dans les zones affectées avec une tendance à la hausse. Le prix des denrées alimentaires de base est passé du simple au double dans certaines localités. En mai 2017, le prix nominal du kilogramme de foufou (farine de manioc) a augmenté, par rapport à novembre 2016, de 85% sur le marché de Mindouli et de 10% sur le marché de Loutété (zone d’accueil de déplacés dans le département de la Bouenza). Les mêmes tendances sont observées en ce qui concerne le prix nominal du riz, qui a enregistré, sur la même période, une augmentation de 55% sur le marché de Mindouli et de 25% sur le marché de Kinkala. Dans la plupart des localités visitées par la mission conjointe fin 2017, l’assistance alimentaire assurée par le PAM est la seule aide reçue jusqu’à présent. Dans la majorité des sites visités, l’armée a établi un périmètre de sécurité (de 5 km en moyenne) autour des villages. Les populations déplacées et hôtes n’ont par conséquent plus accès à leurs moyens de subsistance habituels (agriculture, pêche, chasse et cueillette). Bien souvent, les déplacés manquent d’outils aratoires et de semences pour exercer des activités agricoles.
L’accès á l’eau potable, en quantité et en qualité est une problématique qui affecte tant les populations hôtes, les personnes déplacées que les populations restées dans les zones affectées. D’après les résultats de l’enquête en grappes à indicateurs multiples MICS1 Congo 2014-2015, le pourcentage de populations utilisant de l’eau des sources améliorées était de 44,9 % pour le Pool et de 72 % pour la Bouenza. Autrement dit, l’accès à l’eau connaissait déjà des problèmes structurels dans les départements du Pool et de la Bouenza, et ces difficultés ont été aggravées par la situation humanitaire. Les rivières et les puits traditionnels non protégés restent les principales sources d’approvisionnement en eau dans la plupart des villages visités. En ce qui concerne l’assainissement, la défécation à l’air libre est une pratique majoritaire dans les localités visitées.
Dans le département du Pool, la situation de l’éducation est également préoccupante. 50 % des établissements scolaires du cycle primaire ne sont pas fonctionnels. On estime à quelques 18 000, le nombre de garçons et de filles, qui ne sont plus dans les circonscriptions scolaires (partis dans d’autres circonscriptions ou départements) et dont la scolarisation risque d’être perturbée. 65 écoles ont été partiellement ou totalement endommagées par les violences. Dans certains cas, les toits ont été soufflés par les manœuvres des hélicoptères de combat, dans d’autres, elles ont perdu leur mobilier transformé en bois de chauffe. Les classes demeurent clairsemées particulièrement dans les villages du fait, non seulement, de l’incertitude sécuritaire mais également à cause de l’incapacité des parents d’élèves de subvenir aux besoins (fournitures et uniformes scolaires) et de faire face aux frais scolaires. Des enseignants en poste dans les écoles de regroupement (aux chefs-lieux de districts) sont démunis de tout support didactique pour assurer un enseignement de qualité.
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