FAITS SAILLANTS
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Le débordement des eaux du lac Tanganyika a durement affecté trois des cinq communes de la province de Rumonge
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Le sous-financement du Plan de réponse humanitaire (HRP) 2021 a de graves conséquences
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Plus de 4 500 personnes ont été testées positives à la Covid-19 depuis le début de la pandémie
CONTEXTE
Le débordement des eaux du lac Tanganyika a durement affecté trois des cinq communes de la province de Rumonge
Depuis le début de la saison des pluies en mars 2021, les eaux du lac Tanganyika n’ont cessé de monter, inondant de nombreux quartiers dans les provinces côtières et provoquant des dégâts matériels et des déplacements importants de personnes.
Les provinces les plus touchées par la montée des eaux sont Bujumbura, Bujumbura Mairie, Makamba, et Rumonge car elles sont situées sur le littoral du lac Tanganyika. La province de Rumonge, qui compte cinq communes (Bugarama, Muhuta, Rumonge, Burambi et Buyengero), a été durement touchée. Trois sur cinq communes qui longent le lac Tanganyika, à savoir Bugarama, Muhuta ainsi que la ville de Rumonge (quartier de Kanyenkoko), ont enregistré des dégâts considérables suite au débordement des eaux du lac Tanganyika. Près de 68 hectares agricoles situés jusqu’à plus de 700 mètres de la zone tampon et se trouvant à proximité du lac ont été engloutis par les eaux, aussi bien dans la ville de Rumonge qu’à Bugarama. L’accès aux parcelles est bloqué par les eaux stagnantes et la jacinthe d’eau qui encerclent les habitations. Certaines infrastructures comme le port de Rumonge et le point d’entrée désigné pour l’isolement et référence des cas suspects présentant des symptômes de la COVID-19 ne se tiennent plus qu’à quelques mètres des eaux. La rivière Murembwe située à Kanyenkoko est sortie de son lit et s’est déversée dans les plantations de palmiers.
De nombreux dégâts sont à déplorer
Selon les évaluations des dégâts et l’identification des besoins par la plateforme provinciale, 2 217 ménages ont été affectés dont 1 666 ménages déplacés, et plus de 1 600 maisons sont endommagées dans la zone urbaine de Rumonge, notamment dans les quartiers de Teba, de Kanyenkoko et de Nkayamba, mais aussi dans les villages de Magara I, de Magara II, de Cashi, et de Muhuta. Environ 32 ménages de cette zone sont déplacés et hébergés dans un hangar communément dénommé CEMINA. Les autres ménages sont hébergés par des familles d’accueil. Certains ménages de Bugarama et Muhuta sont hébergés dans des familles vivant dans les communes de Kabezi et Rutumo, situées à l’abri des inondations, tandis que d’autres refusent de quitter les zones inondées malgré les multiples appels de l’administration à ne pas rester dans ces zones à risque d’inondations. Ces ménages estiment qu’ils n’ont pas les capacités de survivre ailleurs.
Ces inondations surviennent dans un contexte déjà difficile, marqué par les effets socio-économiques de la COVID-19 et l’augmentation des cas de transmission communautaire. Les déplacements entre les quartiers suite aux inondations pourraient accélérer la chaîne de propagation. En se déplaçant, les familles risquent de vivre dans des sites ayant des espaces très étroits où les mesures préventives contre la COVID-19 peuvent être difficiles à respecter.
En outre, cette situation vient éroder les moyens de subsistance de populations déjà vulnérables qui vivaient de la pêche et du commerce de poissons du lac. Les activités commerciales au port de Rumonge qui procuraient à la population de l’emploi ainsi que des recettes à la province tournent au ralenti. Cela risque d’exacerber la précarité et de plonger de nouvelles personnes dans la vulnérabilité.
Par ailleurs, les ménages agricoles dont les champs se trouvent près du lac ne pourront plus récolter en juin et dépendront de l’assistance jusqu’à la prochaine récolte de la saison culturale 2022A.
Les zones touchées risquent de connaître une résurgence des épidémies saisonnières de choléra et de paludisme. Il est donc urgent de procéder à une pulvérisation intra-domiciliaire à effet rémanent, de renforcer l’accès à l’eau et à l’assainissement, et d’effectuer une surveillance épidémiologique. De plus, les ménages qui ont été épargnés risquent d’être attaqués la nuit par des animaux aquatiques, certains errant dans les quartiers du fait de la montée des eaux. Par ailleurs, des parties de la route reliant Rumonge à Nyanza lac (province de Makamba) ont été détruites. Si des solutions durables ne sont pas envisagées pour la réhabilitation de cette route, le transport des marchandises et des personnes restera interrompu sur cet unique axe reliant Bujumbura et la province de Makamba, frontalière à la Tanzanie.
Néanmoins la réponse apportée reste limitée
Une timide assistance humanitaire se met en place à Rumonge. Celle-ci se heurte à un stock limité des acteurs humanitaires. Avec un nombre de victimes qui continue de s’accroître en raison de la récurrence des intempéries en cette grande saison des pluies, d’importantes ressources financières sont nécessaires pour maintenir la couverture de ces besoins. Le 22 avril, 234 ménages ont reçu une aide alimentaire composée de denrées (maïs et huile) et de transferts monétaires (Cash). Le groupe sectoriel des abris et articles non alimentaires a remis aux mêmes ménages des kits composés d’articles de cuisine, ainsi que de trois nattes, deux couvertures, trois moustiquaires, deux bidons (de 10 et de 20 litres d’eau), deux seaux d’eau de 20 litres chacun, et 24 morceaux de savon. UNICEF a organisé la remise de kits scolaires à 630 écoliers affectés de Rumonge, alors que ces kits n’étaient destinés qu’à couvrir les besoins de 200 écoliers. La Plateforme des intervenants en Psychosocial et en Santé Mentale (PPSM) provinciale de Rumonge a distribué 153kg de farine pour bouillie, 119 habits complets pour les enfants de moins de 5 ans, 90 pullovers contre le froid pour les enfants de 5 ans, et plus de 41 pagnes pour les femmes.
L’administration a mis en place d’autres activités de réponse d’urgence, visant notamment à sensibiliser la population vivant sur les rives du lac pour les encourager à déménager dans d’autres lieux moins exposés. Elle mène également des actions dans le but de mettre à la disposition des sinistrés ayant perdu leur abri un site pour leur relocalisation. Le site de Makombe s'étend sur une superficie de 84,4 ares avec une capacité d'accueil de 1000 personnes. Cependant, il est en mauvais état et ne peut pas accueillir les déplacés en raison de l’usure des tentes, du mauvais état des latrines et de problèmes en matière d’approvisionnement en eau ne permettant pas de bonnes conditions d’hygiène. L’administration fait appel à la générosité des partenaires pour sa réhabilitation.
Pour faire face à la montée des eaux et aux inondations qui vont continuer à sévir dans les années à venir en raison des effets du changement climatique observé dans toute la corne de l’Afrique et en particulier au Burundi, les autorités du pays, avec leurs partenaires techniques et financier de développement, devront envisager des solutions plus durables, par exemple en construisant des systèmes de rétention d’eau des bassins-versants pour limiter la quantité de déchets charriés par l’érosion vers le lac Tanganyika. En effet, une des hypothèses avancées sur les causes de la montée des eaux du lac est liée aux alluvions et aux quantités importantes de terre venant des montagnes surplombant la ville et qui se jettent dans le lac. Ce phénomène serait exacerbé par la surexploitation des ressources naturelles dans les bassins versants du lac Tanganyika, provoquant l’érosion des sols et par conséquent un déversement important lorsque ces zones enregistrent de fortes précipitations. Si le fond du bassin est rempli de déchets, l’eau du lac va inévitablement monter et conquérir d’autres espaces. Les espèces aquatiques seront elles aussi menacées par ces déchets. Une autre hypothèse serait que les eaux du lac ne peuvent plus s’évacuer en raison du débordement de l’exutoire du lac, la rivière Lukuga en République Démocratique du Congo (RDC). Les eaux risquent de continuer à monter jusqu’à la fin de la saison des pluies prévue à la mi-mai, et avec une nappe phréatique pleine, les eaux prendront du temps à s’infiltrer dans les zones inondées.
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