RESUME
Aperçu de la crise
La région du Lac, l’une des plus vulnérables du Tchad, fait face depuis le début de l’année 2015 à un déplacement massif des populations réfugiées, retournées et déplacées internes. En fin d’août 2015, les chiffres croisés de OCHA1 et HCR donnent à 84 898 le nombre des hommes et femmes déplacées dans la région. A ce chiffre s’ajoutent quelques 14 000 personnes déplacées internes installées en septembre autour de Ngouboua. Le caractère dynamique des déplacements et le problème d’accès à certaines zones rend difficile la maitrise du nombre des déplacés qui selon la CNARR atteindrait 127 000 personnes.
Les personnes déplacées ont fui les enlèvements, les assassinats odieux, les abus sexuels et autres pratiques esclavagistes perpétrées par les membres de la secte Boko Haram sur les hommes, les femmes, les filles et les garçons dans le Nord Nigeria et les villages tchadiens qui leurs sont frontaliers.
Les réfugiés sont accueillis au niveau du camp de Dar Es Salam alors que les retournés et les déplacés internes sont répartis dans quelques 19 sites d’accueil et communautés hôtes dans les zones de Bol et Bagasola. Cette dernière accueille presque 40% de son effectif sans aucune préparation ni mesures d’accompagnement, ce qui entraine une pression importante sur les ressources et services déjà insuffisants de la zone.
Les acteurs humanitaires dont les agences membres du système des Nations Unies, quelques ONG internationales et des ONG locales apportent l’assistance aux hommes et femmes déplacés mais leur capacité reste limitée en raison de problème d’accessibilité lié à la sécurité et de l’afflux régulier des populations déplacées depuis juillet 2015.
La situation sécuritaire quant à elle s’est détériorée dans la région du Lac depuis juillet 2015 avec la multiplication des attaques et des exactions des militants de Boko Haram dans les villages frontaliers avec le Nigeria et dans les îles. Suite à un fort déploiement de l’armée tchadienne dans la zone et la relocalisation des populations des îles, une certaine accalmie a été observée entre juillet et miseptembre.
Cette accalmie a été rompue entre le 22 septembre et le 10 octobre 2015 avec une succession d’attaques ayant touché les villages de Litri, Kaoudjiram, Kallam et Bikaram, Bagasola ville et le site de déplacés de Kousseri. Les risques sécuritaires se sont donc multipliés avec la pose de mines antipersonnel, en plus des attaques et des enlèvements. Même si les organisations humanitaires ne sont pas directement ciblées par ces attaques, celles-ci réduisent l’aide humanitaire aux personnes déplacées cloitrées dans les zones inaccessibles depuis plusieurs mois (Ngouboua, Daboua et Liwa) ainsi que dans les sites autour de Bagasola considérés jusque-là comme sécurisés.
A part les réfugiés pour lesquels les besoins sont quasiment couverts, les gaps demeurent importants pour les retournés et les déplacés internes. D’après OCHA2, environ 50 000 femmes et hommes déplacés n’ont pas accès à des abris ni aux articles non alimentaires, près de 40 000 n’ont reçu aucune assistance alimentaire; alors que ceux qui en bénéficient ne reçoivent pas de rations régulières. L’accès à l’eau potable reste insuffisant, 90% n’ont pas accès à des latrines et plus de la moitié des déplacés n’a pas bénéficié d’activités liées à l’hygiène, à la protection et à la santé.