Contexte de la crise
Le Tchad est confronté à des problématiques humanitaires persistantes liées à l’insécurité croissante sur certaines parties du territoire et dans les pays voisins ainsi qu’aux défis socioéconomiques, sanitaires et climatiques, dans un contexte de transition politique. L’exposition aux effets du changement climatique, l’ampleur des violences perpétrées par des groupes armés dans la région du bassin du Lac Tchad, la fragilité de la situation sécuritaire dans les pays limitrophes et les conflits intercommunautaires dans un contexte de sous-développement, pérennisent la situation humanitaire au Tchad.
Profils politiques et sécuritaires
Le Tchad est un État unitaire et laïc. L’ordonnance n°038/PR/2018 du 10 août 2018 a revu la subdivision des unités administratives et des collectivités autonomes en 23 provinces dont celle de N’Djamena, 107 départements et 377 communes.
Le pouvoir central est représenté au niveau local par les Gouverneurs de provinces, les Préfets de Départements et les Administrateurs délégués auprès des communes. Ceux-ci assistent les Présidents des conseils provinciaux, des conseils communaux et le Maire de la ville de N’Djamena dans la mise en œuvre des plans et des programmes de développement.
Sur le plan politique, au lendemain de la proclamation des résultats provisoires des élections présidentielles, le 20 avril 2021 et du décès du Président de la République, survenu le 20 avril 2021, un Conseil Militaire de Transition (CMT) a été mis en place pour en assurerr la transition. La charte de la transition publiée le 21 avril 2021 fixe la période de transition à dix-huit mois et prévoit trois institutions pour gérer la transition : le Conseil Militaire de la Transition, le Conseil National de Transition et le Gouvernement de transition. Le Conseil Militaire de Transition dont le président occupe les fonctions de Président de la République, de Chef de l’Etat et de Chef suprême des armées, définit et donne les grandes orientations sur les questions de paix, de stabilité et de sécurité nationales et fixe les grandes orientations de la politique économique, sociale et culturelle. Le Conseil National de la Transition (CNT) a été mis en place par le décret N° 031/PCMT/2021 du 28 Mai 2021 qui lui confère une fonction législative de suivi et de contrôle de l’exécutif, de veiller à la défense et à la promotion des droits de l’homme et des libertés et d’examiner et d’adopter le projet de constitution et les textes législatifs. Le mandat du CNT prendra fin à l’installation du parlement élu. Le Gouvernement est composé du Premier Ministre et des Ministres. Il conduit et exécute la politique de la Nation définie par le Conseil Militaire de la Transition.
La vision 2030 (le Tchad que nous voulons) du développement est de faire du Tchad un pays émergent capable d’assurer la sécurité alimentaire, l’accès pour tous à l’eau potable et à l’énergie à travers plusieurs politiques et stratégies sectorielles dont le Plan national de Développement (PND 2017-2021). L’insécurité dans les pays voisins et les défis sécuritaires internes ont augmenté le nombre de personnes en situation de déplacement (réfugiés, déplacés, retournés, etc.) ayant besoin d’une aide alimentaire au Tchad.
Sur le plan sécuritaire, le Tchad reste affecté par l'insécurité résultant de l'activisme des groupes armés non-étatiques dans le Tibesti et le bassin du lac Tchad par des opérations militaires contre ces groupes armés dans la province du Lac. Cette situation a occasionné un déplacement cumulatif de 457 948 personnes dont 406 573 Personnes Déplacées Internes (PDI), 22 112 personnes qui étaient PDI sont retournées dans leurs localités d’origine, mais sur lesquelles les conséquences de déplacement continuent de peser, suite au manque d’infrastructures d’accueil et aux conditions sécuritaires fragiles et 29 263 Tchadiens qui vivaient depuis des dizaines d’années dans les pays voisins du bassin du Lac Tchad (principalement le Niger et le Nigeria) mais ont été contraintes de fuir leur lieu de résidence dans ces pays pour se réfugier au Tchad. Parmi ces personnes, 2 946 ressortissants tchadiens sont retournés dans la province du Batha, leur province d’origine. Comparé à la situation de fin 2020, ce nombre représente une augmentation de 16%.
L’instabilité politique et sécuritaire dans les pays voisins (Soudan, Libye et République centrafricaine) a continué d’affecter la situation sécuritaire à l’Est et au Sud du pays. Quelques 528 139 réfugiés et demandeurs d’asile séjournent au Tchad et dépendent encore de l’aide humanitaire à l’Est, au Sud et à l’Ouest du pays. Environ 42 700 nouveaux réfugiés sont arrivés dans les provinces du Sud (25 207 réfugiés centrafricains), de l’Est (6 449 réfugiés soudanais) et de l’Ouest (11 000 réfugiés camerounais) se rajoutant aux 18 631 refugies présents dans la province du Lac. Le conflit intercommunautaire qui a éclaté le 11 août dans le département de Logone-Chari, région de l’Extrême-Nord du Cameroun, a occasionné le déplacement de 11 000 réfugiés et demandeurs d’asile dans six villages frontaliers au Cameroun (Danga, Gamar, Delbé, Mabloum, Oundouma, Mandalia et Bandouma), dans la province du Chari Baguirmi.
L’instabilité de l’ordre politique au Soudan après la chute du président Omar el-Bechir ne favorise pas le processus de rapatriement des réfugiés soudanais dans leur pays. Le conflit politique en Libye a des conséquences sur la situation socio-économique, politique et sécuritaire de la sous-région. Plus de 1,108 personnes (dont 95% d’hommes, 5% de femmes et 3% d’enfants) retournées de la Libye sont arrivées à Ounianga Kébir au Nord du Tchad en 20214 . Ces personnes se trouvaient en Libye pour des raisons économiques et ont subi des menaces (48%), enlèvements (21%), détentions arbitraires (20%), tortures (19%) et travaux forcés (4%). Ces personnes sont en majorité d’origine tchadienne (93%) mais des Nigériens (3%), des Nigérians (3%) et des Soudanais (1%) ont également été recensés. Ces personnes sont arrivées, vulnérables au Tchad et ont exprimé le besoin d’assistance humanitaire. La République centrafricaine continue de faire face à une fragilité sécuritaire, particulièrement dans sa partie nord où l’activisme des groupes armés, la circulation d’arme et le banditisme sont rapportés. En mars et mai 2021, les opérations militaires initiées par les FACA et forces bilatérales contre les groupes armés ont engendré des exactions importantes et des mouvements de populations dans la zone nord de la RCA et dans les provinces du Sud du Tchad où plus de 7 800 personnes ont trouvé refuge. Les enregistrements initiés par les autorités et les partenaires humanitaires dont le HCR pour les réfugiés et OIM pour les retournés ont révélé la présence de 25 207 réfugiés (64% des enfants, 58% de féminin, 42% de masculin et 5 487 personnes à besoins spécifiques)6 et de 12 208 retournés dans les provinces de Logone Oriental, Mandoul et Moyen Chari.
Cette situation reste l’obstacle au rapatriement de plus de 121 243 réfugiés centrafricains qui sont au Tchad depuis plusieurs années. L’enregistrement biométrique réalisé entre juin et septembre 2019 dans les provinces du sud relevait que seuls 29% des réfugiés centrafricains étaient favorables au retour volontaire en RCA en raison du contexte sécuritaire encore fragile.
Les conflits intercommunautaires liés au pouvoir traditionnel et conflits entre agriculteurs et éleveurs ont affecté plusieurs territoires de l’Est et du Sud causant des dégâts énormes au sein des populations.
La communauté humanitaire a répertorié 24 incidents des conflits intercommunautaires entre janvier et juillet 2021 dont 9 à l’Est, 8 au Lac et 7 au Sud causant la mort de 309 personnes, blessant 182 autres et déplaçant 6 500 personnes. Les principales raisons des tensions intercommunautaires sont l’accès aux ressources naturelles et économiques (49%), l’accès à la terre (21%), et aux services (11%). L’accès à l‘aide humanitaire a également été identifié comme une source de conflit (4%), en raison du manque de communication suffisante lors du ciblage des personnes vulnérables. La rareté des ressources naturelles due aux catastrophes naturelles, notamment les pâturages et l’eau est devenue une source de tensions entre agriculteurs et éleveurs, le changement climatique ayant modifié les itinéraires et les périodes de transhumance du bétail.
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