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République centrafricaine : Plan de réponse humanitaire 2022 (janvier 2022)

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Les besoins humanitaires en Centrafrique ont atteint un niveau inégalé en cinq ans. La recrudescence de la violence armée et la récession de l’économie centrafricaine ont plongé 63% de la population, soit 3,1 millions de personnes, dans une grande vulnérabilité. Parmi elles, 2,2 millions ont des besoins sévères qui exigent une réponse d’urgence.

L’analyse des besoins humanitaires 2022 a mis en évidence l’impact humain de la dégradation de l’environnement de protection observée depuis décembre 2020.

L' équation est simple et le résultat dramatique pour la population centrafricaine : alors que le conflit s'intensifie depuis décembre 2020, tous les moteurs de la crise humanitaire se sont aggravés (risques de protection croissants, accès de plus en plus limité aux services essentiels, détérioration de la situation sécuritaire, recrudescence des chocs violents, perte de pouvoir d'achat et pauvreté croissante), entraînant la population avec eux.

La recrudescence des incidents liés aux engins explosifs (EE) constitue une menace croissante qui affecte la population. De janvier à novembre 2021, 37 incidents impliquant des EE ont été enregistrés majoritairement à l’ouest du pays. Au cours de cette période, 29 civils ont été blessés et 27 autres tués par des explosifs, dont un acteur humanitaire. Au total, 81% des morts et 90% des blessés étaient des civils. L’utilisation des EE constitue une menace pour la population et les acteurs humanitaires. Les acteurs humanitaires font face à certains défis qui ont des conséquences sur les activités planifiées, notamment les restrictions de liberté de mouvement ; l’accès bien que possible devient de plus en plus complexe et difficile dans l’ouest du pays. L’intensification du conflit dans plusieurs régions du pays, les abus graves des droits humains et les violations du droit international humanitaire dans un contexte d’impunité, ainsi que la stigmatisation de groupes de populations spécifiques ont forcé des centaines de milliers de personnes à fuir, les exposant à des risques de protection sévères. Au 30 septembre, 722 000 personnes étaient déplacées à l’intérieur du pays, soit 13% de plus que l’année précédente ; un niveau inégalé depuis 2014.

La présence des hommes en armes, y compris sur les principaux sites de déplacés, a entraîné une augmentation des agressions physiques et sexuelles, des pillages, du travail forcé, des restrictions de mouvement et des risques de recrutement d'enfants par des éléments armés. Les trois quarts des personnes déplacées à l’intérieur de leur propre pays (PDI) vivant dans les sites disent craindre pour la sécurité de leurs enfants (69% pour les filles, 73% pour les garçons)2. La violence sexuelle est considérée comme le principal risque de sécurité pour les femmes (34%) et les filles (38%). Au niveau national, le pourcentage de femmes ayant subi un incident au cours des 30 derniers jours (19%) a doublé par rapport à 2020.

La liberté de mouvement des personnes et l'accès aux services de base déjà limités se sont considérablement réduits en raison de l'insécurité. En moyenne, un ménage interrogé sur quatre a subi des restrictions de mouvement au cours du mois dernier. La proportion de ménages qui justifient ce manque de liberté par des craintes pour leur sécurité et la présence de barrières érigées par des porteurs d'armes a fortement augmenté depuis 2020.

L’ environnement opérationnel des acteurs humanitaires s’est aussi dégradé. De janvier à octobre 2021, 364 incidents affectant directement les personnes ou les biens humanitaires ont été répertoriés, contre 339 au cours de la même période l’année précédente. Trois travailleurs humanitaires ont été tués et 24 blessés.

Le conflit a laissé des séquelles profondes, en particulier sur le bien-être physique et mental. Dans 27 sous-préfectures enquêtées3, huit enfants sur dix ont subi des violences physiques ou psychologiques lorsque leur famille a été poussée au déplacement. Par ailleurs, les données du monitoring de protection attestent d’une hausse de 30% des violences basées sur le genre par rapport à 2020.

Les services essentiels de base ont été davantage fragilisés dans les zones à haute intensité de conflit. Les centres de santé ont été la cible de multiples attaques des hommes en armes, de pillage et son personnel soignant a été soumis à des violences psychologiques et physiques. Les besoins en santé ont atteint un score de sévérité 4 sur 5 dans 14 souspréfectures, et de sévérité 3 dans 54 sous-préfectures et arrondissements, soit 87% de toutes les souspréfectures du pays.

Des dizaines d’établissements scolaires ont également connu le même sort. Globalement, 31 sous-préfectures ont atteint un niveau de sévérité plus élevé que l’année dernière avec des ramification importante avec la protection de l’enfance et les violences basées sur le genre (VBG). A Bocaranga, où 32% des populations ont des besoins extrêmes (sévérité 4) dans le domaine de l’éducation, 44% de ménages4 ont fait travailler leurs enfants comme stratégie d’adaptation pour répondre à un manque de revenus.

L’ abandon des structures et points d’eau qui ne sont plus entretenus, la contamination des puits par les cadavres et le vandalisme commis par les hommes en armes ont pesé de tout leur poids sur l’accès à l’eau potable. Dans la sous-préfecture de Koui, le nombre de localités où les principales sources d’eau sont des sources non aménagées et de l’eau de surface a été multiplié par 10 en un an.

La perte de revenus et les chocs sécuritaires ont contraint les ménages centrafricains à faire des choix impossibles. Ainsi, 30% des hommes et 24% des femmes ont réduit leurs dépenses de santé. Quelque 38% d'hommes et 34% de femmes ont déclaré dépenser moins pour les frais de scolarité. Neuf Centrafricains sur 10 ont adopté une stratégie négative de survie dans les 30 derniers jours. A Markounda par exemple, l’accès aux champs est devenu impossible en raison de l’insécurité, contraignant 87% des habitants à consommer des semences et 28% à mendier.

Dans les deux-tiers des sous-préfectures de la Centrafrique, les conditions de vie ont atteint un niveau de sévérité extrême (4 sur une échelle de 5). Un Centrafricain sur trois doit parcourir plus d’une heure de marche pour accéder à des services de base. Manque d’eau potable, fragilité de l’habitat, concentration démographique et promiscuité contribuent à un environnement toujours plus précaire et insalubre, en particulier pour les PDI sur sites, rapatriés et retournés, couplés à des besoins sévères en santé dans 87% de toutes les sous-préfectures du pays.

La multiplication des chocs sécuritaires et une deuxième vague de COVID-19 au deuxième trimestre 2021 ont sévèrement affaibli l’économie centrafricaine et plongé des pans entiers de la société centrafricaine dans l’extrême pauvreté. Aux mesures de restrictions liées à la COVID-19 s’est ajoutée la fermeture de la principale route d’approvisionnement reliant la RCA au Cameroun6 en raison de l’insécurité. Les gains économiques des deux dernières années se sont évaporés laissant la place à une croissance négative estimée à 0,6% contre une croissance positive de 0,8% en 20207. En un an, la proportion de personnes gagnant moins de 30 000 XAF (54 dollars américains) par mois a augmenté de 30%8 tandis que la valeur du panier minimum des articles de survie (PMAS) a connu une augmentation de 20% entre janvier et juin 2021. Selon les projections de la Banque mondiale, plus de 3,4 millions de personnes devraient vivre dans l’extrême pauvreté en 2021–2022. D'ici 2025, le produit intérieur brut (PIB) par habitant devrait être à peu près semblable à celui de 2003. La projection de l'analyse du Cadre intégré de classification de la sécurité alimentaire (IPC) menée par le Cluster Sécurité alimentaire indique que 2,4 millions de personnes seront dans le besoin d’une aide alimentaire s’ils ne reçoivent pas une assistance pendant la période de soudure (avril-août). Avec un score de 7,8, la RCA se classe au sixième rang mondial en termes de niveau de risque selon l'indice INFORM 2021, avec des risques de conflit très élevés, des vulnérabilités socio-économiques et un manque de capital humain.

En l'absence d'une solution politique, il existe un risque important que la crise humanitaire détériore davantage. En conséquence, les violences contre les civils, les infrastructures civiles et les acteurs humanitaires devraient se poursuivre, tout comme la pression sur les acteurs humanitaires, qui anticipent plusieurs crises simultanées dans différentes parties du pays. Les groupes de population les plus vulnérables, y compris les minorités, continueront d'avoir besoin d'une réponse humanitaire soutenue et fondée sur des principes.

Pour plus de détails sur les besoins, conditions humanitaires et facteurs sous-jacents de la crise voir (HNO 2022).

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