Article de l’équipe du volet riz de SARD-SC (Abiba Omar, Josey Kamanda et Sidi Sanyang)
Diplômé en comptabilité et en management, Loki Charles Cocou, 29 ans, a travaillé à temps partiel en tant qu’enseignant et a dispensé des cours à domicile à Cotonou, au Bénin. Cependant, ses revenus ne lui permettaient pas de subvenir aux besoins de sa femme et de ses trois enfants. Par conséquent, il est retourné à Bantè, son village, qui se situe dans le Centre du Bénin à près de 292 km de Cotonou.
La plupart des paysans de Bantè produisent de l’igname et du maïs pour la vente et pour leur consommation personnelle, de même que le coton et le cajou en tant que cultures de rente. Jusqu’à récemment, le riz a été produit à petite échelle et les riziculteurs n’étaient pas organisés en coopératives de producteurs.
De retour dans son village, Loki a cultivé du riz et, avec l’appui de l’organisation non gouvernementale « Entreprise territoire et développement » (ETD), il a rejoint le « Réseau des entreprises de services et organisations de producteurs » (RESOP) et a commencé la transformation de riz dans le cadre de dispositions contractuelles avec les riziculteurs.
Cependant, les rendements étaient faibles (en moyenne 2 tonnes par hectare), la qualité de paddy fournie par les producteurs était médiocre et la qualité de son riz usiné n’était assez bonne pour le marché. Par conséquent, étant donné que ses profits ne lui permettaient pas de payer ses dettes à temps et de prendre en charge les frais de scolarité de ses enfants, et de couvrir les charges de sa famille, il fut contraint de quitter le RESOP.
En 2014, AfricaRice et l’Institut national de recherche agricole du Bénin (INRAB) ont établi une plateforme d’innovation de la chaîne de valeur du riz (PI) à Bantè composée de producteurs de semences de riz, de revendeurs d’intrants, de riziculteurs, d’agents de vulgarisation, d’ONG, d’usiniers de riz, de décideurs politiques, d’institutions de microfinance, de commerçants, de transporteurs, d’agents des médias et de la recherche.
Les membres des PI ont été sensibilisés au besoin de travailler ensemble pour aborder les défis auxquels ils sont confrontés. AfricaRice a formé les riziculteurs à la production de semences de qualité et aux bonnes pratiques agricoles (BPA) et a fourni des semences de qualité de variétés de riz améliorées, des équipements pour la culture et la transformation (motoculteurs, batteuses et équipements d’usinage).
Encouragé par l’agent de vulgarisation local, le facilitateur de l’IP et les ONG locales, de nombreux producteurs ont rejoint la PI et adopté de nouvelles techniques de culture. Les résultats ont été tout de suite impressionnants : les rendements rizicoles ont augmenté passant de 4 à 5 tonnes par hectare. Cela a renforcé la confiance de Loki qui créa sa propre entreprise de transformation de riz appelée « Entreprise de transformation du riz du Bénin’ (ETRARIZ).
L’entreprise ETRARIZ achète le paddy auprès des producteurs et engage des femmes qui le trient pour se débarrasser des impuretés. Le paddy est par la suite usiné pour le débarrasser de la balle, poli et trié selon les catégories suivantes : long grain, grain de taille moyenne et riz brisé.
À la fin de ce processus, les femmes enlèvent les grains malades du riz usiné et conditionnent le produit fini en sacs de 1,5, 10 et 25 kg. Le riz est vendu sous la marque « IBILE » sur les marchés locaux et régionaux.
L’entreprise de Loki engage 5 employés permanents et 4 agents temporaires. Grâce à l’utilisation de l’équipement d’usinage qu’AfricaRice a fourni à l’IP, la qualité de son riz usiné s’est significativement améliorée et son riz peut à présent concurrencer favorablement le riz importé. AfricaRice a également sponsorisé sa participation à des foires pour promouvoir ses produits.
En 2016, il a transformé près de 300 tonnes de paddy et engrangé un bénéfice net de plus de 1 600 000 FCFA (près de 2 880 $US). Son activité est à présent rentable et a enrichi sa famille et apporté des opportunités. Fort de ce succès, Loki prévoit d’augmenter la capacité de son unité de transformation à 500 tonnes d’ici 2018.
Selon Loki, la mise en œuvre de l’approche de la PI est très louable. « Nous avons été formés aux bonnes pratiques agricoles, au leadership, et aux dispositions contractuelles et reçu de bons équipements. À présent, nous travaillons ensemble et améliorons nos résultats. Cela a apporté un grand changement dans les conditions de vie de ma famille et dans l’éducation de mes enfants ».
Loki est l’un des milliers d’acteurs des PI qui ont bénéficié du projet financé par la Banque africaine de développement (BAD) « Appui à la recherche pour le développement agricole des denrées stratégiques en Afrique » (SARD-SC) dont le volet riz est mis en œuvre par AfricaRice.
Outre son appui aux riziculteurs, aux producteurs de semences et aux usiniers, le projet SARD-SC a également aidé les transformatrices de riz à améliorer la qualité de leur riz étuvé en utilisant de bonnes pratiques d’étuvage et les équipements d’étuvage améliorés.
Plus de 745 étuveuses de trois villages au Bénin (Ajante, Agoua et Bantè) sont membres de la PI de Bantè. En juillet 2017, la PI de Bantè comptait 1 822 membres dont 41 % de femmes.