Introduction Le 30 mars 2022, la commission des affaires étrangères du Parlement britannique ouvrait une enquête sur le recours à des sociétés militaires privées (SMP) par les États, en portant une attention particulière à la très médiatisée SMP russe connue sous le nom de groupe Wagner (Parlement britannique, 30 mars 2022 – en anglais). Cette décision faisait suite au déploiement de mercenaires affiliés au groupe Wagner en Ukraine, ainsi qu’à la publication de plusieurs rapports faisant état de violations des droits de l’homme commises par les mercenaires du groupe au Mali.
Cette enquête n’est alors que l’un des derniers efforts en date visant à mettre en lumière les agissements du groupe Wagner. Elle vient s’ajouter à un ensemble d’initiatives apparues dans un contexte de préoccupation internationale accrue à l’égard des opérations du groupe en République centrafricaine (RCA). Plusieurs organes de l’ONU avaient déjà, par le passé, exprimé leur inquiétude ou mené des enquêtes vis-à-vis des abus présumément commis par les mercenaires de Wagner (Conseil de sécurité des Nations unies, 25 juin 2021 ; UN Info, 31 mars 2021). En juin 2021, le Groupe d’experts de l’ONU sur la RCA avait notamment transmis au Conseil de sécurité des Nations unies une série de rapports signalant des « meurtres indiscriminés » ainsi que des actes de violence contre des civils perpétrés par des « instructeurs russes » (Conseil de sécurité des Nations unies, 25 juin 2021). La mission de maintien de la paix de l’ONU en RCA (MINUSCA) et les forces spéciales rwandaises ont, elles aussi, fait part de leurs réticences à prolonger les opérations conjointes avec le groupe Wagner en raison de violations présumées des droits de l’homme (UN Info, 31 mars 2021 ; Corbeau News, 13 juin 2021). Par ailleurs, l’Union européenne (UE) a imposé des sanctions à l’encontre du groupe Wagner et de personnalités lui étant liées en décembre 2021 (Conseil européen, 13 décembre 2021).
Compte tenu des préoccupations grandissantes suscitées par les opérations du groupe Wagner au Mali ainsi que par leur récent déploiement en Ukraine, ce rapport se propose d’analyser la participation du groupe à des faits de violence politique au cours des dernières années. Il se focalise, pour ce faire, sur le ciblage des populations civiles par le groupe Wagner en RCA et au Mali, où l’organisation agit aux côtés des forces étatiques depuis 2018 et décembre 2021, respectivement. L’analyse des données d’ACLED permet de d’identifier plusieurs tendances à cet égard :