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Sahel : Ce qui a changé - Rapport de suivi de la Coalition citoyenne pour le Sahel, Juin 2022

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Synthèse

La Coalition citoyenne pour le Sahel s'est formée en juillet 2020 en réaction à la dramatique aggravation de l’insécurité au Mali et au Burkina Faso, pour appeler à la transformation radicale de la réponse à la crise dans la région ouest-africaine, où une stratégie du tout-militaire a longtemps été privilégiée par les gouvernements.

Les dizaines d’organisations de la société civile sahélienne et ouest-africaine qui composent la Coalition citoyenne pour le Sahel ont présenté, en avril 2021, dans le rapport « Sahel : ce qui doit changer », une feuille de route claire pour une nouvelle approche axée autour de quatre priorités, les « Piliers citoyens » que sont la protection des civils, la gouvernance, l’urgence humanitaire et la lutte contre l’impunité. Des indicateurs spécifiques permettant de mesurer les progrès ont alors été identifiés, accompagnés de recommandations concrètes.

Un peu plus d’un an plus tard, le présent rapport de suivi « Sahel : ce qui a changé » analyse les changements enregistrés, sur la base des mêmes indicateurs. Ce rapport propose des solutions pour répondre plus efficacement à des défis qui ne sont pas seulement d’ordre sécuritaire, mais relèvent également d’une profonde crise institutionnelle, politique, sociale et humanitaire qui frappe les trois pays du centre du Sahel et commence à s’étendre dans toute la sous-région.

Depuis avril 2021, le centre du Sahel a connu de nombreux bouleversements. Un gouvernement de transition en a remplacé un autre au Mali. Un président élu a été renversé, au Burkina Faso. Une vaste redistribution de la présence internationale est en cours, marquée par le redéploiement des forces française Barkhane et européenne Takuba du Mali vers le Niger notamment, la suspension des missions de formation de l’Union européenne et la diversification des partenariats internationaux dans le domaine de la défense, illustré par le recours, au Mali, à du personnel militaire russe. Parallèlement, des engagements nouveaux ont été annoncés par les États sahéliens sur la protection des civils, le respect des droits fondamentaux et la lutte contre l’impunité.

Mais qu’est-ce qui a changé pour les populations de la région ? Le « sursaut civil », annoncé au sommet de N’Djaména en février 2021, devait déboucher sur un renforcement de l’État de droit, une lutte plus efficace contre la corruption et l’impunité, une gouvernance plus transparente et inclusive. Ce sursaut civil a-t-il permis une baisse du nombre de vies perdues, une inversion de la courbe des violences basées sur le genre, le retour des millions de personnes qui ont fui l’insécurité, une moindre anxiété face au prochain repas, un meilleur accès à la justice pour les victimes ? La réponse, malheureusement, n’est pas un oui franc et massif comme les Sahéliens étaient en droit de l’espérer.

Avec ce rapport de suivi, la Coalition citoyenne pour le Sahel, comme elle s’y était engagée :

  1. Analyse ce qui a changé pour les civils depuis l’année 2020, période de référence du rapport « Sahel : ce qui doit changer », sur la base de données fiables.

  2. Mesure les progrès réalisés sur chacun des 8 indicateurs de référence identifiés comme critiques pour mettre en œuvre une nouvelle réponse à la crise qui permette de protéger plus efficacement les populations.

  3. Formule des recommandations mises à jour à l’attention des décideurs sahéliens et de leurs partenaires internationaux.

Le rapport révèle un certain nombre d’avancées depuis 2020, dans le sens d’une approche davantage centrée sur les besoins des populations, notamment en termes de dialogue politique et de lutte contre l’impunité. L’option militaire reste cependant privilégiée au Mali, au Burkina Faso et au Niger, où l’on observe une intensification des opérations de « neutralisation des terroristes », au détriment des investissements nécessaires dans la consolidation de la paix, la fourniture des services de base, l’accès à la justice et la refondation de la gouvernance.

La poursuite de stratégies essentiellement sécuritaires ne parvient pas à mieux protéger les populations civiles, qui continuent de perdre leur vie, leurs maison, leurs moyens de subsistance, leurs école, en trop grand nombre. La spirale de la violence contribue à miner davantage la confiance des populations dans l’État et la fragile cohésion sociale de pays dont la vulnérabilité est accentuée par les dérèglements climatiques et l’envolée du cours mondial des céréales suite à la guerre en Ukraine. La longue liste des massacres de civils attribués à de multiples acteurs armés, pour lesquels justice n’a toujours pas été rendue, devrait sonner comme un vibrant appel à la mobilisation générale pour mettre en œuvre les recommandations de la Coalition citoyenne pour le Sahel.