Contexte et justification
Le Cameroun est considéré comme l’un des pays pauvres de la planète. Il est classé 153e sur 187 pays selon l'indice de développement humain 2015 avec un PIB de 2.803 USD par habitant. 39% de la population de 23,5 millions habitants du pays vit encore en dessous du seuil de la pauvreté . Confronté à une triple crise humanitaire liée aux conflits armés en République centrafricaine et au nord-est du Nigéria ainsi qu’à une vulnérabilité chronique entrainant des niveaux élevés d’insécurité alimentaire et de malnutrition, le Cameroun a vu son nombre de réfugiés et de personnes déplacées internes accroître depuis 2015, générant une augmentation brusque des besoins humanitaires tant pour les personnes déplacées que pour les communautés hôtes déjà vulnérables avant la crise.
Cette situation a rendu les conditions de vie des populations plus précaires dans la partie septentrionale et à l’Est du pays où la pauvreté était déjà considère comme presque endémique.
La crise du bassin du Lac Tchad est directement liée à l’insurrection armée lancée par le Groupe Boko Haram (BH) depuis le Nigéria. En 2014, la situation sécuritaire dans les régions du Nord du Nigeria s’est fortement dégradée et s’est propagée dans toute la région du Bassin du Lac Tchad notamment au Niger, Cameroun et Tchad, conduisant à des déplacements de population massifs au Nigeria, Niger, Cameroun et Tchad, et entre le Nigéria et les pays voisins. À ce jour, les raids transfrontaliers de Boko Haram, les attentats-suicides et l’insécurité accrue ont causé des déplacements massifs et amplifié la vulnérabilité de la population locale de cette région aride du Sahel régulièrement affectée par la sécheresse, des pénuries alimentaires et des épidémies.
De par sa position géographique, la Région de l’Extrême-Nord du Cameroun constitue un carrefour peu stable dans le Bassin du Lac Tchad. Cette partie est confrontée à une situation d’urgence humanitaire complexe où 10,9 millions de personnes ont maintenant besoin d’aide humanitaire d’urgence repartie dans le nord-est du Nigeria, la région de l’Extrême-Nord du Cameroun, l’ouest du Tchad et le sud-ouest du Niger.
La situation d’insécurité accrue cause des déplacements massifs et amplifié la vulnérabilité des populations locales dans la région. Au Cameroun 1,6 M de personnes sont dans le besoin d’assistance et dont 1,5 M se trouve particulièrement dans la Région de l’Extrême-Nord . La situation sécuritaire dans la Région de l’Extrême-Nord du Cameroun reste toujours volatile marquée par des raids transfrontaliers, les attentats-suicides et l’incursion de Boko Haram.
La Région accueille actuellement 237 967 PDI (soit 40 051 ménages), 29 728 réfugiés non-enregistrés (soit 4 711 ménages) et 61 090 retournés (soit 9 736 ménages) . Le nombre de personnes déplacées internes a augmenté de 23 % depuis le début de l’année et atteint environ 325 589 personnes à la fin août 2017 . Audelà de la crise actuelle, la région de l’Extrême-Nord présente le taux de pauvreté le plus élevé au Cameroun (74,3%) et est en nette augmentation de plus de 5 points par rapport à 2007.
En réponse à la crise humanitaire dynamique, complexe et aggravante, la communautaire humanitaires met en place des interventions visant à fournir de l’assistance aux personnes affectées. Ces activités sont conçues pour répondre aux besoins fondamentaux des populations les plus affectées afin de limiter leurs recourt à des stratégies d’adaptation négatives, d'améliorer l'accès aux aliments et de préserver, restaurer et diversifier les moyens de subsistance.
En fonction des objectifs programmatiques et pour des raisons contextuelles, diverses modalités d’assistance sont utilisées par les acteurs humanitaires à savoir l’assistance en nature, l’assistance par le bon d’achat et l’assistance en espèce.
Au vu de la flexibilité qu’offre la modalité de transferts monétaires à apporter une réponse aux besoins fondamentaux et / ou pour protéger, initier ou restaurer des moyens de subsistance ou des activités économiques pendant ou après une crise humanitaire, les acteurs humanitaires portent de plus en plus une attention particulière à cette modalité.
De ce fait, considérant le nombre important d’acteurs qui mettent déjà en œuvre ou envisagent intervenir à travers les transferts monétaires dans la Région de l’Extrême-Nord, un Groupe de Travail Cash a été formellement mis en place à Maroua avec l’appui de CALP en Mars 2017. CaLP a organisé une session de renforcement des capacités des acteurs sur l’approche cash à Maroua. Il s’agit d’une plate-forme régionale de soutien aux Groupes Intersectoriels pour la coordination, le partage de l'information, l'apprentissage, le plaidoyer et le soutien à l'évaluation des programmes, l’appui à la conception et la mise en œuvre des programmes de transferts monétaires dans la région de l’Extrême Nord.
En effet, il est apparu que la coordination des acteurs de transferts monétaires était particulièrement difficile à assurer, engendrant et accentuant parfois les difficultés opérationnelles liées à l’absence de collaboration et d’harmonisation des interventions entre acteurs.
L’inexistence d’une plateforme pour l’harmonisation et le partage d’informations précises et cohérentes sur la faisabilité des TM (marchés, prestataires de services etc) et l’absence d’outil consensuel pourrait expliquer en partie les gaps que l’on perçoit encore sur la préparation des acteurs à mettre en place une réponse adéquate dans un tel contexte.
Dans l’optique d’apporter un début de réponse à cette problématique, le Groupe de Travail Cash s’est fixée pour objectif de mener une évaluation pour déterminer le panier de dépenses minimum (MEB) dans la Région de l’Extrême-Nord. À cet effet, un groupe technique restreint de travail (Task force) constitué des organisations justifiant d’une capacité technique a été mis en place pour piloter le processus, gérer la dynamique et partager les informations avec tous les membres. Ainsi, le PAM, l’IRC, le CRS, l’UNICEF, le CODAS CARITAS, le CARE et le HCR se sont engagés à faire partie comme membres. Cette cohorte sera rejointe par l’OMS, PUI et FAO.
La portée de cette évaluation vise à élaborer une cartographie des besoins multisectoriels des ménages affectés par la crise. Il s’agit de répertorier ce que requiert les ménages pour répondre à leurs besoins de base, que ce soit en permanence ou à titre saisonnier et leur coût moyen sur la durée. De ce fait, les besoins de base ici constituent les biens ou les services indispensables pour la survie des ménages / des individus et la protection leurs moyens de subsistance afin de répondre à leurs besoins essentiels.
Cette évaluation des besoins multisectoriels des ménages affectés par la crise couvre la région ExtrêmeNord, avec un accent particulier sur les départements les plus affectés (Diamare, Mayo Tsanaga, Mayo Sava, et Logone-et-Chari). Il est orienté suivant le résultat du DTM 9. La portée de l'évaluation permettra de ressortir une carte des besoins par secteur afin de préparer une réponse adéquate. Cela constituera également un outil d’aide à la contextualisation du mode d'assistance humanitaire.
Suivant le protocole défini dans la feuille de route, ceci constitue une évaluation multisectorielle qui requiert un pool d’expertise varié et diversifié. C’est dans cette logique que s’est inscrite la forte mobilisation de la communauté humanitaire pour mener cette enquête dont les ressources résulteront de la volonté et l’intérêt que chacune portera à cette dynamisme.